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A la faveur de la pose de la première pierre d’un hôtel cinq étoiles que l’ACI s’apprêta à ériger le 8 avril 2009, le président de la République a réagi à propos de l’affaire qui oppose le Vérificateur Général, Sidi Sosso Diarra à la justice malienne.

“Cette affaire n’oppose pas le Bureau du Vérificateur Général à l’institution judiciaire, ni au gouvernement. Elle n’a rien de politique. C’est une affaire privée concernant un employeur et ses employés. Le Bureau du Vérificateur Général est mon initiative, je le soutiendrai contre vents et marées…”. Cette sortie du président de la République lève un coin du voile sur le soutien des plus hautes autorités à l’institution qu’est le Bureau du Végal.

En tout cas, après la conférence de presse initiée par le département de la Justice, le mardi 7 avril 2009 à la Direction Nationale de l’Administration de la Justice (DNAJ), nombreux étaient les observateurs qui ont pensé que les autorités ont lâché le Végal. Selon le Chef de l’Etat, il s’agit d’une affaire personnelle entre un employeur qu’est Sidi Sosso Diarra et huit de ses employés et non une affaire d’institutions. Qu’est-ce qui s’est donc passé entre le Végal et ses employés ?

Rappel des faits

Tout est parti des correspondances que le Végal lui-même a adressé en novembre 2008 à quatre ministres en leur demandant de reprendre certains de leurs collaborateurs qui travaillaient jusque-là chez le Végal au motif que ces travailleurs ont signé un contrat à durée indéterminée avec le Bureau du Végal incompatible avec leurs statuts de fonctionnaires civils et militaires. Mais avant, le Végal leur a demandé de prendre une disponibilité différente d’un détachement, chose qu’ils ont catégoriquement rejetée.


Dans une note produite par le département de justice intitulée :
Affaire Vérificateur général : Les Autorités pour le triomphe de l’Etat de droit”, il ressort que ladite affaire fait suite à une plainte avec constitution de partie civile de certains collaborateurs du Vérificateur Général devant le juge d’instruction du Tribunal de Première (TPI) de la Commune IV du District de Bamako.

C’est ainsi que des poursuites judiciaires ont été engagées contre Sidi Sosso Diarra pour utilisation de la force publique contre l’exécution d’une décision de justice. Prévus et punis par l’article 64 du code pénal (entrave à la liberté de travail), ces faits ont valu au Vérificateur Général d’être entendu, placé sous mandat de dépôt le mardi 31 mars, puis libéré après le paiement d’une caution de 1 million 500 mille F CFA le mercredi 1er avril 2009.

Loin de tout partie pris, connivence, corporatisme, laxisme ou indifférence, les autorités de la République suivent avec beaucoup d’intérêt et de sens de la responsabilité cette procédure qui relève, à leurs yeux, de l’application stricte de la loi.

En tout cas, le dossier dit Affaire du Végal se trouve en ce moment pendant devant la justice, le ministère de la Justice et le gouvernement se sont fixés une seule ligne de conduite : laisser triompher l’Etat de droit dans cette affaire.


Force doit-il rester a la loi dans cette affaire?

L’affaire du Vérificateur Général, M. Sidi Sosso Diarra qui défraie la chronique ces temps-ci est très sensible. L’opinion publique comprend mal qu’un monsieur anti corruption qu’est le Végal soit en prison des délinquants financiers et autres corrompus.

La justice est une affaire tellement sérieuse qu’elle ne doit pas être laissée aux seuls professionnels du droit. Le peuple, au nom duquel la justice est rendue, a son mot à dire dans cette affaire. Et, très majoritairement, l’opinion pense que Sidi Sosso Diarra n’est qu’une victime dans cette affaire.

Les faits remontent au mois de novembre 2008, plus précisément les 12, 14 et 27 novembre 2008 quand le Vérificteur Général a adressé des correspondances aux départements de la Justice, de la Défense et des Anciens Combattants, de la Sécurité Intérieure et de la Protection Civile, du Travail de la Fonction Publique et de la Réforme de l’Etat.

Dans ces correspondances, le Vérificateur Général a demandé aux différentes autorités de remettre certains de ses collaborateurs fonctionnaires et militaires à leurs administrations d’origine aux motifs que ces agents étaient liés au Bureau du Vérificateur Général par un contrat de travail à durée indéterminée incompatible avec leur statut de fonctionnaires ou de militaires.

A leur tour, les agents concernés (au nombre de huit), sous la houlette de Daniel A. Tessougué et leur conseil (Me Hamidou Diabaté) ont saisi le 17 décembre 2008 la section administrative de la Cour Suprême. La plus haute juridiction du Mali qu’est la Cour Suprême, par son arrêt n°219 du 31 décembre 2008, a fait droit à la requête des agents en ordonnant le sursis à exécution des mesures conservatoires prises par le Vérificateur Général.

En réponse, le Vérificateur Général et ses conseils (Me Magatte Seye et le Cabinet Juris Consult de Me Mamadou Ismaël Konaté) ont saisi le 31 décembre 2008 la Section administrative de la Cour Suprême d’une requête en annulation. Cette requête a été rejetée par ladite Cour le 5 février 2009 à travers son arrêt n°23.

Malgré la notification qui lui a été faite par voie d’huissier de cette ultime décision de la Cour Suprême, le Vérificateur Général a décidé de rompre ses rapports de collaboration avec les agents concernés (Daniel A. Tessougué et autres) le 12 février 2009.

Par la suite, Daniel A. Tessougué et ses compagnons vont porter plainte avec constitution de partie civile le 17 février 2009 devant le juge d’instruction, M. Dramane Diarra du Tribunal de Première (TPI) de la Commune IV District de Bamako sur la base de l’article 64 du Code pénal aux motifs que le Vérificateur Général a utilisé la force publique contre l’exécution d’une décision de justice.

De l’indépendance de la justice au mali

La justice, en engageant cette procédure judiciaire en toute liberté, entend obéir au principe sacro saint de la séparation des pouvoirs et surtout de l’indépendance de la justice. Loin de tout partie pris, connivence, corporatisme, laxisme ou indifférence, les autorités de la République suivent avec beaucoup d’intérêt et de sens de la responsabilité cette procédure qui relève, à leurs yeux, de l’application stricte de la loi.

L’indépendance de la justice qui est consacrée par la loi fondamentale (la constitution de février 1992) est sacrée. Elle s’applique certes à l’ensemble de l’appareil judiciaire, mais avec la précision selon laquelle si les magistrats du parquet (les procureurs et leurs substituts) sont hiérarchisés donc reçoivent des ordres, les magistrats du siège (les juges de siège et les juges d’instruction) sont totalement indépendants de toute injonction.

Autrement dit, c’est par les magistrats de siège que s’exerce réellement l’indépendance de la justice. Dans tous les pays démocratiques du monde, respectueux de l’état de droit, le juge d’instruction conduit en toute liberté la procédure portée devant lui.

C’est devant le juge d’instruction de la Commune IV que Daniel A. Tessougué et ses compagnons ont décidé de porter l’affaire. Par voie de conséquence les autorités de la République, soucieuses de l’indépendance de la justice et de l’instauration de l’Etat de droit, ont décidé d’appliquer à la lettre les principes qu’elles se sont fixés en la matière. Et cela au bonheur de la démocratie malienne.


Sidi Sosso Diarra peut-il échapper à la prison ?

L’article 64 du Code pénal stipule que “Tout fonctionnaire public, agent ou préposé de l’administration, qui aura requis ou ordonné, fait requérir ou ordonner, l’action ou l’emploi de la force publique contre l’exécution d’une ordonnance, d’un mandat de justice, de tout ordre émanant de l’autorité légitime, sera puni de cinq à dix ans de réclusion. Si cette réquisition ou cet ordre a été suivi d’effet, la peine sera le maximum”.

Le Vérificateur Général a-t-il violé l’article 64 du code pénal en interdisant l’accès à ses bureaux aux plaignants ? La réponse à cette question et à bien d’autres relève de la justice et plus précisément du juge d’instruction de la Commune IV.

Daba Balla KEITA

10 Avril 2009