43 nouveaux chefs-d’œuvre dont 11 en Afrique, ont été classés cette année, sur la liste du patrimoine.
Œuvres vivantes dans les domaines comme les expressions et traditions orales, la musique et la danse, les rituels et la mythologie, les connaissances et les pratiques concernant la nature et l’univers, les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel ainsi que des espaces culturels, ont été pris en compte par cette liste.
Parmi les chefs-d’œuvre africains, nous avons : le Kankurang, rite d’initiation en société mandingue pour le duo Sénégal et Gambie, le système de divination Ifa du Nigeria, le Moussem de Tan-Tan du Maroc, le musique Ahellil du Gourara d’Algérie …
Grâce à cette proclamation par l’Unesco, le « Yaaral » et « Dégal » vont susciter la curiosité des touristes, journalistes et chercheurs, leur donnant ainsi une plus grande visibilité.
Yaaral et Dégal sont les festivités marquant le retour des troupeaux de la transhumance.
La traversée du fleuve à Diafarabé et à Dialloubé par les troupeaux de bovins nourris à souhait, constitue le plus grand événement de cette manifestation culturelle.
Les troupeaux gardés sur les riches pâturages du Sahel durant la saison des pluies, reviennent dans les plaines inondables du bassin intérieur du Niger au moment de la décrue.
Les célébrations du retour ont toujours lieu un samedi, jour faste dans les croyances populaires peules.
Ce jour est déterminé en fonction de l’état des pâturages et de la décrue du fleuve.
Ces fêtes donnent lieu à de nombreuses manifestations, tels, le concours du plus beau troupeau.
Bêtes richement décorées sont présentées à ce concours, animé par les musiques et les danses de divers groupes.
Poèmes pastoraux relatant leurs aventures durant de longs mois de pérégrination à travers les lointaines contrées, sont déclamés par les bergers.
Jeunes filles habillées de leurs plus beaux habits et parures, forment des haies d’honneur et acclament les preux bergers tout en chantant leurs louanges.
Epouses décorent minutieusement leurs maisons en sortant tapis les plus beaux et nattes tressées les plus belles, pour accueillir leurs maris.
L’espace culturel du Yaaral et du Dégal correspond au vaste espace pastoral des peuls du Delta intérieur du Niger au Mali : l’immense plaine alluviale d’environ 30.000 km2 s’étend entre Ké-macina au Sud et Tombouctou au Nord, les zones exondées du Sahel comme Méma, Karéri et Farimaké et la plaine du Séno aux pieds du plateau dogon.
Cette zone, depuis la préhistoire, est propice à l’occupation humaine avec ses énormes potentialités qui sont la présence permanente de l’eau, ses riches terres favorables à l’agriculture et à l’élevage ainsi que ses ressources halieutiques.
Brillantes civilisations et cultures sont nées dans cette région, comme l’urbanisation ancienne illustrée par le site archéologique de Djenné-Djéno, fondé au IIIème siècle avant JC, considéré comme la plus ancienne cité en Afrique de l’Ouest sub-saharienne.
Grands empires du Moyen Age, tels ceux du Ghana, du Mali et Songhoy ; l’architecture soudanaise réputée pour ses ouvrages de terre en banco illustrés par les mosquées de Djenné et de Tombouctou, ainsi qu’une multitude de pratiques sociales comme les fêtes pastorales, les courses de pirogues (mangal) et les danses des marionnettes sur le fleuve, sont tous issus de la civilisation de cette partie du Mali.
Cependant actuellement, Yaaral et Dégal, sont fragilisés par quelques facteurs comme : les sécheresses récurrentes qui se répercutent sur les pâturages et les troupeaux perturbant ainsi le calendrier pastoral ; l’exode rural des jeunes entraînant une perte des connaissances et savoir-faire liés à l’élevage et à l’organisation des fêtes, ainsi que l’intervention souvent inappropriée du pouvoir central…
Cependant l’adhésion massive des communautés de la région à ces festivités leur assure une continuité certaine, avait rassuré il y a deux ans, feu Téréba Togola, alors directeur du patrimoine culturel.
13 janvier 2006.