Pour contenir les violences et par là même maintenir l’ordre dans la ville de Kita, un camion rempli des éléments du Groupement Mobile de Sécurité (GMS) Bamako a été dépêché sur les lieux en renfort aux éléments envoyés par la direction régionale de la police de Kayes et ceux en poste à Kita. Il y a eu plusieurs interpellations, des blessés aussi. Aujourd’hui la situation est sous tension malgré le calme précaire.
Selon des sources policières, le feu a été rallumé par les Cissé qui ont voulu reconstruire la mosquée de Kita Moribougou saccagée en 1999, sans une autorisation du préfet et de la mairie de Kita le Samedi 26 Novembre dernier.
Interpellés par la suite, les Cissé auraient avancé qu’ils détiennent une autorisation de reconstruire leur mosquée.
La mairie et la préfecture de Kita, saisies de la question ont répondu que cette autorisation ne vient pas d’elles.
C’est alors que des éléments radicaux du “Kabila” qui ne veulent pas du tout entendre la reconstruction de la mosquée, ont démoli les nouvelles constructions. Les Cissé non contents ont réagi par des jets de pierre, de bâton etc.
C’est ainsi que les communautés se sont affrontées entre elles par des courses- poursuites à travers la ville. L’intervention des éléments de sécurité en poste n’a pas permis de rétablir l’ordre.
Des renforts ont donc été dépêchés sur les lieux en provenance de Kayes et Bamako; ces interventions énergiques ont permis de rétablir l’ordre. Depuis le dimanche 27, la tension a baissé et la situation est aujourd’hui sous contrôle.
L’endroit litigieux est ceinturé par les éléments des forces de l’ordre et de sécurité, mais pour combien temps? Ce conflit politico-religieux dans la ville de Kita est comme un serpent de mer, il part et il revient.
En Janvier 2005, les belligérants de cette crise vieille de sept ans avaient décidé de faire table rase du passé afin de partir sur de nouvelles bases.
Les Cissé qui avaient boudé la prière du vendredi dans la grande mosquée de Kita depuis 1999 ont envoyé une délégation pour effectuer le geste rituel dans la dite mosquée le vendredi 14 Janvier 2005.
Ce geste de la part de Cissé a surpris plus d’un dans le cercle de Kita et nombreux étaient des gens qui ont nourri l’espoir que nous nous acheminons vers la paix des braves.
Sept ans après l’éclatement du premier conflit, certains faits méritent d’être rappelés sans vouloir remuer le couteau dans la plaie.
A l’époque, il faut dire que ce sont les Cissé qui dirigeaient la prière du vendredi dans la grande mosquée de Kita parce que considérés comme étant des familles maraboutiques.
Les griots nous apprennent que c’est à “Sélahata” (endroit mythique) que les autochtones de Kita se sont partagés le pouvoir: la terre aux premiers habitants de la ville qui sont les Camara-Tounkara, le commandement du pouvoir politique aux Keïta et le pouvoir religieux aux Cissé, Diané, Touré considérées comme des familles maraboutiques.
Avec la pénétration de l’islam, des membres du “Kabila” ont accédé au savoir religieux et ont eux aussi réclamé l’office de la prière du vendredi dont ils avaient la capacité.
Des Cissé avaient compris que cette demande d’officier la prière du vendredi par les Keïta est une manière de les destituer de leur pouvoir religieux et avaient décidé de bouder les prières de la grande mosquée.
Ils se sont retranchés dans la plus vieille mosquée de Kita Moribougou qu’ils considèrent comme leur patrimoine. Avec l’urbanisation anarchique, cette mosquée s’est retrouvée du centre d’un carrefour gênant quelque peu la circulation.
Sans autorisation, des éléments incontrôlés du “Kabila” ont complètement saccagé cette mosquée. Depuis, les Cissé priaient dans une maison privée aménagée à cet effet.
De 1999 à nos jours, toutes les tentatives de réconciliation des belligérants ont été vaines à commencer par les autorités locales dont le préfet, de Kita, le gouverneur de Kayes.
Même le bureau National de l’AMUPI (Association Malienne pour l’Unité et le progrès de l’Islam) avait dépêché une délégation à Kita pour faire revenir les protagonistes à la raison mais sans succès.
Le Ministère de l’Administration Territoriale et des Collectivités Locales qui avait lui aussi offert ses bons offices n’a pas également obtenu la réconciliation des coeurs et des esprits à Kita.
La question de l’IMAMAT à Kita reste toujours posée. La quiétude des populations est une fois de plus ébranlée et il urge de trouver une solution définitive à ce problème de mosquée ou de l’imamat.
Les protagonistes de cette crise vieille de sept ans doivent comprendre que la paix des ménages ou du village a un prix : elle est le fruit d’un compromis mutuel.
Daba Balla KEITA
29 novembre 2005.