Le Tata de Sikasso est le modèle le plus achevé des grandes forteresses en l’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui, malheureusement, il est menacé par la spéculation foncière.
Partis à Sikasso pour procéder à la pose de la première pierre de la direction régionale du domaine et du cadastre et l’autre présent dans la Cité du Kénédougou dans le cadre des préparatifs du festival Triangle du balafon (qui aura lieu les 6, 7 et 8 novembre 2008), les ministres du Logement, des Affaires foncières et de l’Urbanisme, Mme Gakou Salimata Fofana, et de la Culture, Mohamed El Moctar, ont consacré une journée à la prospection des vestiges du Tata de Sikasso, fortement endommagé faute d’entretien et de préservation.
Cette visite rentrait dans le cadre d’une perspective de restauration du Tata en voie de disparition. La muraille défensive qui a servi de garde-fou afin de barrer la route aux envahisseurs se trouve aujourd’hui dans un état de dégradation avancée. Mais le hic est que son existence est menacée par la spéculation foncière d’où toute la colère du ministre du Logement. Au cours de la visite de prospection, Mme Gakou Salimata Fofana et son collègue de la Culture ont constaté de visu l’état de dégradation du mur ceinture de Sikasso dont une partie à complètement disparue.
En l’absence d’une politique de préservation et de protection, le Tata de Sikasso face à l’extension galopante de la 3e région a subi des agressions. Aujourd’hui, aux yeux des deux ministres, il s’agit de « récupérer et de sauvegarder ce sui reste du Tata ». Pour se faire, Mme Gakou Salimata Fofana et Mohamed El Moctar ont instruit à leurs différents services techniques de proposer un plan d’aménagement.
« Il s’agit au début de faire le tracé original du mur et de procéder à l’aménagement des 7 portes du Tata » , a proposé le ministre de la Culture.
Un TF de danger
La construction d’un bâtiment situé dans l’emprise même de la muraille défensive au niveau du marché de bétail de Sikasso a suscité l’indignation des deux ministres. Le bâtiment en question appartient à un opérateur économique de la place qui, selon un responsable de la direction nationale des domaines et du cadastre, refuse d’obtempérer à une décision de la DRDC exigeant l’arrêt des travaux.
Informée de cette affaire Mme Gakou Salimata Fofana a demandé au gouverneur de prendre des mesures nécessaires pour que cette décision puisse prendre effet jusqu’à ce que l’affaire qui se trouve au niveau de la justice soit vidée.
En plus de ce bâtiment, plusieurs logements administratifs ou à usage d’habitation ont soit cassé une partie du Tata soit sont contiguë à la muraille alors qu’une distance de 15 m au moins doit les séparer des vestiges. A en croire à un agent de la DRDC de Sikasso, si démolitions il y a, plusieurs bâtiments publics seront concernés.
« Des constructions comme le Tata Ciné, la Mission catholique et le siège de la Bcéao de Sikasso devront normalement être démolis pour n’avoir pas respecté la servitude de 15 m » , a-t-il noté.
Le maire de la Commune urbaine de Sikasso Mama Sylla a, au cours d’un entretien, écarté l’option de démolition pour ne pas soulever d’autres problèmes car d’après lui tout le monde à sa part de responsabilité dans la dégradation du Tata due essentiellement « au débordement de la ville ».
A propos de l’opérateur économique qui s’entête à continuer avec les travaux de son immeuble en dépit de la décision de la DRDC d’arrêter, Mama Sylla a révélé qu’il avait reçu une correspondance l’invitant à demander la démolition du bâtiment. « Mais, je me suis rendu compte que le monsieur a un titre foncier délivré par le gouvernorat. On ne peut pas procéder à une démolition sans une décision de justice », a rappelé le maire, qui ajoute que l’affaire remonte avant son arrivée à la mairie.
Mama Sylla, le maire des enfants
Tout au long de la visite de prospection, le maire de la Commune urbaine de Sikasso a reçu des ovations et une attention particulière de la part des enfants, ses amis, dit-on, à Sikasso.
« Mama Sylla, Mama Sylla, Mama Sylla…. » , scandaient les enfants qui par grappes humaines fonçaient sur le maire, chacun voulant lui serrer la main. Des scènes qui n’ont pas laissé indifférents les deux ministres, hôtes de Mama Sylla qui n’ont pas hésité de lui demander son secret pour attitrer les tout-petits.
Mama Sylla était récemment au-devant de l’actualité dans une certaine presse qui l’accusait de « saboter les actions du gouverneur de la région Issa Tapo », suite à une marche des femmes du marché de Sikasso qui réclamaient une place pour mener leur activité commerciale.
Tout en manifestant sa surprise, le maire, au cours d’un entretien, a noté qu’il n’a jamais eu d’anicroche avec le gouverneur, qui a d’ailleurs confirmé ses bons rapports avec lui. « C’est grâce à moi que les femmes ont pu avoir le jour même qu’elles ont marché une place au Grand marché de Sikasso », s’est-il défendu.
Amadou Waïgalo
(envoyé spécial)
17 Septembre 2008