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Ils l’ont fait savoir lors d’une conférence de presse animée hier par un collège de six avocats : Me Kassoum Tapo (ancien bâtonnier) ; Seydou I.
Maïga (actuel bâtonnier du Conseil de l’ordre) ; Mamadou I. Konaté ; Mamadou G. Diarra (membre du Conseil) ; Mamadou Tounkara et Moussa Goïta.

Ces avocats ont estimé que la démarche du président du tribunal administratif de Bamako est inhabituelle. Selon le porte-parole du Collectif, Me Kassoum Tapo, « c’est du jamais vu en droit administratif. On est ici en matière administrative où la procédure est écrite devant le tribunal administratif« .

Les avocats ont indiqué : « toutes les écritures ont été échangées, les observations sur les mémoires développées oralement, tous les techniciens de droit qui analysent les textes de droit soulevés à savoir le juge rapporteur qui fait le point du droit et le Commissaire du gouvernement ont fait ce qu’ils devaient faire« .

C’est fort de tous ces éléments que le tribunal, après avoir écouté toutes les parties a jugé nécessaire de mettre le délibéré au vendredi, 13 janvier dernier. C’est « à la surprise générale donc que le tribunal a rabattu le délibéré pour complément d’information sans préciser la date de la prochaine audience. Cette attitude est une première en la matière« , estiment les avocats du privé.

Me Tapo dira sans détours qu’on lui (le juge) a mis la pression dessus.
Selon lui, le magistrat du siège en charge de ce dossier avait été appelé par le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Me Fanta Sylla pendant que l’affaire était en délibéré.

Le vendredi dernier aussi, c’est-à-dire le jour du délibéré même, le juge était au département de la Justice toute la matinée. Il a été conduit devant le ministre. Et après deux heures et demi de débats, on l’a amené à rabattre le délibéré.

« Nous ne pouvions pas nous taire sur cette interférence de la justice dans le dénouement d’une affaire« , affirme Me Tapo.

Que le président du tribunal soit appelé devant le ministre pendant qu’il s’apprête à prendre une décision importante, c’est une première, ajouta Me Tapo.
« Nous dénonçons fermement cette interférence du ministre de la Justice« .

Le magistrat, révéla-t-il, a été l’objet de harcèlement, il a subi une forte contrainte. « Nous refusons cet état de fait« . Selon Me Tapo, le ministre n’a rien à voir dans cette affaire.

Parlant de l’affaire qui les oppose au Vérificateur général aujourd’hui, le Collectif des avocats par la voix de Me Tapo dira que le Patronat n’a rien contre ni l’institution du Vérificateur général, ni contre la personne même du Vérificateur général. Il tiendra en outre à préciser qu’il n’a jamais été question pour ses clients de remettre en cause cette institution.

Cependant, dira-t-il, la Loi N°03-030 du 25 août 2003 qui fixe les missions du Vérificateur général ne l’a pas autorisé à venir faire une investigation dans le secteur privé. Cette mission de contrôle de la TVA et taxes assimilées au sein de certaines entreprises de la place est illégale.

Il n’est pas question, selon lui, qu’elles acceptent une véritable inquisition. « On n’a rien contre le Vérificateur général mais il doit rester dans sa mission« , affirme Me Tapo.

Selon lui, dans un Etat qui se respecte, tout le monde ne peut pas faire n’importe quoi sinon on n’est dans une République bananière.

La mission principale du Vérificateur général, rappellera Me Tapo, c’est de contrôler les services publics ou là où l’Etat donne de l’argent. Il ne peut pas aller vérifier les comptes bancaires d’une société privée.

A long terme, conclut Me Tapo, si on admet l’intervention du Vérificateur général dans le secteur privé, c’est l’ordre public économique qui est menacé.

Du côté du bureau du Vérificateur général défendu par Me Magatte Sèye (ancien bâtonnier), on reste convaincu que cette mission de contrôle de la TVA et taxes assimilées au sein de certaines entreprises du secteur privé est tout à fait légale.

Comme moyen de défense devant le tribunal administratif, le Conseil du Vérificateur général argue que la taxe sur la valeur ajoutée fait partie des recettes publiques, c’est donc l’argent de l’Etat.

Partant de ce seul fait, le Vérificateur a le droit de vérifier et contrôler la régularité et la sincérité de toutes les opérations relatives à la TVA et aux taxes assimilées.

Birama Fall

27 janvier 2006.