Hamidou Diarra (Dragon) dénonce le mal vivre de nos populations, les déviations de notre société, s’interroge sur les vraies raisons, suggère des coupables et s’étrangle devant certains actes posés au nom de notre peuple dans un langage vert avec un ton volontaire.
Beaucoup de gens trouvent insultant et arrogant son ton. Si c’est à cause du ton et l’audace de l’homme que ses ravisseurs ont agi de la sorte, c’est bien dommage. En d’autres temps j’aurai dit que son âge lui interdisait de s’adresser ainsi à notre société ; que la parole était sacrée et que les propos à tenir respectaient le registre des âges. Mais le modèle de société que nous avons librement choisi reconnaît à tous des droits et des devoirs, ce qui signifie que nul n’a la liberté de se faire justice.
Les états d’âme, les humeurs ne sont plus de saison. En foulant aux pieds toutes les voies de recours légales, le comportement des ravisseurs de Dragon peut être assimilé à une tentative de musellement des voix qui dénoncent en l’absence d’une opposition politique dans notre pays.
La stagnation du pays est une dure réalité palpable. Le cas de la montée du prix du riz est une illustration de la grande confusion de gestion que nous vivons.
Malgré l’effort consenti par les gouvernants pour faire baisser les prix et l’apparition à la télé nationale des commerçants grossistes et détaillants, les prix sont restés les mêmes dans la presque totalité des points d’approvisionnements. Le sentiment d’être dupé ne tardera pas à voir le jour dans la population puisqu’elle est déjà frustrée.
Il est incompréhensible que dans une situation de crise que le citoyen résiste à l’Etat fusse-t-il de droit. Au Mali, il semble qu’on a imposé comme mode de vie la confusion : l’école est revenu à l’apaisement plusieurs fois, le secteur privé a été plusieurs fois ré dynamisé, le social a été plusieurs fois au centre des préoccupations, la sécurité à fait l’objet de multiples débats en haut lieu et pourtant la vie garde toujours son caractère de parcours de combattant à telle enseigne qu’on se demande le sens des propos tenus et le but recherché par les dirigeants, les leaders d’opinions, les opérateurs économiques.
Dans un Etat pareil, que la classe politique dans sa quasi-totalité rallie la mouvance présidentielle passe. Mais qu’elle porte la contradiction à retardement et fasse des sorties périodiques ne fait qu’accroître le sentiment d’abandon du peuple dans les pires moments.
C’est dans ces conditions que des hommes comme Dragon sont propulsés aux avant-postes dans un rôle qui n’est pas prioritairement le leur.
Si les voies autorisées se mettent à dénoncer (Dieu sait qu’il y a beaucoup à dénoncer), les autres ne seront que des relais. Le mal vivre du Mali d’aujourd’hui est imputable au manque de transparence, de suivi des actions initiées, l’accompagnement des actions et l’inadéquation entre les propos et la réalité sur le terrain.
Il urge de trouver des solutions à ces maux. Et cela incombe aux politiques d’abord. Le Mali vient certes de loin, mais cela ne saurait être un argument éternel pour tout justifier et laisser à la presse votre tâche.
De plus, la classe politique dans son ensemble doit s’investir pour dénouer la situation de tri culture (traditionnelle, islamique, occidentale) qui en ajoute à la confusion des esprits. En usant de ces trois cultures simultanément on ne saurait rendre un jugement objectif car chacune à ses interdits.
Hamidou Diarra en a été victime comme certains avant lui. Mes propos ne visent personne. Mon objectif est un Mali prospère pour tous.
Bakary Sangaré
(imprimerie Jamana)
27 juillet 2005