Les actes qui ont concouru à la création du TF n°10617 du cercle de Kati au nom du général de police Yahaya Sangaré violent les dispositions de la lettre circulaire n°1351 MATCL-SG du 2 juillet 2003 qui suspendait la dévolution de parcelles de terrains adressée à tous les gouverneurs, préfets, sous-préfets, maires, suite à une décision du conseil des ministres.
En service au ministère de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, l’inspecteur général de police Yahaya Sangaré, connu aussi pour être un homme d’affaires prospère, ne manque pas d’occasions pour s’attribuer par des chemins tortueux des titres fonciers d’autrui en bonne et due forme délivrés par les services compétents. La dernière en date concerne Paul Leroux Traoré, informaticien de son état, promoteur de Tata Groupe, qui a élaboré le premier fichier informatique.
De quoi s’agit-il ? Le 27 octobre 1999, Paul Leroux Traoré, acquiert par les procédures légales, une concession rurale en titre provisoire de 4 hectares, 56 ares, 76 centiares à Samalé dans la Commune rurale de Kalabancoro. Il transforme sa concession en titre définitif créé dans les livres fonciers sous le n°4041.
Plus d’une décennie après, « avec la complicité d’agents de l’Etat« , l’inspecteur général de police, Yahaya Sangaré, est arrivé à faire faire un autre titre sur le même domaine sous le n°10617 du 18 juin 2010. Sommes-nous sur une autre planète ? Que non !
Ayant constaté cet état de fait, le sieur Traoré écrit au ministère des Domaines de l’Etat qui, après avoir diligenté une enquête, a, le 8 juillet 2010, purement et simplement annulé « l’acte administratif n°10-0360/MLAFU-DRDC du 18 juin 2010 portant cession du titre foncier n°10617 au profit de Yahaya Sangaré« , en raison d’antériorité par le biais de son directeur régional de Koulikoro.
Entre-temps, Yahaya met son plan machiavélique en place. Il fait convoquer le vrai propriétaire de la parcelle au Camp I de la gendarmerie pour interrogatoire. « Pendant trois heures, des gendarmes tentent de me molester et m’intimider par un interrogatoire musclé…« , se plaint M. Traoré.
Dès la fin de l’acte d’abus de pouvoir, Paul Leroux Traoré adresse une correspondance au Premier ministre d’alors, Modibo Sidibé, avec ampliation au ministre de la Justice et au ministre de la Sécurité intérieure et de la Protection civile pour se plaindre des abus d’un officier de police « qui utilise les moyens de l’Etat à des fins personnelles pour intimider les citoyens« .
Orgueilleux, et non content de la décision, celui qui avait été radié des effectifs de la police sous le président Alpha O. Konaré, avant d’être réhabilité par son acolyte ATT, se sentant offensé attaque l’Etat malien devant le Tribunal administratif pour… « excès de pouvoir« ! Il est débouté par jugement n°540 du 9 décembre 2010.
Le sieur Sangaré fait appel de cette décision devant la Section administrative de la Cour suprême. Contre toute attente, celle-ci lui donne raison et « infirme le jugement n°540 du 9 décembre 2010 du Tribunal de Bamako dans toutes ses dispositions et annule l’acte de M. Traoré Paul ainsi que la décision d’annulation du directeur régional de Koulikoro dans toutes ses dispositions par décision du jugement n°540 du 9 décembre 2010« .
Paul Traoré fait appel de cette décision de la Section administrative de la Cour suprême et demande une révision le 7 décembre 2011. Et le 13 décembre de la même année, le conseil du plaignant envoie une lettre d’information au président de la Cour suprême du Mali, dans laquelle il narre les faits et met l’accent sur « le comportement impossible à expliquer survenu au greffe de l’institution…«
La Cour suprême viole la loi
Dans la correspondance, l’avocat écrit qu’en « violation flagrante« des dispositions de l’article 71 de la loi n°96-071 du 16 décembre 1996 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour suprême et la procédure suivie devant elle, qui édictent notamment que le recours en révision est suspensif, qu’il doit être introduit dans le délai d’un mois à compter du prononcé de la décision dont la révision est demandée, « le greffier en chef de la Cour suprême a apposé le 7 décembre 2011 la formule exécutoire sur l’arrêt n°260 rendu le 11 novembre 2011« .
L’examen de la grosse, selon l’avocat permet de réaliser qu’elle a été délivrée avant même le délai prescrit par la loi. Or ce même jour, ajoute-t-il, « notre recours en révision contre cet arrêt a été enregistré sous le n°2449 du greffe, la consignation encaissée suivant reçu n°644 du même jour et le certificat de dépôt n°644 délivré le même 7 décembre 2011. Or, poursuit la lettre, Yahaya Sangaré muni de cette grosse à lui délivrée, nous l’a fait signifier par Me Mamadou Camara, huissier de justice le 12 décembre 2011 à 10 h 12« .
Et de poursuivre qu’au niveau de ce même greffe, « notre recours enregistré depuis le 7 décembre 2011 sous le n° 2449 n’a pas été acheminé à ce jour à la Section administrative« (le 13 décembre 2011). L’intervention du président de la Cour suprême a été sollicitée « afin de mettre un terme à cette illégalité manifeste et intolérable« .
Il faut noter que tous les actes qui ont concouru à la création du TF n°10617 du cercle de Kati au nom de Yahaya Sangaré ; à savoir : le titre provisoire du 2 septembre 2003, l’avis d’enquête de commodo et d’incommodo du 15 juillet 2003, le certificat administratif du 14 juillet 2003 sont tous intervenus alors que la lettre circulaire n°1351 MATCL-SG du 2 juillet 2003 ordonnait la suspension de la dévolution de parcelles de terrains adressée à tous les gouverneurs, préfets, sous-préfets, maires, suite à une décision du conseil des ministres.
Il revient à la Cour suprême de dire le droit, tout le droit, rien que le droit. M. Traoré ne compte pas, dans tous les cas, se laisser faire et saisira « l’Espace d’interpellation démocratique s’il le faut« .
Affaire à suivre.
Amadou Sidibé
04 Juin 2012