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Dioila, Kolondiéba, Didiéni et, pas plus tard que le dimanche dernier, la scène est la même. Des enfants crasseux qui ne peuvent plus porter leurs chaussures, car, à force de se tenir débout, les pieds ont enflé.
Des visages fatigués par les multiples tortures dues aux cris, aux danses qu’on leur impose. Des corps souvent blessés par les multiples coup de matraques ou fouets des policiers trop zélés qui veulent montrer au « Chef » qu’ils font leur boulot.

Enfin, des créatures martyrisées par les organisateurs qui se partagent des centaines de mille offerts généreusement par le général-président afin que la fête soit belle.
Au fait qu’est-ce qui se passe ? Quand on annonce l’arrivée du président de la République, il est logique que la population sorte pour l’accueillir. Mais, là où le bât blesse, c’est qu’on fait sortir les enfants très tôt le matin. On leur fait scander des slogans à la gloire d’ATT, chanter des louanges au Mouvement Citoyen.
Sans pour autant penser que ces fragiles créatures ont besoin de se désaltérer ou de manger.
Le cas le plus pathétique fut celui de Kolondiéba, où une jeune fille est tombée comme une feuille morte sous la chaleur. On apprendra plus tard qu’elle n’a pas bu de l’eau depuis le matin.
Le dimanche dernier, à Kita, le record d’attente a été battu. De 6 heures 30 à 16 heures, soit 10 heures.
Le président de la République et sa suite ont tout d’abord discuté avec les paysans, déjeûné avant de rejoindre les populations sur la place publique.
Pendant ce temps, les enfants n’ont eu droit qu’à un sachet d’eau.

Peu avant l’arrivée d’ATT, certains enfants avaient perdu de la voix et s’étaient carrément affaissés. « Je n’en peux plus. Je suis fatigué et je n’ai pas mangé depuis le matin. On ne pense qu’à nous que pour venir crier« , nous a confié une fillette, qui portait un T-shirt de l’URD rouge de poussière. Car, rappelons-le, ces enfants dansent, chantent et crient.
« Est-ce que je peux aussi avoir le reste de l’eau que vous avez ?« , a lancé une autre fillette les cheveux poussiéreux.
Mais, toutes ces anomalies, sont édulcorées, masquées et cachées pour que tout soit beau aux yeux du « Chef ».
Une chose qu’il n’appréciera certainement guère.

Paul MBEN

28 juin 2005