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Abondamment relayée par l’ORTM, RFI et, dans une moindre mesure par la PANA, l’information relative au soutien des cotonculteurs maliens à ATT pour l’élection présidentielle à venir est un faux, fabriqué par Bakari Togola, le président de l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture du Mali (APCAM). En effet, quatre syndicats se partagent le monde des producteurs de coton et la parole d’un seul n’engage pas forcément les autres. Sans compter que, au sein même du Syndicat des Producteurs Cotonniers et Vivriers (SYCOV), le syndicat présidé par Bakari Togola, l’unanimité est loin d’être faite sur le sujet. Il n’ y avait que cent cinquante à deux cent personnes à N’Kourala. Les cotonculteurs maliens sont entre 2 et 3 millions d’individus. Une vraie imposture.

A quatre mois de la présidentielle de 2007, les grandes manœuvres politiques vont bon train. Après la signature par 14 partis d’une plate-forme d’Alliance pour la Démocratie et le Progrès (ADP) afin d’assurer au président sortant sa réélection, voici le « projet des cotonculteurs » tirés par les cheveux.

En effet, sous la houlette du président de l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture du Mali (APECAM), Bakary Togola, réputé être un ami du président ATT et du premier vice – président du Mouvement citoyen, Ahmed Diane Semega, deux cent paysans environ se sont retrouvés, le samedi 16 décembre, dans la commune rurale de N’Kourala, située à 50 km de Sikasso. D’une même voix, ces cotonculteurs ont fortement demandé à ATT de se représenter à la magistrature suprême de l’Etat, affirmant qu’ils lui apporteront 1,5 million d’électeurs sur les trois millions d’habitants qu’abrite la zone CMDT.

Cette mise en scène, a faire dire à certains journaux de la place que les cotonculteurs du Mali ont décidé de soutenir le président sortant. La presse étrangère, notamment RFI et la PANA, ont même annoncé que le Syndicat des producteurs cotonniers et vivriers ( SYCOV) dirigé par le même Bakary Togola, a promis de soutenir ATT en 2007. Ce qui est sûr, c’est que Togola et certains «cotonculteurs ont bien l’intention de voter en faveur d’ATT».

Mais de là à dire que ce sont les cotonculteurs du Mali qui ont décidé de soutenir ATT, il y a un pas que certains ont vite fait de franchir. Les syndicats cotonniers sont au nombre de quatre : le SYCOV (syndicat des producteurs cotonniers et vivriers) le SYVAC (syndicat pour la valorisation des cultures) le SYPAMO (syndicat des producteurs agricoles de Mali Ouest) le SCPCK (syndicat des producteurs de coton de Kita).

Ces quatre organisations sont réunies au sein du Groupement des syndicats cotonniers et vivriers du Mali (GSCVM) qui ne s’est pas encore prononcé s’il doit le faire. Sur les quatre syndicats, un seul a clairement affiché son soutien à ATT. C’est un précédant dangereux de politiser une telle structure, composée des militants de tous les partis et des parents de plusieurs leaders politiques.

Analphabète de son état, Bakary Togola, installé à la tête de l’APCAM par le truchement du pouvoir, notamment le ministre de l’Agriculture, Seydou Traoré veut par ce geste renvoyer l’ascenseur à son bienfaiteur qui ne jure que par et pour ATT.

Face à cette imposture, le secrétaire général du RPM, Bocari Tréta s’est rendu à Sikasso où il a constaté que «les militants et responsables RPM, cotonculteurs de leur état ne sont guère engagés dans cette aventure ATTiste».

Peut -il en être autrement quand on sait que dans les zones cotonnières, notamment à Bougouni, c’est Blaise Sangaré de la CDS, adversaire du président ATT à la présidentielle prochaine, qui domine dans ce milieu. Nombreux sont en effet ses parents, frères et amis qui sont des cotonculteurs. Ils ne voteront jamais contre «leur frère et fils du terroir» au profit d’ATT. A Koutiala, qu’on le veuille ou non, c’est le SADI qui pèse.

Le parti du Dr Mariko est en contact permanent avec les paysans. Ses militants ne voteront pas aussi pour ATT. Boubèye compte aussi beaucoup d’amis paysans dans la capitale de l’or blanc. Sans oublier IBK qui est natif de cette localité. Que dire de Kita ? Un bastion que se disputent le RPM et le PARENA. Ces deux formations politiques sont bien implantées dans le milieu paysan. Leurs supporters ne prendront jamais le bulletin frappé de l’effigie d’ATT. Que deux ou trois personnes aillent à N’Kourala parler en leur nom ne saurait nullement les engager.

Cette manipulation de l’opinion publique, via des cotonculteurs, est digne de l’ère communiste. Il ne grandit pas le pouvoir. Au contraire, en procédant de cette façon, il se discrédite et se trompe lourdement sur ses estimations électorales. Et le réveil pourrait lui être brutal.

Ce qui est sûr, c’est que le coton sera au centre de la campagne électorale, compte tenu de ce qu’il représente dans l’économie malienne et aussi du nombre élevé de la population qui vit de l’or blanc soit trois millions de nos compatriotes.

En effet, le secteur coton au Mali, c’est 85 à 130 milliards de FCFA par an de revenu brut pour le monde rural, 160 à 200 milliards de FCFA par an de recettes d’exploitation, 5 à 10 milliards de FCFA par an de taxes pour l’Etat. Aussi, l’Etat consent-il des avantages pour les producteurs.

Il s’agit d’un prix minimum garanti de 238 FCFA le kilogramme de coton graine contre un prix officiel de 210 FCFA et 160 FCFA pour le coton conventionnel pour les trois dernières années, d’une prime d’investissement de 34 FCFA le kilogramme, d’une prime biologique du même montant, d’une sécurité de la filière et une synergie entre les acteurs.

CHAHANA TAKIOU

20 décembre 2006.