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Le Lundi 29 août 2005, la salle de conférence de la direction régionale de la santé a refusé du monde. Dans leurs plus beaux boubous, les femmes de Tombouctou ont pris d’assaut la salle dès les premières heures de l’après midi.

En cette période de soudure, elles voulaient entendre celle qu’il faut désormais appelée  » Mme sécurité alimentaire ».

Pour leur part, les responsables des ONG de Tombouctou étaient très fortement représentés. Les responsables des associations de Tombouctou ont salué les actions de l’Etat en faveur de leur cercle.

Ils ont rappelé à Mme Lansry que la situation alimentaire, dans le cercle est caractérisée par les prix (très
élevés) du mil et du sorgho.

Pire, ils ont dénoncé la faible disponibilité de céréales sur les marchés. Certains ont mis l’accent sur le difficile démarrage de la campagne rizicole.

Selon eux, ce retard est lié à des problèmes de semence, d’engrais et de vétusté des moto pompes. De leur coté, les éleveurs ont informé les autorités des conditions d’élevage globalement mauvaises dans le cercle.
Un déficit de 34700 tonnes

Mme Lansry Nana Yaya haidara a rappelé le contexte dans lequel le pays a enregistré un déficit céréalier de 347000 tonnes à l’issue de la campagne agricole 2004-2005. Selon elle, le manque de pluie et les actions des criquets pèlerins ont plongé 1O1 communes dans des difficultés alimentaires et 83 autres dans des difficultés économiques.

« Pour atténuer les souffrances des populations, l’Etat sur les recommandations du Système d’alerte précoce (SAP) a décidé de faire des distributions alimentaires gratuites, des ventes d’intervention de l’OPAM,des offres publiques de ventes et l’installation de 160 banques de céréales dans les communes et une vingtaine dans les quartiers périphériques de Bamako » a-t-elle indiqué.

En ce qui concerne la région de Tombouctou, elle a rappelé qu’en plus des distributions gratuites et des ventes d’intervention de l’OPAM, dix sept communes ont bénéficié de banques de céréales portant sur un total de 310 tonnes de mil.

Par ailleurs, Mme Lansry a estimé qu’en plus d’être une question conjoncturelle, l’insécurité alimentaire pose un véritable problème structurel auquel le Mali doit faire face.

Elle a levé un coin du voile sur la politique que le Mali compte mettre en place pour bouter l’insécurité alimentaire hors de ses frontières.

Elle dira qu’en 2002, le gouvernement a doté le pays d’une stratégie nationale de sécurité alimentaire qui vise la mise en place de stocks communautaires de sécurité alimentaire dans les villages.

Si pour atteindre cet objectif, les comités communaux, locaux, et régionaux de sécurité alimentaire ont déjà été mis en place, Mme Lansry a indiqué que le rôle principale sera joué par les populations à travers l’élaboration des programmes et plans communaux de sécurité alimentaire.

« Cette approche va permettre à nos communes de réaliser rapidement leur sécurité alimentaire« a-t-elle déclaré.

Mme Touré Bintou Traoré, présidente de la CAFO à Tombouctou, a salué l’initiative de la rencontre qu’elle estime propice à la naissance d’une fructueuse collaboration entre les femmes de Tombouctou et le Commissariat à la sécurité alimentaire.

De son côté, Amza Touré, président de la coordination des ONG de Tombouctou a rappelé le rôle important que les ONG jouent dans le domaine de la sécurité alimentaire dans la région.

Il a ensuite souhaité la révision des méthodes du Système d’alerte précoce qui serait, selon lui, à l’origine des cas de communes oubliées lors des distributions alimentaires gratuites.

Le pasteur Nock Yattara de l’ONG TNT a souhaité que le gouvernement renforce la stratégie mise en place pour faire face aux difficultés alimentaires.

« Il faut de plus en plus compter avec la sécheresse » a-t-il affirmé. Il a ensuite souhaité que des dispositions soient prises pour permettre aux consommateurs pauvres d’acheter des petites quantités de vingt kilogrammes pendant les ventes d’intervention de l’OPAM.

Il a aussi plaidé le cas des populations qu’il a présenté comme flottantes, qui n’ont bénéficié d’aucune distribution gratuite parce qu’elles ne sont rattachées à aucune commune.

Il a souhaité une action spéciale en faveur des populations vulnérables de ce qu’il a appelé la ceinture de la misère qui se trouve autour de Tombouctou.

De son côté, Dramane sidibé de CARE international a souhaité que des actions soient initiées à l’intention des femmes, chefs de familles et des ouvriers agricoles qui constituent des couches vulnérables.

Il a ensuite estimé que l’insécurité alimentaire est structurelle au Mali. Pour cela, il a demandé de changer les méthodes de la planification.

Mieux, le représentant de Care à Tombouctou a dénoncé la taille réduite des exploitations.
Selon lui, une famille de vingt personnes ne peut pas vivre de l’exploitation d’un dixième d’hectare.

Pour sa part, Mme Ben Barka Fatimata, directrice régionale de la Promotion de la femme a dénoncé le comportement des commerçants.

«  Malgré l’exonération de la tva sur l’importation de riz, le moule d’un kilogramme et demi, est passé aujourd’hui à 750 FCFA sur le marché de Tombouctou  » a-t-elle dénoncé. Elle s’est ensuite inquiétée de la tendance des prix à augmenter.

La sécurité alimentaire par l’ accès de la femme à la terre.
Mme Maiga Zeinab Cissé, présidente de la section CAFO de Kabara a dénoncé l’exclusion de la femme du droit à la propriété foncière.

Or, elle dira que sa section a ravitaillé la grande majorité des cultivateurs de riz à Tombouctou en semences grâce à l’hectare de terre qu’elle exploite.

Partant de cette expérience, elle a interpellé les autorités à tout mettre en œuvre pour assurer l’accès de la femme à la terre, au nom de la sécurité alimentaire.
Pour apaiser les uns et les autres, Mme Lansry a donné la parole à ses collaborateurs.

Brahima Sangaré, chef du département chargé de la planification et du suivi, a indiqué que la stratégie nationale mise en place prend en charge les causes structurelles.

Pour sa part, Mary Diallo, coordinateur national du SAP a révélé que sa structure a été mise en place le 26 avril 1986 pour éviter les catastrophes de 1973 et de 1984.
«  Dans ce cadre, je pense que le système a bien joué son rôle cette année » a-t-il déclaré.

Il a ensuite indiqué que le SAP est une structure légère et efficace basée sur la collecte de l’information à travers un questionnaire mis à la disposition des populations. Placée sous la responsabilité du sous-préfet et du maire, le comité communal SAP doit remplir son questionnaire composé de 12 modules et l’acheminé au niveau du cercle avant le 15 de chaque mois.

Là, une synthèse est faite par le comité SAP du cercle. Cette synthèse est acheminée dans la région avant le
25 du mois.

Au niveau de la région, le représentant régional du SAP prépare un draft sous la responsabilité du directeur régional de la statistique et du plan. Un rapport régional est transmis à Bamako avec tous les questionnaires remplis dans les cercles.

« La coordination nationale du SAP publie un bulletin après avoir traité toutes ces informations et formule des recommandations à l’intention des autorités » a indiqué Mary Diallo.

Vue l’importance du système, il a invité tous les acteurs à s’impliquer au maximum pour le remplissage des fiches d’enquête.

De son côté, Youssouf Touré, PDG de l’OPAM dira que depuis la restructuration de 1981 sa structure ne fait plus de vente au détail.

Il indique que dans les zones à risque de rupture d’approvisionnement, l’OPAM est obligé de procéder à des ventes d’interventions d’au moins deux tonnes par regroupement de consommateurs.

Dans le cadre des ventes d’interventions, le PDG a informé les populations que le mil est disponible au niveau du magasin de l’OPAM au prix de 17610 F CFA le sac de cent kilogrammes.

Mieux, il a révélé que les plus démunis du cercle de Tombouctou ont bénéficié de distributions gratuites de céréales.

Selon lui, les ventes d’intervention et les banques de céréales ont été initiées pour assurer la disponibilité des céréales.

Assane Kone
Envoyé spécial

05 septembre 2005.