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L’attaque du poste militaire de Tinzaouatène, un village situé à la lisière de la frontière avec l’Algérie, vendredi dernier, suivie dimanche matin de celle d’un convoi de ravitaillement de l’armée, perpétrées par des assaillants appartenant au groupe de Ibrahim Ag Bahanga, constituent une rupture de fait de la trêve que le même Bahanga s’était engagé à respecter, à la suite de sa rencontre avec Iyad Ag Ghaly. Un soldat a perdu la vie au cours de l’accrochage du 16 septembre qui a aussi fait 7 morts, plusieurs blessés et un prisonnier chez les insurgés, annonce un communiqué du ministère de la Défense et des Anciens Combattants.

Ces développements récents viennent s’ajouter aux nombreuses exactions de Bahanga et de sa bande dans cette zone de la région de Kidal. Leur criminelle équipée a occasionné des morts civils et militaires, notamment les marchands dont le véhicule a sauté sur une mine, une trentaine d’otages, des dégâts matériels sans compter le climat d’inquiétude qui pèse sur la Région de Kidal.

Tout à commencé par l’enlèvement le 26 août des membres d’une mission de lutte anti acridienne et de protection de végétaux, des gendarmes et gardes qui les escortaient ainsi que de leurs véhicules à Tidjeret, dans la commune rurale d’Alata. Quatre techniciens de la lutte anti-acridienne et les 24 gardes et 2 gendarmes chargés de leur protection, ainsi que leurs trois véhicules, ont été enlevés par les assaillants. Les bandits ont ensuite libéré 8 otages, dans leur retraite.

Le lendemain 27 août, un convoi de ravitaillement de l’armée quittant Kidal pour Tinzaouatène, a été la cible, à 50 km de Tinzaouatène, de la même bande. Les assaillants ont pu emporter deux Lands et un camion Berliet contenant les vivres du poste de sécurité de Tinzaouatène. Une vingtaine de militaires ont également été kidnappés. La patrouille lancée à leur poursuite a réussi à récupérer 8 militaires.

L’explosion de mines au passage d’un véhicule civil transportant des forains et d’une land-cruiser de l’armée dans le secteur de Tinzaouatène, s’est ajoutée aux attaques, alourdissant le bilan des agissements de rebelles en rupture de ban dont les méthodes sont indiscutablement comparables à celles de terroristes.

Face à ce regain de tension, le gouvernement a exposé le dossier aux diplomates et responsables d’organisations internationales accrédités au Mali. « Le gouvernement du Mali considère que les actes posés par les bandits armés dirigés par Ibrahim Ag Bahanga sont graves en ce qu’ils constituent une rupture de la paix chèrement acquise dans cette partie du territoire national. Une paix si essentielle à la sécurité régionale voire internationale. C’est aussi une violation flagrante des idéaux de la IIIè République et de la légalité internationale, notamment le traité d’Ottawa sur les mines antipersonnel. Ces actes méritent, à la suite du gouvernement du Mali, d’être condamnés très clairement par la communauté internationale, et leurs auteurs combattus avec rigueur, détermination et solidairement« . C’est en ces termes que le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Moctar Ouane, avait défini la position du gouvernement sur la situation.

Selon le ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales, le général Kafougouna Koné, Bahanga s’est mis en retrait depuis le démarrage du processus de paix. « Le vrai problème de Bahanga est qu’il s’est senti frustré dans la mise en place des unités spéciales. Il ne voulait pas que ce soit l’armée qui occupe certaines zones notamment Tinzaouatène qui est la route par excellence de la drogue. Il est donc parti dans la dissidence, en faisant d’abord une première attaque le 11 mai dernier et s’est réfugié au Niger. Il est ensuite revenu reprendre les attaques. Nous ne pouvons pas dire concrètement ce que Bahanga veut. Une mission est en train de le rencontrer pour savoir ce qu’il veut réellement« , a-t-il expliqué.

Évoquant le cas de l’ex Lt colonel Assane Fagagah qui a déserté pour rejoindre son cousin Bahanga, le général Koné a relevé qu’il ne s’était jamais situé dans une logique de paix. Il voulait qu’on mette une force à sa disposition qui suppléerait les forces armées et de sécurité au nord. Ce qui lui a été refusé. Pour Kafougouna Koné, c’était tout simplement pour soumettre cette partie du pays, à des trafics de tout genre et servir de base terroriste que Fagagah a exigé cette force.

L’Alliance du 23 mai signataire des accords d’Alger avec le gouvernement, ayant pris ses distances avec Bahanga et ses complices, Iyad Ag Ghaly, un responsable de l’Alliance, conduisait néanmoins une première médiation. Son contact avec Bahanga débouchait sur la libération de huit otages malades et l’instauration d’une trêve par Bahanga.

Un calme relatif s’installait dans un contexte de psychose occasionnée par les mines enfouies on ne sait où par la bande de Bahanga. Sollicitée, l’Algérie fournissait alors un premier ravitaillement, à la troupe stationnée dans la zone de Tinzaouatène.

Afin de mettre un stock suffisant de vivres à la disposition de ces troupes, le gouvernement a alors fait appel à l’armée américaine pour des largages de vivres. Lors de sa seconde rotation aux environs de Tinzaouatène, un avion américain a essuyé, sans être touché, des tirs effectués par les hommes de Bahanga. C’était le jeudi 13 septembre.

De source du gouvernorat de Kidal, citée par des confrères, trois notabilités de la région (Al Ghabas Ag Intallah, député à l’Assemblée nationale, Aladi Ag Alla, ex-combattant et Bayène Ag Ahawali, ancien édile de Kidal) auraient quitté Kidal, de leur propre initiative vendredi, pour rejoindre Bahanga et ses bandits éparpillés sur la montagne de Tigargaret, afin de les ramener à la raison.

Mais cette démarche semble aujourd’hui vaine puisque Bahanga et ses hommes ont attaqué, deux jours plus tard, le poste de Tinzaouatène puis une colonne de l’armée, avec le bilan que l’on sait.

Bahanga, déjà hors-la-loi, se met chaque un jour un peu plus au ban de toutes les communautés du Septentrion si on en juge par les déclarations et communiqués qui se multiplient pour condamner ses exactions.

Aujourd’hui Bahanga apparait comme l’ennemi de la paix, un obstacle aux efforts de développement et le responsable de la mort de trop nombreux innocents.

M. N. TRAORÉ- L’Essor

18 septembre 2007.