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Il y a seulement deux ans, la situation alimentaire et nutritionnelle des habitants de Rharous était acceptable voire un peu conforme aux normes requises dans ces domaines. La Covid-19 et l’embargo ont changé la donne

Au marché hebdomadaire de Rharous, qui se tient le jeudi, il n’est pas rare d’entendre, au détour d’un hangar, ce type de conversation qui se fait sur un ton badin, mais qui exprime réellement le vécu quotidien : «Au rythme où le prix du lait grimpe, ne serait-il pas préférable de commencer à élever des chèvres ?».

 Le lait de chèvre est réputé, pour ses valeurs nutritives. Ces conversations et d’autres, du même registre, illustrent parfaitement le contenu du panier de la ménagère et du quotidien de la vie de l’habitant, en général. Les prix des denrées de consommation courante ont grimpé depuis l’éclatement de la pandémie de la maladie à coronavirus, à laquelle sont venus se greffer, plus tard, les effets contraignants de l’embargo dont est victime le Mali.

 Il faut préciser que l’ordinaire ici, est constitué principalement de produits provenant du Maghreb et, essentiellement, de l’Algérie et de la Mauritanie. Du sucre au thé, en passant par l’huile de cuisine, le lait en poudre, les pâtes alimentaires, les dates et autres aliments conditionnés. Seuls le riz, le mil, les épices et d’autres céréales sèches viennent du Sud du pays et d’autres localités de la région, notamment, le Cercle de Diré, dont le riz est apprécié ici, pour sa qualité et son coût.

Depuis deux ans, le prix du paquet de lait d’un kilogramme est passé de 1.250 Fcfa à trois 3.000 Fcfa. Le bidon d’huile alimentaire de cinq litres, qui coûtait à la ménagère, 2.500 Fcfa est arraché, aujourd’hui, au prix d’or de 7.000 Fcfa.

Le sachet familial de cinq kilos de sucre qui était vendu, dans la fourchette de 1.750 à 2.000 Fcfa est cédé à 3.000 Fcfa, aujourd’hui. Le riz, l’élément principal de l’alimentation journalière, connaît aussi une hausse exponentielle. Auprès des commerçants grossistes, le sac de cinquante kilos de riz coûte 22.500 Fcfa, soit le double de son prix, il y a deux ans.

Au cours de la campagne agricole 2021-2022, le riz paddy local était vendu au «moudé» (mesure traditionnelle de deux kilos cinq cents) à 400 Fcfa. Aujourd’hui, il est cédé à son double. Même les prix de la viande et du poisson, dont la localité est grande productrice, connaissent une hausse considérable. Le prix du kilogramme de viande est passé au double. Il en va de même pour celui du poisson.

Globalement, le prix de toutes les denrées alimentaires a doublé, en deux ans. La cherté de la vie, en sus d’être accentuée à Rharous par les effets négatifs de la Covid-19 et de l’embargo, est aussi liée à des facteurs antérieurs comme l’ensablement progressif du fleuve Niger, véritable cordon ombilical commercial, entre les régions du Sud du Mali et celles du Nord, et qui se rétrécit comme une peau de chagrin, chaque année.

Ce phénomène contre lequel l’état a mis en œuvre plusieurs programmes de sauvegarde et de sauvetage, demeure encore un véritable casse-tête environnemental et, surtout, de survie pour les populations riveraines, en termes de navigation commerciale et d’exploitation agricole.

Chef-lieu de cercle, le plus enclavé du Mali et, paradoxe, un des plus anciens, Rharous en particulier et tout le Cercle en général, risquent une insécurité alimentaire et nutritionnelle cette année, si des dispositions idoines ne sont pas prises par les autorités compétentes.


Mohamed GAKOU 

Gourma Rharous-Amap

Source: L’Essor