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De sources judiciaires, le présumé meurtrier de Siriman Camara dit Alain le Français, blessé mortellement par balle dans la nuit du 10 au 11 mai devant la boîte de nuit «Le Milliardaire» serait un agent de police de la brigade spéciale d’intervention. Ce dernier, le sergent de police Mamadou Maïga, après quelques heures passées en garde à vue au commissariat de police du 1er Arrondissement dans le violon comme un vagabond, a été présenté le 12 mai au juge d’instruction du 1er cabinet du tribunal de première instance de la commune III du district de Bamako, Adama Fomba.

En présence d’un des substituts du procureur de la République près ledit tribunal Sombé Théra et son avocat conseil Maître Boubèye Maïga, le juge d’instruction Adama Fomba a notifié au sergent de police de la brigade spéciale d’intervention, Mamadou Maïga qu’il l’inculpe pour «Homicide volontaire sur la personne de Siriman Camara dit Alain le Français». Étant en matière criminelle et pour les besoins de l’enquête, le juge Adama Fomba a en outre décidé de placer sous mandat de dépôt le présumé meurtrier.

Où serait-t-il gardé avant la fin de son instruction ? C’est la question qui a été soulevée par Me Boubèye Maïga après la mesure prise par le juge d’instruction à l’encontre de son client.

Selon l’avocat, son client étant un homme en uniforme, il doit bel et bien bénéficier des avantages carcéraux qui ont été accordés à l’ex- régisseur de la prison de Ségou, Sékouba Doumbia qui, après avoir été inculpé pour «complicité d’évasion» dans l’affaire Ismaïla Haïdara de WAIC a été incarcéré à la gendarmerie du Camp I de Bamako.

Mais le procureur de la République près le tribunal de première instance de la commune III du district de Bamako, Sombé Théra, a préféré l’envoyer à la maison centrale d’arrêt de Bamako prétextant que d’autres hommes en tenue s’y trouvent.

Cette inculpation du sergent de police Mamadou Maïga a beaucoup choqué son avocat, Me Boubèye Maïga, ses collègues de service et ses parents et amis. «C’est inimaginable. C’est comme s’il a sciemment donné la mort à Siriman Camara dit Alain le Français. La police est quand même le bras de la justice. L’affaire risque de prendre une autre tournure sachant que le sergent de police Mamadou Maïga encourt la peine de mort», nous confie Me Boubèye Maïga.

Quant à sa famille, bien que sous le choc de cette tragédie et du sort qui est aujourd’hui réservé à un des leurs, elle aborde les choses avec philosophie. Elle serait même allée présenter des excuses et des condoléances dans la famille de feu Siriman Camara. Mais au niveau de ses collègues de service, la pilule est amère à avaler.

D’abord le fait d’avoir jeté le sergent de police Mamadou Maïga dans le violon du commissariat de police du 1er Arrondissement parmi les vagabonds et surtout d’avoir infligé le même sort à deux autres de ses collègues sans interrogatoire préalable a été très mal ressenti par les éléments de la brigade spéciale d’intervention. Selon nos sources, c’est l’intervention de l’Epervier du Mandé, Papa Mamby Keïta, qui a eu l’intelligence d’alerter à temps le commandant de la brigade d’investigation judiciaire qui a permis d’éviter de justesse une bataille rangée entre ses éléments et les agents du commissariat du 1er Arrondissement.

L’autre grief que les éléments de la brigade spéciale d’intervention reprochent cette fois-ci à Sombé Théra est d’avoir inculpé et incarcéré leur collègue sur la base d’un procès verbal en manuscrit, c’est-à-dire non tapé. Or la pratique judiciaire voudrait que le procès verbal soit tapé pour être exploitable.

Tel n’a pas été le cas dans l’affaire du sergent de police Mamadou Maïga. Le plus révoltant pour eux, c’est d’avoir voulu humilier leur collègue en le menottant. Ce que refusèrent d’ailleurs les inspecteurs de police qui l’ont conduit au tribunal.

Est-ce à cause de cela que le procureur Sombé Théra pensant que le tribunal de la commune III allait être envahi par les éléments de la brigade spéciale d’intervention a demandé du renfort ? Pour certains agents de la dite brigade, il n’en était rien.

Rappel des faits

Selon Me Boubèye Maïga, avocat du sergent de police, tout a commencé il y a quelques semaines quand les propriétaires de certaines boîtes de nuit de Bamako ont demandé officiellement à la police de les aider. Ces derniers perdant des recettes énormes tous les jours soupçonnaient en effet les portiers, les loubards de collusion sur leur dos avec des clients. C’est ainsi que la police a officiellement envoyé les éléments de la brigade spéciale d’investigation en civil mener des enquêtes.

Après avoir fait le tour de certaines boîtes de nuit de la capitale, ces policiers en civil ont conclu que ce sont les loubards qui s’adonnaient à des pratiques peu orthodoxes. Ils laissaient en effet entrer les clients moyennant un prix inférieur au prix normal de la boîte. Un des producteurs de boîte de la rive gauche ayant eu ces résultats a pris des mesures contre les loubards. Ces derniers mécontents ont attiré le sergent de police Mamadou Maïga et deux de ses collègues dans un guet-à-pen dans la nuit du 10 au 11 mai devant la boîte de nuit le Milliardaire, sise à l’immeuble Babemba à Ouolofobougou.

Arrivés sur place, les trois policiers en civil ont été séparés les uns des autres avant d’être littéralement attaqués par les loubards. C’est au cours de cet affrontement que Siriman Camara dit Alain le Français a été mortellement blessé par une balle provenant du pistolet automatique de service du sergent de police Mamadou Maïga. A en croire Me Boubèye Maïga, le rapport établi par le médecin légiste a conclu que «la balle est entrée pas le bas pour sortir par le haut». Selon lui, cela veut dire que c’est son client qui était à terre au moment où la balle partait.

Birama Fall

14 Mai 2010.