Et très vite commença une sorte de traque que
beaucoup ont définie plus tard, comme une chasse aux
sorcières.
Les structures de lutte contre la
corruption et la délinquance financière, mises en
place pour la circonstance par le nouvel homme fort du
pays, avaient en fait pour mission de traquer les
ennemis du parti au pouvoir : l’ADEMA-PASJ ou tous
ceux qui étaient susceptibles de lui mettre des bâtons
dans les roues.
Le scénario, très vite compris pas les Maliens, a
fini par désenchanter plus d’un. Personne ne voulait
plus croire, que la lutte contre la corruption et la
délinquance financière, annoncée tambour battant,
avait pour but d’assainir les finances publiques et de
relancer l’économie nationale, pas même les
initiateurs.
Quand ATT est revenu au pouvoir en 2002, beaucoup de
Maliens s’étaient , tout le monde le prit au sérieux.
Le contraire pouvait surprendre. ATT tel qu’il fut et
tel qu’il est aujourd’hui, demeure toujours dans les
esprits.
L’homme sait que pour réussir un bon mandat, il lui
faut relever le niveau économique national. Plus ce
niveau est bon, plus le pays va bien, plus le niveau
est bas, plus le pays va mal.
Mais comment assurer un
bon niveau économique quand la corruption, les
malversations, le népotisme version démocratique,
minent tous les compartiments de l’Etat? La réponse,
il l’a. La solution, il l’a aussi certainement.
Mais
comment scier l’abre sur lequel on est assis?
Difficile de veiller sur les autres et sur soi-même en
même temps.
Les corrompus et les corrupteurs de la République
sont généralement connus. Les pilleurs des caisses
d’Etat ne sont papris à espérer un changement dans
les moeurs tant politiques que sociales.
L’homme,
connu pour son intégrité et son sens élevé du devoir,
tel que son entourage aime à le dire souvent, a donc
toutes les qualités pour parfaire ce que son
prédécesseur avait commencé et poser des jalons pour
le futur.
Ainsi, lorsqu’il promit, lui aussi, de faire
de la lutte contre la corruption et la délinquance
financière, son cheval de bataille, sans faire de
règlement de comptes cachés non plus.
Les traquer
reviendrait pour le Chef de l’Etat, à organiser une
partie de chasse au sein de sa propre famille
politique avec tout ce que cela comporte comme risque
pour lui-même. Or, on sait qu’il est certainement
candidat à sa propre succession en 2007.
Nous
arrive-t-il parfois de poser la question : « D’oû vient
l’argent des campagnes en Afrique? » Dans un pays
pauvre comme le Mali, les campagnes politiques se font
toujours à coup de millions. Paradoxe? Mais ne
demandez pas d’où vient cet argent.
Qu’ATT ait la volonté politique d’honorer ses
engagements politiques, il se buterait à des problèmes
d’ordre politique: Peut-il traquer les barons de
l’ADEMA-PASJ ?
Après dix ans passés au pouvoir, ils
sont certainement nombreux à traîner des casseroles
derrière eux au sein de ce parti.
Peut-il traquer ses
propres « amis » », ceux avec qui il est venu aux
affaires et ceux qui l’ont aidé à revenir au pouvoir?
Ne demandons pas au diable de se confesser.
Au Mali,
comme dans la plupart des pays africains, si la lutte
contre la corruption et la délinquance financière ne
s’assimile pas à un règlement de compte, elle est tout
simplement inefficace.
Le Mali a institué le Vérificateur général au moment
où l’UEMOA instruisait aux pays membres de mettre en
place une Cour des Comptes.
Cette Cour des Comptes
serait plus efficace que toute autre structure de
contrôle interne et garderait toute son indépendance
vis-à-vis du pouvoir étatique.
Eh bien ! De cette Cour
des Comptes, le Mali n’en veut pas encore. Pourquoi?
les raisons, tout le monde les connaît : on ne se fait
pas hara-kiri à moins qu’on ne soit Japonais.
En lieu
et place, on a préféré le Vérificateur Général,
relevant du Premier responsable du pays et à qui, tout
le monde ne doit pas obeïssance. Les opérateurs
économiques viennent de le prouver.
« Le vérificateur,
c’est pour les autres, pas pour nous. » Or au Mali, il
est difficile de tracer la frontière entre
fonctionnaire de l’Etat et opérateur économique. Tout
le monde est opérateur économique, privé ou « public »,
c’est selon. Si le vérificateur général ne peut pas
vérifier les opérateurs économiques, qui
vérifiera-t-il? A moins que le Vérificateur général ne
soit qu’une simple mode.
Aimé RODRIGUE
08 septembre 2005.