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Le Mouvement Devoir de Génération pour « commémorer à sa façon le cinquantenaire de l’indépendance nationale » a lancé le week-end dernier un cycle de débats qui posent clairement la question de savoir : « après 50 ans d’indépendance, le Malien vit-il mieux, qu’est-ce qui a été fait, qu’est-ce qui n’a pas marché, pourquoi, comment, que peut-on préparer pour un avenir meilleur dans les 50 autres années à venir ? »

En ouvrant le cycle de conférence débats dimanche 9 mai à Paris, Ismaïla Camara, le président du MDG/France, souhaitait « insuffler une dynamique jeune qui rappelle celle des premières autorités du Mali » : débattre publiquement pour trouver des réponses adéquates aux défis qui se posent à la nation pour son développement.

La première journée de ce cycle consacrée à la problématique de l’éducation dans les pays en développement, à la question énergétique, au partenariat public et privé, entre autres, à défaut d’attirer un public nombreux à la hauteur de l’engagement des organisateurs, a été l’occasion d’échanges souvent intéressants entre les intervenants et le public.

Issa Diawara, enseignant chercheur à l’Institut universitaire de Dijon, mettra sur la table des éléments de débat sur la politique éducative, le bien-fondé des programmes, de la coopération éducative, l’utilisation rationnelle des moyens humains et financiers, etc.

L’exposé du spécialiste, tiré d’une étude approfondie sur la situation de l’école au Mali qui sera bientôt publiée, repose sur une dialectique tangible : les nations sont-elles riches parce qu’elles ont plus scolarisées ou plus scolarisées parce que riches ?

 » Si l’éducation vise à la réduction des inégalités et de la pauvreté, donc la création de richesses pour la croissance économique, il ne faut pas se voiler la face : nous n’avons pas suffisamment éduqué nos populations », constatera-t-il après avoir mis en évidence certains aspects de la politique éducative nationale qui freinent le développement du pays comme l’adaptation de la formation à l’emploi, le recours à des spécialistes étrangers qui ignorent souvent des réalités locales et prônent des modèles inapplicables comme cela fut le cas dans les années 1970 avec la réforme Palm/Beloncle, faisant table rase de la réforme de 1962 au seul motif apparemment qu’elle était d’inspiration socialiste.

Le constat le plus dommageable est celui d’entendre un jour, « oui il faut une école bilingue, le lendemain non cela est une aberration et le surlendemain oui mais » ; des attitudes qui témoignent d’un manque criard de véritable politique, pensée sur le long terme, fera remarquer M. Diawara.

Il a parlé de l’éducation en langue nationale, une question qui soulèvera une vive polémique dans la salle tout comme le métier même d’enseignant devenu de plus en plus comme « une occupation provisoire pour les jeunes diplômés en attendant d’avoir mieux » alors qu’on constate une perte sèche dans la formation d’un cycle à un autre de 78 % au primaire on tombe 32 % au secondaire et seulement 6 % au supérieur. Des chiffres qui en disent long sur la déperdition scolaire, la baisse des niveaux… Bref, « la mauvaise utilisation des ressources ».

Le MDG dans le bon sens

Tout ce que Khadim Sylla, chef de programme au bureau planification de l’éducation à l’Unesco confortera dans une contribution sur l’éducation au Mali et la coopération internationale en se demandant ce que les Etats africains attendent pour réclamer les 1000 milliards d’euros de bénéfice dégagé de leurs richesses nationales et qui dormiraient dans le Trésor français pour financer leur développement plutôt que de tendre la main à des coopérations pas toujours adaptées et souvent très compliquées.

La journée de débats a été aussi l’occasion de faire un état des lieux et de dessiner des perspectives maliennes face aux marchés internationaux de l’énergie, parler des potentialités du barrage de Manantali comme un des grands projets qui s’inscrit dans la philosophie des partenariats public/privé, de l’immigration et de l’intégration de la communauté malienne en France en portant un regard particulier sur la 2e génération.

Ce dernier point a été développé par la nouvelle coqueluche franco-malienne, le tout nouvel élu socialiste Ali Soumaré dont la candidature aux dernières régionales et surtout l’affaire qui en a résulté par les accusations de ses adversaires de droite en a fait depuis, une tête d’affiche sur tous les débats sur l’immigration et l’intégration.

La présence tout au long de la journée du consul général du Mali à Paris, Waffi Ougadèye Cissé, ainsi que de Gaharo Doucouré, président du Conseil de base des Maliens de France, étaient la preuve que l’initiative du MDG trouve un écho très favorable dans la communauté malienne en France.

Et comme le rappellera le président de son comité exécutif national venu de Bamako avec sa délégation, la lecture politique de l’action et du débat national par les jeunes doit dépasser l’agitation discursive pour véritablement s’ancrer dans la bataille pour une responsabilité assumée en posant des actes concrets.

Thierno Diallo qui demande à ce qu’on fasse confiance à la jeunesse rappellera que le MDG n’est pas un parti politique, mais une association qui s’exprime sur les grandes questions qui interpellent la nation. Et c’est assurément en cela que ce cercle de réflexion peut faire évoluer les choses dans le bon sens au Mali : en permettant à la jeunesse d’accéder aux responsabilités en ayant une pleine conscience des enjeux.

Le cycle de débats interrogatifs aboutira à la production d’un rapport général qui constituera la contribution du MDG dans le programme sur le cinquantenaire en étant un bilan objectif de ce qui a été fait et de ce qu’il convient d’envisager pour un avenir meilleur.

Oussouf Diagola

(Paris)

11 Mai 2010