Partager

Sous la plume de l’historienne, des séquences de vie quotidienne s’animent, prennent forme et interpellent. Un écrit d’Adame Ba Konaré ne se lit pas ; il se dévore, il se savoure, car, chaque construction, chaque figure de style est choisie, étudiée et soupesée, donnant au lecteur un produit fini qui rappelle l’orfèvre. L’instituteur de nos jeunesses n’est pas loin.

Bamako mute ; des riches et parvenus, repus des plaisirs de la vie, s’en inventent tous les jours, jusqu’aux vices. Ils vivent dans l’artifice, avec tout ce qui fait une cour : les soucis « majeurs », les intrigues, les déviances et tout le reste.

A côté un autre monde qui cherche juste « à manger », qui se bat pour l’instant. Le tout dans un pays, où, il y a peu, la solidarité de voisinage, l’entraide sociale… constituaient des valeurs fondatrices, civilisationnelles.

Dans une précédente vie, Adame Ba Konaré a côtoyé, apporté son appui aux pauvres sur les tas d’ordures, organisé « la réinsertion ».

Son roman dès lors, apparaît comme la restitution d’un vécu, de la façon la plus crue. Car, dites comme elle a l’art de le faire, les phrases, les lettres s’animent, prennent vie et les scènes que tout le monde dépasse au quotidien prennent forme, interpellent.

Habituée aux récits historiques, elle vient de changer de registre. Pour le bonheur du lecteur, car à ce niveau, s’il n’est pas possible de parler de coup d’essai, il s’agit en tout cas d’un coup de maître.

A la fin, l’interpellation demeure : de quel Mali nous voulons ? Un pays socialement désossé, avec des franges fuyant et s’ignorant ?

Les politiques auront à se prononcer, car au-delà de son ouvrage, elle avait montré la voie, les voies possibles.

Que ceux qui ont des oreilles entendent !

Alexis Kalambry

07 avril 2006.