Plaidoyer pour une disposition constitutionnelle relative à la vigilance citoyenne et étatique vis-à-vis du bien public.
La cérémonie de présentation des réformes proposées par le Comité d’Appui aux Réformes Institutionnelles (CARI) a été organisée au Centre International de Conférences de Bamako (CICB) le 19 avril 2010 sous la présidence du Président Amadou Toumani Touré.
Au lendemain de cette présentation officielle, un débat s’est instauré au sein de la classe politique à travers les journaux de la place. Il est à espérer que ce débat d’idées puisse être grandement ouvert en menant une campagne de communication en bonne et due forme auprès des populations dans les langues nationales.
La transparence ainsi accrue dans la conduite du débat sur les propositions du CARI en y invitant les citoyennes et les citoyens du pays permettra assurément de faire adopter par référendum des réformes largement consensuelles à l’issue d’élections libres et transparentes selon les standards internationaux en la matière.
Dans ce contexte, l’Alliance pour la transparence au Mali (en abréviation Transparence Mali), association apolitique à but non lucratif créée en avril 1999, voudrait contribuer au débat en proposant une disposition constitutionnelle relative à la vigilance citoyenne et étatique vis-à-vis du bien public.
En effet, la corruption, définie selon un consensus mondial comme l’abus de fonctions publiques ou privées pour son bénéfice personnel, est à la fois « effet pervers » et « cause majeure » du non respect des droits de l’homme. Notamment les droits civils et sociaux dont le droit au quotidien et « le droit fondamental de chacun d’être à l’abri de la faim ».
En attestent d’une part, le prologue de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 26 août 1789 et d’autre part, le préambule de la Convention des Nations Unies contre la Corruption (ci-dessous) :
« Les représentants du peuple français, constitués en assemblée nationale, considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de l’homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements … »
« Les Etats Parties à la présente Convention,
Préoccupés par la gravité des problèmes que pose la corruption et de la menace qu’elle constitue pour la stabilité et la sécurité des sociétés, en sapant les institutions et les valeurs démocratiques, les valeurs éthiques et la justice et en compromettant le développement durable et l’état de droit,… ».
Il convient de rappeler que la Convention des Nations Unies contre la Corruption est entrée en vigueur le 14 décembre 2005 et le Mali l’a ratifié le 18 avril 2008. De même, notre pays a ratifié le 17 décembre 2004 la Convention de l’Union Africaine sur la Prévention et la Lutte contre la Corruption qui est entrée en vigueur le 5 août 2006.
Et l’état des lieux en matière de corruption dans notre patrie est caractérisé par la banalisation de ce « fléau cancérigène » au point, où même pour la jeunesse malienne, l’avenir de la nation, la « chose » paraît naturelle.
C’est ainsi que, lors des Etats Généraux sur la Corruption et la Délinquance Financière tenus à Bamako les 25, 26, 27 et 28 novembre 2008, entre autres recommandations, les participants ont mis l’accent sur « le renforcement de la campagne d’information et de sensibilisation pour que les populations cessent de considérer les situations de corruption et de délinquance financière de façon positive, vécues comme une source de réussite sociale… ».
Compte tenu de tout ce qui précède, nous voudrions soumettre à l’appréciation des constitutionnalistes de notre pays un article nouveau (à la suite de l’article 23 de l’actuelle constitution) qui pourrait être formulé comme suit (ci-dessous) :
« La vigilance vis-à-vis du bien public est un devoir pour tous et pour l’État ».
Ainsi pourra t-on envisager, à notre avis, la nécessaire « tolérance zéro » en matière de corruption dans le cadre d’un plan d’action national de prévention et de lutte contre la corruption et la délinquance financière en se basant sur une volonté politique sincère d’éradication de ces deux fléaux avec la participation active et consciente des populations en application d’une disposition constitutionnelle.
Veuille DIEU nous AIDER dans cette voie.
Amen.
Modibo DIAKITE
12 Mai 2010.