Le ridicule a cessé de tuer au Mali. Sinon, Dioncounda Traoré, le président de l’ADEMA, Seydou Traoré, le secrétaire politique du même parti ne seraient pas parmi nous en ce moment. En effet, après les casses du 27 mars, suite au match Mali-Togo, toutes les formations politiques ont sévèrement condamné ces actes ignobles.
Plus royaliste que le roi, une frange significative de l’ADEMA avait cru bon d’organiser un meeting de soutien au président de la République, Amadou Toumani Touré.
Le refus de certains ténors du parti, en l’occurrence le premier vice-président Soumeylou Boubèye Maïga, le deuxième vice-président, Iba N’Diaye, le troisième vice-président, Mandé Sidibé, le quatrième vice-président, Mouhamedoun Dicko a provoqué l’ire du Général-président ATT.
Aussi, sur son instruction, le Mouvement Citoyen présidé par le ministre Djibril Tangara et l’ACC dirigée par Kalilou Samaké (composée de petits partis qui n’ont pas aligné de candidats à la présidentielle et qui ont jeté leur dévolu sur ATT) se sont-ils associés à l’ADEMA pour relever le défi de la mobilisation.
Ironie du sort : le président de l’ADEMA, dans son soutien aveugle au chef de l’Etat est allé jusqu’à insinuer l’hypothèse d’un coup d’Etat avorté le 27 mars dernier : « Pourquoi n’a-t-on pas vu les forces de l’ordre ? Elles ont brillé par leur absence pendant des heures et des heures. Cela veut dire que quelque part, quelque chose se préparait ».
Cette insinuation a été comprise cinq sur cinq. Seulement voilà : le président Dioncounda Traoré s’est lourdement planté. En effet, lors du procès des casseurs, le lundi 11 avril dans les communes II, V et VI, aucune piste politique ou militaire n’est ressortie des procès-verbaux de police et de gendarmerie. Mieux, au cours des débats très sereins, aucun accusé n’a fait allusion, de façon claire ou dubitative à une telle piste.
Autrement dit, il n’y avait aucune main invisible derrière les casseurs du 27 mars 2005. Ce qui revient à écarter la ridicule hypothèse d’une tentative de coup d’Etat. Idem pour la thèse politique que des proches d’ATT se forcent de plus en plus à accréditer.
Dioncounda n’a toujours pas compris ce qui s’est passé ce dimanche noir à l’instar du Premier ministre, Ousmane Issoufi Maïga. Celui-ci avait déclaré le jeudi 7 avril, lors de sa rencontre avec les forces vives de la nation « qu’à ce jour, la question est de savoir ce qui s’est réellement passé pour qu’on en arrive à cette extrémité de violence et d’intolérance ».
Il est vrai que rien ne peut justifier de tels actes. Mais, ce qui est arrivé est passionnel.
Cette passion soutenue par la faim, le chômage, la pauvreté de plus en plus grandissante, l’absence de perspectives pour la jeunesse peut bien conduire à des situations indésirables. C’est ce que le Premier ministre, Ousmane Issoufi Maïga et Dioncounda Traoré doivent intégrer davantage dans leur analyse pour mieux appréhender les préoccupations des populations.
Chahana TAKIOU
13 avril 2005