La privatisation de la SOTELMA avant fin 2007, annoncée par son PDG Lassana N’Diaye, lors de la 30ème session ordinaire du Conseil d’administration de la société le 21 août dernier, en plus d’alimenter les débats, suscite des inquiétudes tant chez les travailleurs que chez les consommateurs. Ces derniers s’interrogent: leurs intérêts et ceux de l’Etat seront-ils préservés?
Selon certains consommateurs, cette inquiétude renferme plusieurs raisons, en tenant compte du cas EDM -sa. Faut-il le noter, les autorités profitent généralement des difficultés des entreprises nationales à satisfaire convenablement les consommateurs pour proposer ou imposer la privatisation, car c’est, selon d’autres abonnés, la seule solution pour prendre en compte non seulement les préoccupations des consommateurs, mais aussi celles de l’Etat.
Ainsi, les états financiers de l’exercice clos du 31 décembre 2006 de la SOTELMA font ressortir un déficit d’exploitation de 5 milliards195 millions de francs CFA. Aussi, l’évaluation de l’exécution du budget, au 30 juin 2007, fait apparaître des données insatisfaisantes.
Selon le PDG, en produits, la réalisation a été de 34 milliards 269 millions FCFA, soit un taux d’exécution de 45% seulement.
En charges, la réalisation a été de 18 milliards 823 millions FCFA -sans les charges d’amortissement et les prévisions- sur une prévision de 43 milliards 519 millions de FCFA, soit un taux d’exécution de 43%. De l’avis des responsables de la SOTELMA, cette situation explique la privatisation de la société, avant la fin de l’année 2007.
Ce qui inquiète travailleurs et consommateurs
C’est surtout l’expérience récente d’EDM-SA qui fait perdre l’espoir chez beaucoup de citoyens, dont les abonnés. Et cela, malgré le communiqué final du conseil d’administration qui indique que : “la Direction générale est engagée dans l’exécution des tâches qui lui incombent, dans la transparence, en toute responsabilité et dans la sérénité, l’objectif visé étant de préserver les intérêts de l’Etat et ceux des travailleurs…” Pourquoi donc les consommateurs, qui sont les premiers concernés, ne sont-ils pas mentionnés dans ce communiqué?
Aussi, faut-il rappeler que l’Energie du Mali, (EDM-sa), évaluée à 20 milliards de FCFA, a été bradée en 2000, à 13 milliards de FCFA, au consortium SAUR International et au groupe IPS du prince Aga Khan, au motif de la continuité du service de production et de distribution de l’électricité et de l’eau, la création d’un environnement stable propice à la recherche et à la réduction des coûts, la promotion et l’expansion rapide de la couverture des besoins du pays.
Pourquoi la privatisation
Malgré la mission de service public d’EDM-sa -avec deux barrages, Sélingué et Manantali, financés par les impôts et taxes du contribuable malien- et la demande incessante des pouvoirs publics, notamment du Président de la République Amadou Toumani Touré, le repreneur refuse d’ajuster les prix de l’eau et de l’électricité à l’avoir de la population malienne, dont plus de 65% vivent en deçà du seuil de la pauvreté. Autrement dit, la situation a créé plus de problèmes aux consommateurs qu’avant la privatisation.
Selon plusieurs sources, Alkaly Kéïta aurait été empoisonné pour avoir démontré que Saur International, la société concessionnaire de l’Energie du Mali, pouvait baisser les tarifs de l’eau et de l’électricité sans nuire à ses bénéfices somme toute considérables, et sans que l’Etat soit obligé de la subventionner. Ainsi, les autorités maliennes auraient mis cinq ans avant de se rendre compte que les hausses des prix de l’eau et de l’électricité ”tuaient l’économie” et que la privatisation était un échec. D’où la renationalisation de EDM-sa en 2005 avec, à sa tête, Alpha Sékou Djitèye.
Les consommateurs s’en mêlent
“EDM-sa n’est pas la seule entreprise au Mali dont la privatisation a été un échec. Il existe bien d’autres cas comme ceux de la COMATEX, du chemin de fer, de l’HUICOMA,… Mais si vous voyez que nous prenons le cas de cette entreprise dans la question de la privatisation de la SOTELMA, c’est parce que nous pensons que cette structure fournit presque les mêmes services que EDM-sa, et leurs méthodes de fonctionnement, les mêmes : abonnement des clients, payement des factures, installation des lignes…”, a indiqué un militant de l’Association des Consommateurs du Mali (ASCOMA), avant d’ajouter: “…En tant que société civile, nous userons de tous les moyens légaux pour dissuader les autorités dans leurs intentions de privatiser la SOTELMA”.
Et un autre, de déclarer : “Je parie que cette question de la privatisation de la SOTELMA est un autre hold-up de la Banque Mondiale qui continue, lentement mais sûrement, d’étrangler nos entreprises nationales, et de livrer les consommateurs et les travailleurs à la boucherie.”
Les travailleurs de la SOTELMA, quant à eux, s’interrogent sur le sort qui leur sera réservé, une fois la société privatisée. Seront-ils licenciés?…
Moussa TOURE
07 septembre 2007.