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Conduite par Abdoulaye Traoré, chef service Production agricole de la CMDT, cette mission composée de cadres, de producteurs et de responsables syndicaux doit recueillir du 17 au 28 avril toutes les informations utiles auprès de ces filières.

L’objectif est de s’inspirer des exemples réussis et d’éviter les erreurs qui ont plombé la filière coton dans certains pays. Premier producteur de coton en Afrique subsaharienne depuis deux campagnes, le Burkina Faso avait entamé sa mue depuis 1999 avec l’entrée des producteurs dans le capital de la Sofitex (Société des fibres textiles).

L’Etat qui détenait 65% des actions avait cédé 30% aux producteurs pendant que Dagris, le numéro un français du coton, avait 34% et les banques 1%. Cependant, c’est la libéralisation de la filière commencée en 2002 et parachevée en septembre 2004 qui a vraiment relancé la production cotonnière au “Pays des hommes intègres”.

Désormais deux petites sociétés cotonnières font leur apparition à côté de la Sofitex qui conserve ses anciens bastions : la Somaco à l’est (dont le capital est détenu à 51% par Dagris, 20% par les producteurs et le reste par les privés) et Faso coton au centre (31% Reinhart, 21% Ivoire Coton, 20% privés et 10% producteurs).

Tout comme le Mali, le coton est vital pour l’économie burkinabé. Il est cultivé dans 35 des 45 provinces du pays, assure 51% des recettes d’exportations totales et fait vivre plus de 3 millions de personnes.

Reçue par l’Union Nationale des Producteurs de coton du Burkina Faso (UNPCB) à son siège à Bobo Dioulasso le mardi 18 avril, la délégation malienne a passé au peigne fin l’expérience du pays hôte : structuration des producteurs, détermination des besoins en intrants agricoles, passation des marchés, paiement des fournisseurs, fixation du prix du coton graine, etc.

Selon le coordonnateur de l’UNPCB, Boureima Sanon, le succès de la libéralisation de la filière coton au Burkina tient à un certain nombre de préalables inscrits dans le cahier des charges.

Les acteurs se sont fixés comme règles de conduite d’écarter les sociétés cotonnières non solvables ; d’exiger une attestation de “non-redevabilité” à la Sofitex ; de réclamer l’introduction des producteurs dans le capital et le développement intégré de la filière avec la réfection des pistes rurales, l’alphabétisation, le conseil agricole.

Aussi, malgré l’existence de trois sociétés cotonnières, les producteurs ont tenu à conserver leur unité d’action à travers une seule union syndicale.

Comment faire la libéralisation sans démanteler la filière ? C’était notre souci. Abandonner le modèle intégré signifiait la chute de la production comme au Ghana et au Bénin ou même la mort de la filière. C’est pourquoi nous avons mis dans le cahier des charges que les nouvelles sociétés devraient s’occuper de l’ensemble des opérations de la production à la commercialisation”, reconnaît Georges Yameogo, directeur de la production agricole à la Sofitex.

Au lieu de céder les usines aux repreneurs comme l’entendaient certains bailleurs de fonds, les Burkinabé ont exigé une vente par zone. D’après M. Yameogo, les zones ont été vendues avec le personnel sans possibilité de licenciement par les nouvelles sociétés.

Mais qu’est ce qui explique le boom de la production cotonnière au “pays des hommes intègres” en l’espace de quelques années ? Pour François Tani, premier vice président de l’UNPCB, la réponse est toute simple.

Presque tous les paysans se sont convertis au coton à cause des gains substantiels qu’il procure. Mais aussi les réfugiés burkinabés venus de la Côte d’Ivoire s’y sont mis. Certains ont même doublé leur surface cultivable pour rattraper les pertes dues à la chute des cours sur le marché international”, a t-il déclaré.

C’est ce qui explique le fait que les exploitations agricoles sont passées de 250 000 à plus de 300 000. L’année dernière, le Burkina Faso a produit 630 000 tonnes de coton graine mais pour la campagne qui s’achève il est attendu 730 000 tonnes.

Malgré cette poussée de la production la filière coton connaît des difficultés majeures. Elle a enregistré un déficit de 35 milliards de francs CFA l’année dernière dû à plusieurs facteurs dont la chute des cours sur le marché.

Et depuis trois ans le prix au producteur est entrain de chuter. De 210 F CFA le kg de coton graine en 2005, il est passé à 175 F CFA en 2006 et pour 2007 l’Association Interprofessionnelle du Coton (AIC) a fixé 165 F CFA.

Fousséni Traoré Envoyé spécial à Bobo Dioulasso

21 avril 2006.