L’espoir renaît dans le cœur des Ivoiriens. Pour cause, tous les indicateurs sont au vert pour l’aboutissement du processus électoral, avec la programmation du premier tour des élections présidentielles au 31 Octobre 2010. Avec plus de 58 milliards débloqués par le gouvernement et ses partenaires pour achever le désarmement, principal obstacle que posait le Camp Présidentiel et la validation de la liste électorale définitive par un décret Présidentiel, le pays n’est plus loin du bout du tunnel. Cependant, il reste le problème épineux et très complexe des milices pro Gbagbo, qui, selon certains observateurs, gardent encore leur capacité de jouer les troubles fête, en cas d’échec ou de mauvaise posture du Candidat du FPI, au sortir du premier tour. Alors, après donc les six reports de la date de la présidentielle en Côte d’Ivoire, celle du 31 Octobre serait-elle la bonne.
Après la signature du décret validant la liste électorale définitive, avec ses 5 725 000 électeurs Ivoiriens, le Président de la République Laurent Gbagbo a souhaité, au terme de la cérémonie, une bonne campagne à tous les acteurs politiques ivoiriens. Cette liste électorale définitive arrive au moment où la communauté internationale commençait à douter de la volonté réelle des leaders politiques à organiser un vrai scrutin digne de ce nom, après d’interminables volte-faces. Ce fut récemment le cas de l’Ambassadeur du Japon en Côte d’Ivoire. D’ordinaire très discret, il s’est lâché au cours d’une cérémonie de signature d’un protocole d’allègement de la dette du pays, face au Ministre de l’économie et des Finances (une dette estimé rééchelonnée de près de 60 milliards de FCFA contractées par la Côte d’Ivoire).
Son Excellence Monsieur Yoshifumi Okamura, irrité par le manque de visibilité politique en Côte d’Ivoire, a tout simplement réclamé la tenue de la présidentielle en terme très peu diplomatique à la surprise des invités. « Aujourd’hui, le Japon a signé cet accord et tenu ainsi une promesse du Club de Paris, c’est au tour des Ivoiriens de tenir la leur en organisant des élections », a-t-il déclaré. Il a fait savoir qu’il est très déçu de l’attitude des hommes politiques ivoiriens qui manquent à leur engagement et qui nuisent à la crédibilité de la Côte d’Ivoire depuis bientôt cinq ans.« Je suis déçu. La crédibilité de la Côte d’Ivoire est en danger. Le savez-vous ? », a-t-il interrogé. Puis d’ajouter : « Tous ces temps perdus coûteront chers, et constituent une menace sérieuse».
Selon le climat de détente qui règne sur le front politique, tout laisse croire que cette date du 31 octobre sera tenable. Les difficultés majeures ont été aplanies, entre autres : le désarmement des forces ex-rebelles et la validation de la liste électorale définitive. En effet, dans les zones Forces Nouvelles, l’encasernement des ex-combattants est une réalité, car plus de 5.000 hommes ont été regroupés dans plusieurs sites appelés Centre de Commandement Intégré (CCI), notamment à Korhogo, Man, Bouaké, etc. Ces Centres de Commandement qui regroupent les éléments des deux armées (FANCI – FAFN) seront commis à la sécurisation des élections, dans un premier temps et formeront, plus tard la nouvelle armée de la Côte d’Ivoire. Le principal obstacle qui consistait à payer une prime aux démobilisés a été levé grâce au déblocage de près de 18 milliards de francs CFA par l’Etat ivoirien. La liste électorale définitive vient d’être validée par le Chef de l’Etat par décret. Toute chose qui augure la bonne tenue d’une élection présidentielle apaisée dans le pays.
L’inconnue de taille dans l’affaire demeure la situation des milices pro Gbagbo qu’on pouvait estimer à l’époque à plus de 10.000 hommes. Ces milices basées au sud et à l’Ouest du pays étaient devenues des remparts contre les ex-Forces rebelles qui menaçaient le Pouvoir Gbagbo. Elles ont été, aux forts moments de la crise, le bras armé de la Galaxie Patriotique dirigée par celui que la presse a nommée le Général de la Rue , Charles Blé Goudé. Ces milices avaient pour noms le GPP, l’UMAS, le CNLB, etc. Que reste t-il de ces redoutables milices qui se sont opposées jusqu’au bout à un renversement par la force du pouvoir Gbagbo ? Y aura-t-il un risque de dérapage venant de ces forces parallèles qui n’ont véritablement pas été démobilisées et qui restent actives sur le terrain?
Constituant une menace potentielle pour les élections en Côte d’Ivoire, parce que n’ayant pas été démobilisées et désarmées, les milices du Sud restent la principale inconnue de l’équation à multiples variantes de la politique ivoirienne. Malgré les semblants de démobilisation à l’Ouest (Duekoué, Guiglo) et au Camp d’Akouédo à Abidjan, il y a plus d’un an, les milices restent actives sur le terrain. L’exemple type est le cas du GPP. Elle regroupe un important effectif et était auteur de plusieurs bavures sur de paisibles populations d’Adjamé où elle avait élu domicile, avant d’être délogé de force par les éléments de l’armée régulière pour une destination qui reste secrète. Une épine dans le pied du Camp Présidentiel, le démantèlement de ces milices est devenu un casse tête chinois pour le pouvoir FPI, surtout avec l’encasernement total des éléments des Forces Nouvelles. A l’approche du premier tour de la présidentielle, l’opposition craint un autre coup fourré du FPI qui, selon elle, a peur de connaître une défaite cuisante au terme du scrutin du 31 Octobre prochain. C’est pourquoi, affirme Monsieur Koné S. (membre d’une coordination du PDCI-RDA dans la région des lagunes), « Gbagbo tombe dans la dissuasion. Il veut persécuter les militants de l’opposition pendant ces élections, pour faire valoir sa minorité présidentielle. C’est pourquoi il a promis de mater avec la plus grande sévérité des fauteurs de troubles qui selon lui projetteraient d’empêcher l’Organisation du scrutin du 31 Octobre. Il veut semer la zizanie dès qu’il va se sentir en difficulté et ensuite faire sortir l’armée et ses milices pour étouffer toute protestation », a-t-il dit.
Lors d`un meeting de clôture à Agboville, chef lieu de la région d`Agnéby, où il effectuait récemment une visite d`Etat le président Gbagbo a déclaré : «Il y a certains des individus qui rasent les murs et qui veulent nous empêcher d’aller à la paix. J’ai demandé aux FDS (armée, gendarmerie et police) de mater tous ceux qui veulent créer des troubles (…) de mater avec la plus grande sévérité tous ceux qui veulent empêcher les élections d’avoir lieu ». Evoquant des “petits coups” avant le scrutin, M. Gbagbo a annoncé que « nous allons les débusquer, les juger et les condamner », sans plus de précisions.
De Gildas Correspondant du Républicain à Abidjan
17 Septembre 2010.