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La Fédération de l’éducation nationale (Fen) déplore amèrement le « précipice » dans lequel se trouve notre école. Face à la « gestion catastrophique » et à la « mauvaise foi » des autorités compétentes, elle n’entend pas baisser les bras. Pour protester contre son mépris et le manque résultats à ses revendications, la Fen a mis en branle le boycott jusqu’à nouvel ordre, des deux ministres en charge de l’éducation.

La Fen était hier face à la presse au siège de la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM). Le secrétaire général, Youssouf Ganaba, assisté d’autres membres du bureau de la Fen, ont dressé un tableau très sombre de notre école. « Notre pays vit une situation de non école »,, ce qui ne « laisse personne indifférent ». a introduit M. Ganaba.

Pour lui, la preuve est palpable avec une école affectée dans « tous ses compartiments ». Certaines facultés de l’Université n’ont pas encore repris pour le compte de l’année académique 2007-2008. Au niveau du secondaire, il n’y a pas eu d’évaluation depuis le début de l’année scolaire. Une situation contre laquelle personne n’a daigné lever le petit doigt.

Les élèves partent et repartent à l’école sans être sûrs qu’ils assimilent bien ce qu’ils sont en train d’apprendre. Pis, a continué M. Ganaba, l’enseignement fondamental est dans un état des plus désastreuses, où « les enseignants et les élèves sont maintenus dans un tourbillon indescriptible ».
La cause est claire : les innovations pédagogiques sans préparation préalable. « Personne ne maîtrise ces innovations, même les directeurs de Centre d’animation pédagogique (Cap) et les directeurs d’écoles. Les enseignants, n’en parlons pas, car ils ont toutes les peines du monde pour préparer une simple leçon », a-t-il martelé. Quant à la décentralisation imposée à l’école, elle a abouti à une précarité patente.

On se souvient que la Fen avait marché le 26 février dernier sur le ministère des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique pour la non-prise en compte de ses revendications. En dehors de ces doléances, c’est la « mauvaise foi » des autorités et le « mépris » des accords précédemment conclus qui sont en cause, d’où la conviction de la Fen que l’école n’est une priorité au Mali, contrairement à ce qu’on veut faire croire. Dans le registre des revendications figurent la relecture de l’enseignement catholique, la prime des risques pour les catégories exposées et la prime de logement. Cette « prime est évaluée à 1500 F CFA pour tous les fonctionnaires. Qu’est ce que cela vaut par rapport à la cherté croissante de la vie ? », s’est demandé M. Ganaba.

Mépris

L’intégration des enseignants contractuels à la fonction publique est une autre doléance de la Fen. « Nous avions convenu que cela serait effectif au plus tard en janvier 2008, mais l’Etat a brutalement remis ça à 2009. Ce qui est grave, c’est qu’au lieu de la fonction public de l’Etat, on nous propose maintenant la fonction publique des collectivités territoriales », a fustigé le secrétaire général de la Fen.

La majoration des frais relatifs au traitement des examens est également l’une des causes de la frustration de la Fen. « L’Etat a fui en avant alors qu’il y a un accord entre nous qui stipule que ces frais doivent être revus à la hausse chaque année », a souligné M. Ganaba.

La Fen dit ne pas comprendre surtout la cacophonie existant à travers l’argument, selon lequel, l’Etat n’a pas les moyens de prendre en charge les revendications légitimes des enseignants. « On nous dit que l’Etat n’a pas les moyens alors qu’à la veille de l’élection présidentielle, les préfets et autres ont bénéficié d’équipements et d’avantages dont ils jouissent encore. Comment comprendre cela ? Donc, l’école n’est pas une priorité au Mali », a critiqué, M. Ganaba.

Un de ses collaborateurs a ajouté qu’au même moment, certains enseignants de la région de Koulikoro étaient restés, contre vents et marrées, deux mois durant sans salaire.

Toutes choses qui ont poussé la Fen à conclure que c’est la volonté qui fait défaut et non le manque de moyen. D’ailleurs, les ministres chargés de l’éducation sont sur la sellette. Il leur est reproché leur « négligence et mépris » vis-à-vis des enseignants. « Lors de notre marche, le ministre Amadou Touré n’a pas voulu nous accueillir devant son département. Nous avons seulement été accueillis par son chef de cabinet. Son collègue de l’Education de Base, de l’Alphabétisation et des Langues nationales n’a même pas daigné se faire représenter », regrette la Fen.

Toutes choses que la Fen qualifie « d’insulte et d’attitude peu courtoise ». Aux dires de M. Ganaba, depuis sa prise de fonction, Mme Sidibé Aminata Diallo, n’a jamais rencontré son syndicat, qui est pourtant très représenté au niveau de l’enseignement fondamental.

Pour protester contre le non accueil des marcheurs par les ministres en personnes, « le Bureau national de la Fen demande à toutes ses structures régionales, locales et communales et aux syndicats fédérés de boycotter les ministres en charge de l’éducation et ce jusqu’à nouvel ordre. Le boycott consistera à ne pas participer aux cérémonies présidées par les ministres en question et à ne pas participer à l’accueil de ces ministres au cours de leurs missions », précise le communiqué de la Fen.

Toutefois, M. Ganaba a laissé entendre que « si l’attitude du gouvernement persiste, la Fen sortira définitivement de sa réserve et se fera beaucoup plus entendre ».

Ogopémo Ouologuem

07 Mars 2008.