Le nom de Fana à été associé le 25 décembre dernier à l’une des catastrophes de la circulation routière les plus meurtrières dans les annales des transports inter-urbains au Mali. C’était un samedi matin et il était un peu plus de 10 heures lorsqu’un camion-citerne et un minibus se sont heurtés de face alors qu’ils roulaient à une allure assez vive. Résultat : 34 tués sur le coup.
Des rescapés furent transportés ici à Bamako à l’Hôpital Gabriel Touré et l’opinion n’a plus été édifiée sur leur sort. En fait, ils ont tous succombés à leurs blessures et le seul survivant de cette tragédie aura été l’apprenti-chauffeur du minibus de 35 places.
La ville de Fana commence à peine à oublier cette tragédie. C’est donc dans ce contexte de semi guérison émotive qu’un camion-remorque vient réveiller les démons endormis. C’est encore un week-end, un dimanche, un matin et à la même heure que le précédent accident que le choc qui a plongé les Fanois dans un début de panique générale, a eu lieu ce 27 février 2005. « Chat échaudé craint le froid », dit le proverbe toubab.
Le camion-remorque immatriculé D 3548 M4 était stationné sur le bas côté de cette route nationale importante qui relie Bamako à Segou, San, Mopti, Bandiagara, etc. Les gros porteurs passant quotidiennement à Fana et les habitants y sont habitués.
La CMDT y est pour quelque chose car sur le plan de la production cotonnière, la capitale de la Commune du Guègnèka est un pôle qui compte. La production cotonnière de toute la région est ramassée, égrenée et emballée dans l’usine CMDT de Fana. Les remorques font donc un incessant ballet dont la ville de Fana est le centre.
Le camion-remorque démolisseur de poteaux électriques était justement garé en face des usines CMDT tourné vers Bamako. Il était entièrement vide au moment de l’impact avec le poteau, un détail très important dans cette affaire. Au moment de démarrer, le chauffeur devait voir forcément le poteau dans le rétroviseur. Cela ne l’a pas empêché de le heurter violemment. Le poteau s’est brisé en deux sous le choc.
Le salut par la fuite
Le bruit infernal du choc conjugué avec les cris des gens aux alentours a produit sur le chauffeur, semble-il, une grande peur. En un temps deux mouvements il coupa le moteur et sauta à terre sans donner la moindre chance à la portière de le bloquer. Les fils électriques tombèrent sur la carrosserie du camion où ils s’accrochèrent.
Les étincelles produites n’ont cependant rien rencontré qui puisse produire l’incendie qui n’aurait eu aucune peine à gagner l’usine CMDT, ses montagnes de coton non traité, les balles de coton et les graines en attentes d’évacuation sur Koulikoro et Koutiala.
La scène n’échappa point au groupe de gardiens, de travailleurs et de visiteurs du personnel réuni autour d’une théière fumante devant le siège de l’Energie du Mali qui jouxte la CMDT. L’alerte fut donnée immédiatement et le courant électrique fut aussitôt coupé dans toute la ville de Fana. Il était 10 h 25 minutes.
D.K, tailleur-brodeur était en forme ce matin. Penché sur sa machine, il travaillait consciencieusement sur le boubou d’une « drianké » locale quand le courant fut coupé brusquement. Des milliers d’autres à travers la ville ne furent touchés par l’onde de choc de la peur que plus tard. Fana a échappé à la catastrophe, c’est sûr, mais pas à la peur.
Bamadou – 2 Mars 2005