Les Echos : Est-ce que vous étiez partant pour un renouvellement de contrat ?
Pierre Lechantre : Après son élection, il y a quelques mois, Salif Kéita m’avait proposé de cumuler les postes de directeur technique et de sélectionneur national. C’était une proposition qui m’avait fait plaisir. Je m’étais mis au travail, pensant que j’allais être suivi dans mes options. Il m’avait apparemment laissé toute la latitude d’être le patron du football malien.
Les Echos : Donc, ce projet est tombé à l’eau ?
P. L. : Oui, malheureusement. Mais mon projet comportait une orientation sur les jeunes à partir du moment où je voulais mettre en place un Centre technique national à Bamako. De plus, j’avais envisagé la création d’une équipe B qui aurait poussé certains joueurs de l’équipe A à se surpasser parce que j’ai l’impression que c’est ce qui manque aux Aigles. Certains joueurs ne viennent pas dans l’équipe nationale avec la motivation souhaitée.
Les Echos : Quels sont les motifs avancés dans le non-renouvellement du contrat ?
P. L. : J’entends Salif Kéita dire, au nom de la Fédération malienne de football, que je n’ai pas voulu l’écouter ; que je ne suis pas facile…
Les Echos : Etes-vous vraiment difficile ?
P. L. : C’est vrai que je ne suis pas un entraîneur facile. Mais je pense que si on veut prendre un entraîneur digne de ce nom, il faut qu’on accepte qu’il soit le responsable de sa sélection et qu’il n’ait pas de compte à rendre au niveau de sa liste.
Les Echos : Pensez-vous avoir fait les frais de la non-qualification du Mali à la Can ?
P. L. : Je ne le pense pas parce que le challenge était difficile au moment où je prenais l’équipe qui n’avait que 2 points sur 15 possibles. Mais le fait d’avoir incorporé les locaux a peut-être joué en ma défaveur. A priori, ça n’a pas eu l’assentiment de la nouvelle direction et singulièrement de Salif Kéita qui voulait à tout prix que l’équipe soit composée exclusivement de joueurs qui évoluent en Europe.
Les Echos : Comment voyez-vous l’avenir du football malien ?
P. L. : Je pense que d’autres entraîneurs vont passer après moi, mais c’est une énorme perte de temps parce qu’il faut dès à présent se mettre au travail. Il y avait du bon travail à faire que j’avais commencé. Malheureusement, j’ai l’impression que pour l’avenir du football malien, le pays va encore repartir sur les mêmes bases. C’est peut-être inquiétant pour le travail qui reste à faire.
Les Echos : Que pensez-vous des footballeurs maliens ?
P. L. : J’ai eu la chance de fréquenter des joueurs de très haut niveau, de voir de bons espoirs locaux, des joueurs locaux aussi motivés, plus motivés que certains professionnels. J’ai croisé aussi des joueurs d’exception comme Mahamadou Diarra « Djilla » qui m’a démontré qu’il est un homme agréable à côtoyer en plus d’être l’un des meilleurs à son poste en Europe.
Les Echos : Peut-on connaître votre prochaine destination ?
P. L. : Je serai de nouveau sur le marché à partir du 1er novembre. Je garde encore une image correcte de l’Afrique. J’ai eu la possibilité de travailler pendant 2 ans et demi dans le Golfe persique. Ce que je regrette surtout, c’est que mon passage au Mali se termine en queue de poisson alors que dans mon esprit il y avait un travail sur 2, voire 3 ans à faire en accord avec Malamine Koné, qui était partie prenante dans cet investissement. Mais, le bureau fédéral et Salif n’ont pas jugé de la même façon et je reste très déçu par cette décision.
Propos recueillis par
Boubacar Diakité Sarr
26 octobre 2005.