L’affaire Camatte, comme il convient désormais de l’appeler, n’a pas fini de dévoiler tous ses secrets.
Au lendemain de son retour chez lui après être libéré par ses ravisseurs islamistes d’AQMI au Nord-Mali contre quatre membres qui étaient détenus dans les geôles de Bamako, on apprend que l’homme qui s’était donné des allures d’humanitaire, n’en n’était pas vraiment un.
Le site Internet Bakchich affirme en se référant aux déclarations le 27 janvier dernier du coordonnateur national du renseignement à la présidence de la République française. Bernard Bajolet, le M. Espionnage de l’Elysée, himself, l’aurait déclaré devant l’Assemblée nationale française.
» Ce jour-là, rapporte Bakchich, en fin d’audition, Bajolet est en effet interrogé très timidement par le député socialiste Guillaume Garot sur les informations qu’il pouvait transmettre sur les agents des services retenus en otage ». Et M. Espionnage, tout à sa tâche d’information des parlementaires d’annoncer que huit français étaient alors prisonniers à l’étranger : « Quatre au Soudan, un en Somalie, deux en Afghanistan », énumère-t-il et de préciser « un au Mali, Pierre Camatte ».
C’était le 27 janvier dernier lors d’une très officielle audition à la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale. Et à Bakchich de se moquer « un agent secret carbonisé par son propre patron ? Depuis l’affaire de la divulgation publique des carnets du général Rondot dans l’affaire Clearstream, on n’avait pas connu plus grosse bourde dans les services depuis des années ».
L’Elysée a beau démentir en affirmant que « c’est une fausse information, Pierre Camatte n’est pas agent de la DGSE », le sexagénaire français originaire des Vosges, intrigue surtout avec, le changement de nom adopté à Tidarmené dans le Nord-Mali.
Pierre Karmat, écrivait même, avec surprise la presse officielle malienne. Une nuance qui intrigue aujourd’hui et surtout que « Camatte » paraît donc doté, comme l’on dit dans les services, d’une « légende » très crédible, justifiant ses allers-retours incessants entre la France et le Mali, souligne-t-on.
L’homme pourrait donc du fait de son profil, retraité paisible, président d’une association luttant contre le paludisme dûment enregistré à la mairie de son domicile, président du comité de jumelage Gérardmer-Tidarmené, « travailler sous couverture, pour mieux surveiller les mouvements dans ce qui est devenu l’une des bases arrières des terroristes algériens de l’ex-GIA enrôlés aujourd’hui sous la bannière de Ben Laden ».
Mais apparemment, Bernard Bajolet, ancien ambassadeur en Algérie et en Irak notamment, chargé depuis juillet 2008 d’harmoniser la collaboration entre la DGSE (espionnage) et la DCRI (contre-espionnage), aurait confondu « dans une réponse confuse, le cas de Pierre Camatte, qui d’après les informations de Bakchich, était au Mali, un correspondant des services et celui d’autres otages, qui n’ont rien à voir avec les missions de renseignement de l’État français », précisait Bakchich plus tard.
Oussouf Diagola
(correspondant permanent à Paris)
01 Mars 2010.