Le centre international de conférence de Bamako de même que la plupart des hôtels de la place deviennent désormais des lieux de rencontre pour des jeunes photographes qui y passent régulièrement pour guetter des séminaires et autres rencontres importantes.
Plus besoin désormais de les inviter aux cérémonies de mariage, de baptême ou des séminaires. La pratique est désormais connue. Dans ce milieu, les informations sont passées de bouche à oreille ou encore par simple coup de fil.
Au bout du compte, les organisateurs se retrouvent avec un parterre de photographes sur les bras. Mais le plus difficile dans cette situation c’est que, sans y être autorisés, ces « paparazzi » prennent les photos de certaines personnes pour ensuite les exposer 10 à 20 minutes plus tard devant la salle de la cérémonie.
Tout se passait bien jusqu’à une date relativement récente où ils commencent à être une source de frustration de certains personnes qui dénoncent désormais la façon de faire de ces jeunes photographes amateurs.
Leur nombre qui est parti crescendo au fil des années est en train de porter en même temps un coup dur aux détenteurs de studios qui ne reçoivent pratiquement plus la visite de clients.
Photographe depuis 1967, Amadou Fané, promoteur de Zoom Photo estime qu’avec ces jeunes, le métier de photographie ne paie plus.
« Pour être photographe, il faut d’abord aimer le travail pas pour l’argent mais pour l’art« , a-t-il déclaré en indiquant que la photographie est avant tout un art que seuls ont ceux qui passent par les studios. P
our ce vieux, considéré comme le doyen du métier, les autorités doivent prendre des mesures contre ces jeunes en les obligeant à se faire recenser afin qu’ils payent aussi des impôts et taxes au même titre que ceux qui sont installés en studio.
Pour lui, non seulement plusieurs règles du métier échappent à ces jeunes. Pis, ils font courir certains risques aux clients du fait qu’ils n’ont pas d’attache précise. Une violation du droit à l’image.
Au Mali, la constitution fait du droit à l’image un droit protégé. Cela ressort d’ailleurs, des principes généraux du droit civil, selon Me Diallo avocat à la Cour lequel estime que plusieurs photographes s’exposent à des poursuites judiciaires.
Car, ils font fréquemment des prises de photos en parfaite méconnaissance de cette obligation de ne prendre l’image d’une personne sans son consentement.
« En 30 ans de photo, j’ai toujours pris soin de demander l’autorisation avant de photographier une personne ou même un édifice dont la prise de vue est interdite… », a soutenu le vieux Fané occupé à développer des clichés à l’intérieur d’une chambre plongée dans le voir.
« Ce travail je le fait, il y a plusieurs années. Malheureusement avec l’émergence de cette nouvelle génération de photographes, on parvient à peine à tirer notre épingle du jeu« , a-t-il laissé entendre.
Journaliste Camerounais installé en France, M. Abena Nicolas est très critique sur la méthode de travail de ces jeunes.
« On ne doit pas faire des photos juste pour prendre de l’argent. Une photo doit pouvoir illustrer un article. Ce qui n’est pas le cas d’un nombre important de photos faites par ces jeunes… », déclare-t-il.
Très subtil, ce métier de photographe appelle pourtant à une plus grande sensibilisation de ceux qui en font leur profession habituelle. Cette sensibilisation est d’autant plus une nécessité que de plus en plus on assiste à des scènes de dispute entre ces photographes et des clients qui ne comprennent pas qu’on leur demande de payer des photos qu’ils n’ont pas commandées.
« Monsieur, je regrette je ne peux prendre cette photo, car n’ayant pas prévu de l’argent pour ça… ». Ces déclarations sont d’un étranger qui participait, il y a quelques semaines, à une rencontre internationale tenue au centre international de conférence.
Des couacs du genre sont monnaie courante entre ces jeunes photographes et leurs clients. Des clients qui dénoncent de plus en plus l’approche utilisée pour leur soutirer de l’argent.
Ces jeunes sauront-ils comprendre la menace qui guette leur gagne-pain par manque d’éthique et de professionnalisme ?
Dans tous les cas, dans les séminaires, ils sont nombreux ceux qui n’hésitent plus à faire un geste de désapprobation quand on s’apprête à prendre leur image.
Oumar Diamoye
05 janvier 2006.