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Le ministère de la Jeunesse et des Sports, à travers la Commission nationale ad hoc créée par décision n°028/MJS-SG en date du 10 décembre 2009, vient de boucler le « rapport général sur la préparation et la participation du Mali à la Can de football, Angola 2010 ».

Le document met en exergue le fait que, au Mali et à cause des conditions difficiles de qualification des Aigles, une vague atmosphère de doute et de scepticisme planait sur les capacités de notre sélection nationale à faire face au défi d’une surprise agréable à cette Can. Sans compter que, ailleurs, les faveurs qu’on lui a accordées (à cause de ses stars internationales) en faisaient un adversaire redoutable et capable de tous les exploits.

Malheureusement, les résultats et le déroulement des trois matches ont donné quelque peu raison à chacun de ces deux niveaux d’appréciation sur notre sélection. Les Aigles du Mali, comme au Ghana en 2008, n’ont pu se qualifier pour les quarts de finales après un nul, une défaite et une victoire.

Et pourtant, les moyens mis à disposition par l’État malien étaient en parfaite harmonie avec les besoins exprimés par la commission de préparation à la Coupe d’Afrique des nations de football « Angola-2010 ». Le peuple malien pour sa part, de l’intérieur comme de l’extérieur, a manifesté son adhésion par des contributions diverses à cette cause nationale qui est du reste sa passion.

Pour ce qui est du financement de cette campagne (préparation et participation), le budget prévisionnel (3 137 558 000 F CFA) était principalement orienté vers le budget national qui devait être soutenu par des contributions volontaires.

Passée à côté d’une qualification historique à la Coupe du monde « Afrique du Sud 2010 », l’Équipe nationale de football n’a pu se qualifier à la Can « Angola 2010 » qu’en se classant 3e de son groupe. Une situation peu motivante à aller vers une sollicitation des contributions volontaires, sauf par principe. D’ailleurs, ces contributions ont été relativement timides après la cérémonie de lancement de l’opération « Appui aux Aigles du Mali », organisée le 6 janvier 2010. Les promesses de contributions lors de cette cérémonie, qui s’élevaient à près de 200 millions de F CFA, n’ont été tenues qu’à concurrence de 86 849 194 F CFA.

Mais, c’est plutôt le manque de performance de la sélection nationale traduit par son élimination précoce qui explique la faible mobilisation des Maliens pour contribuer au financement de cette campagne. Les fonds ainsi récoltés ont été directement transférés des comptes bancaires au Trésor Public.

De façon générale, les ressources s’élèvent à 1 171 054 777 F CFA et les charges à 1 194 439 842 F CFA, d’où un solde déficitaire de 23 181 842 F CFA. Tout comme en 2008, dans un souci de transparence, de sécurité et de bonne gestion, tous les fonds de dépenses liés à la compétition en Angola ont été domiciliés dans les comptes de l’ambassade du Mali à Luanda (Angola).

Les transferts de fonds ont été effectués auprès de la Banque malienne de solidarité (BMS). Au niveau des charges, il faut souligner que 501 914 000 millions de F CFA ont été consacrés aux primes des joueurs et de l’encadrement technique.

Des enseignements pour l’avenir

La commission, dans son rapport, a tiré plusieurs enseignements de la préparation et de la participation du Mali. Au niveau des points forts, on peut, entre autres, retenir le soutien bienveillant et constant des plus hautes autorités, une manifestation remarquable de la solidarité gouvernementale et des autres institutions de la République, la forte manifestation d’élan patriotique à travers la mobilisation volontaire et spontanée des ressources humaines, matérielles et financières, la mise à disposition de vols spéciaux ainsi que les conditions offertes à la sélection nationale pour sa préparation et surtout le niveau des équipes adverses comme l’Egypte et la Corée du Sud.

Il faut aussi souligner l’augmentation significative, 100 % entre 2002 et 2010, des différentes primes allouées aux joueurs et à leur encadrement. Sans compter le paiement à temps des primes de sélection et des primes de matches, la mise à disposition à temps des fonds afférents à la préparation et la participation du Mali à la Can-2010.

Tout comme la bonne collaboration des ambassades du Mali en Arabie saoudite et en Angola, notamment dans l’accueil de la délégation, la sécurisation et la gestion des fonds, la mobilisation et l’encadrement de la colonie malienne résidant en Afrique Centrale…
Pour ce qui est des perspectives, la commission met en exergue « l’engouement des autorités et du peuple maliens pour le football et surtout leur soif de victoires continentales qui sont des atouts majeurs sur lesquels l’on peut et doit s’appuyer pour bâtir une véritable stratégie de perfectionnement de ce sport roi ».

Les suggestions à court terme porte sur l’appui à la Fédération malienne de football dans sa recherche de sources de financement (contrats avec les sponsors), la mise en place d’un système de coopération permanente avec les responsables, les entraîneurs et les managers des clubs dans lesquels évoluent nos expatriés afin d’élargir l’éventail des choix de joueurs ainsi que l’élaboration d’un véritable code de conduite des joueurs de l’Équipe Nationale.

Elle recommande également la détermination préalable du profil du sélectionneur à chercher, l’élaboration d’un cahier des charges fixant des objectifs de résultats au sélectionneur national et déterminant le cadre de collaboration entre celui-ci et la FMF, le réexamen des primes à payer aux joueurs (sélection, victoire, match nul et qualification) en vue de faire un choix à la fois efficient pour le budget d’Etat et motivant pour les joueurs. L’évaluation des centres de formation de football est aussi fortement suggérée par commission.

A moyen terme, elle met en relief la nécessité d’une refondation de notre football en actualisant les textes et en rendant les structures plus performantes et professionnelles, la tenue d’un atelier devant prendre en compte l’évaluation des entraîneurs étrangers à la tête de notre sélection nationale et de certains clubs.

La revalorisation des techniciens nationaux en matière de football et l’intervention de l’État auprès des grandes entreprises de la place pour améliorer la politique de sponsoring, meilleure stratégie d’appoint aux efforts du Gouvernement dans la prise en charge financière du sport sont entre autres suggestions à moyen terme figurant dans le rapport.

Tout comme l’élaboration et la mise en œuvre d’une politique de jeunes en vue d’une sélection nationale de cadets, juniors et espoirs, la formation d’une équipe nationale locale forte qui servira de réserve au futur staff technique de la sélection nationale, la constitution d’un vivier d’entraîneurs nationaux de haut niveau.

La poursuite de l’élan de développement du sport de masse et le développement du sport scolaire et universitaire ainsi que la réorganisation du championnat national de football (cadet et junior) sont aussi nécessaires pour tourner la page des échecs répétés à la Can. Et à long terme, le développement de notre football intégré dans une politique nationale globale de développement du sport est une impérieuse nécessité.

Ce qui est sûr, c’est que le Gouvernement du Mali ainsi que les populations ont consenti une fois de plus des efforts énormes en matière de mobilisation de ressources humaines, financières et matérielles dans le cadre de la préparation et de la participation des Aigles à la Can-2010. Mais, après sa deuxième participation peu brillante à une phase finale de Can, le football malien se trouve encore à un autre tournant décisif de son histoire.

Comme en 2008, cette situation nécessite la prise de certaines dispositions et la poursuite d’autres déjà engagées après la débâcle de « Ghana-2008 ». Et le rapport notre que « le football, de nos jours, est plus qu’un sport, il est une affaire nationale dont la réussite exige une grande solidarité de tous les acteurs concernés ».

Cette autre défaite des Aigles du Mali est d’autant trop visible et mal accueillie qu’elle est intervenue peu après l’exemple de conviction et d’engagement patriotique de l’équipe du Stade malien de Bamako.

Un engagement récompensé par le succès des Stadistes en Coupe Caf. Malheureusement, les Aigles n’ont pas su s’en inspirer pour tourner la page de leurs contre-performances !

Moussa Bolly

(CC/MJS)

Les Echos du 24 Mars 2010.