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La rive droite partiellement paralysée samedi par une grève des sotramas

Un vent de panique s’est vite emparé, dans l’après-midi du samedi 13 mars, des habitants du district de Bamako, surtout ceux de la rive droite, qui avaient toutes les difficultés de pouvoir rentrer chez eux : pas l’ombre d’une sotrama remplie de passagers dans la circulation. Les quelques rares taxis qui s’aventuraient à prendre quelques passagers étaient arrêtés par de jeunes apprentis très en colère avant d’être vidés de leur contenu. Cette situation provoqua la paralysie des transports publics dans cette partie de la ville avec comme conséquence des passagers arrêtés au bord de la route attendant désespérément qu’une occasion vienne les y chercher.

Beaucoup avaient vite cru au retour des mouvements de grève des syndicats de transporteurs. Rien de tel. Renseignements pris auprès du Groupement Mobile de Sécurité et des responsables syndicaux de la police nationale, ainsi qu’auprès des responsables de la Fédération nationale des syndicats des transporteurs routiers du Mali, il nous a été rapporté qu’un incident malheureux, survenu samedi 13 mars, au carrefour communément appelé  » Stop Alger «  vers le tournant de Daoudabougou, serait à l’origine de cette levée de boucliers.

Finalement, une déclaration télévisée du syndicat des transporteurs, intervenue dans la soirée, a mis un terme à ce mouvement de paralysie.

Il ressort de notre enquête que tout serait parti à la suite de l’interpellation d’une passagère de la sotrama qui faisait des signes de détresse en direction des agents de la police en faction au niveau du rond point  » Stop Alger « .

A l’origine des faits : une dispute entre la passagère et l’apprenti-chauffeur obligea cette dernière, une fois arrivée au niveau de la police, à réclamer l’intervention de celle-ci.  » Le devoir d’un policier, en pareille circonstance, est de porter secours à la victime « , nous dira le Commandant du Groupement mobile de sécurité, le Contrôleur général de police, Ismaël Coulibaly.

L’agent arrêta la sotrama et demanda au chauffeur de lui remettre son cahier. Ce dernier, tel qu’il nous a été rapporté par le Commandant de la Compagnie, refusa d’obtempérer. Un comportement qui agaça les autres occupants du véhicule.

Lesquels, après avoir réprimandé le chauffeur, lui demanderont d’obéir à l’agent de la sécurité. C’est ainsi qu’il remit à ce dernier son cahier. Au moment où l’agent se dirigeait vers l’abri métallique des policiers, le chauffeur rebroussa chemin et se mit en travers de son chemin tout en lui réclamant son cahier. C’était sans compter avec la détermination du policier qui avait juré de faire appliquer la loi.

Le chauffeur, à son tour, décida d’employer la méthode forte en se saisissant de toutes ses forces des mains de l’agent pour lui retirer son cahier. Les passagers assistèrent à un véritable bras-de-fer. Finalement, le chauffeur perdit l’équilibre et tomba dans un caniveau où, soutient le Contrôleur général, sa tête a heurté le rebord.

Il perdit momentanément connaissance avant qu’un véhicule de la Protection civile, de retour de Sénou et qui avait à son bord un malade, ne fût arrêté pour transporter le chauffeur et le policier au CHU Gabriel Touré.

La nouvelle de cet incident a vite fait le tour de la ville. La rumeur prétendait  » qu’un chauffeur aurait été battu à mort par un policier « . Résultat : les jeunes apprentis empêchèrent la circulation à tout véhicule de transport public. Dans leur furie, ils se sont aussi attaqués à des kiosques servant, le plus souvent, d’abris aux agents.Le hangar de Daoudabougou et celui du marché de l’artisanat en ont fait les frais.

Les responsables de la Fédération nationale des syndicats et conducteurs routiers du Mali, en l’occurrence le Secrétaire général, Marafa Touré et son adjoint, Harouna Konaté, se sont, à leur tour, transporté à l’hôpital.

Sur place, ils tombèrent sur le Commandant du Groupement mobile de sécurité, le Contrôleur général de police, Ismaël Coulibaly, le Secrétaire général du syndicat de la police nationale, Tidiane Coulibaly et le Secrétaire général du Maintien d’ordre, le Sergent chef, Siriman Fané.

L’ambiance était très détendue entre policiers et transporteurs, nous a-t-on fait savoir. Le chauffeur, transporté d’urgence, s’en est aussi tiré indemne. Le médecin, dans son diagnostic médical conclut que le chauffeur est une personne hystérique qui, à la moindre contrariété, perd la raison. Les policiers se sont, tout de même, acquittés des frais de traitement.

Par ailleurs, à entendre le syndicat des transporteurs, c’est un autre son de cloche : les faits ne se sont pas déroulés comme l’a annoncé la police. A en croire Harouna Konaté, le Secrétaire adjoint de la Fédération nationale du syndicat des transporteurs, l’agent avait arrêté la sotrama pour un contrôle de routine.

Il s’est avéré que le chauffeur était en règle.  » Malgré cela, l’agent n’a pas daigné le laisser partir. Pire, il lui a réclamé 500FCFA « , nous a soutenu le Secrétaire général adjoint.

Une demande à laquelle le chauffeur n’a pas accédé.  » C’est lorsque notre collègue a voulu lui retirer son cahier qu’il lui a donné un coup de tête. C’est ainsi que nous avons été informés. Nos éléments ont envahi la ville pour interdire la circulation de tout véhicule de transport public «  a-t-il déclaré.

Le Secrétaire général, qui dit avoir déploré l’incident du samedi, a indiqué que tout est rentré dans l’ordre. Il a, par ailleurs, souligné qu’il va falloir que chacune des deux parties prenne ses responsabilités afin d’éviter que de tel incident se reproduise.

Il ne sera pas exagéré d’ajouter qu’une véritable crise de confiance oppose policiers et chauffeurs depuis quelques semaines. L’incident du samedi dernier n’est que le deuxième en moins de trois semaines.

Pour rappel, la mort, le 22 février, d’un chauffeur tué par une balle tirée par une patrouille de police, a paralysé toute la ville de Bamako. Les chauffeurs de taxi étaient molestés par de jeunes apprentis au prétexte qu’ils n’avaient pas suivi la consigne.

Des jeunes scolaires étaient, en maints endroits, dépossédés de leurs engins que l’on jetait au feu des barricades de pneus enflammés par les manifestants. La police, de son côté, en a lourdement fait les frais.

En effet, des postes de police de Senou, Faladié, Niamakoro ont été saccagés. Cinq policiers ont été blessés et admis à l’hôpital. L’un d’eux n’a pas encore repris du service. Il suit une pénible convalescence après avoir eu une clavicule cassée.

Abdoulaye DIARRA

15 Mars 2010.