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L’affaire concernant ministère public contre Aliou Mahamane Touré, l’ex commissaire islamique de Gao, Aliou Mahamane Touré, accusé d’atteinte à la sureté intérieure de l’Etat, d’association de malfaiteurs, de détention d’arme de guerre, de coup et blessures aggravés a connu son épilogue le vendredi 18 août 2017 lors de la première session ordinaire de la cour d’assises de Bamako au titre de l’année 2017. Le verdict de la cour est sans appel. Aliou Mahamane Touré, l’ex commissaire islamique de Gao, écope de 10 ans de prison ferme. Il a déjà fait 4 ans en prison, il lui reste 6 ans à purger.

Initialement prévue pour être jugée le mercredi 9 août 2017 par le jury de la première session ordinaire de la cour d’assises de Bamako, l’affaire concernant ministère public contre Aliou Mahamane Touré, l’ex commissaire islamique de Gao, a été renvoyée au vendredi 18 août 2017. Aliou Mahamane Touré est accusé d’atteinte à la sureté intérieure de l’Etat, d’association de malfaiteurs, de détention d’arme de guerre, de coup et blessures aggravés. L’affaire avait été renvoyée pour faute de présence des victimes au tribunal. A cet effet, l’avocat de la partie civile, Me Moctar Mariko a sollicité un renvoi afin de permettre aux victimes d’éclairer la religion de la cour. Ce qui fut fait par le jury.

Le vendredi 18 août dernier, toutes les parties au procès étaient présentent.
Il ressort de l’arrêt de mise en accusation et de renvoi devant la cour d’assises que pendant l’occupation des régions du nord du Mali par les « Djihadistes » courant 2012, Aliou Mahamane Touré se faisait recruter dans les rangs du Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO). Après avoir appris à manier les armes, il fut doté entre autre, d’un Pistolet mitrailleur (PM) à crosse rabattable N°9270; d’un Pistolet automatique (PA) N°282 calibre 7, 65 mm, de munition et d’un Talki Walki, avant d’être désigné Commissaire islamique de la ville de Gao.

Ainsi, en sa qualité de commissaire islamique, il faisait subir, aux populations de la ville de Gao et environnants, de nombreuses atrocités et exactions, en pillant leurs biens. A ce titre, il commandait la police islamique de Gao qui avait pour mission de sécuriser la population, empêcher la délinquance, en conduisant les personnes arrêtées devant le Juge islamique.

Le 23 décembre 2013, il fut interpellé par les éléments de la Compagnie Méhariste de la Garde Nationale, puis conduit au détachement Prévôtal de Gao. A son arrestation, il a été trouvé en sa possession, un pistolet mitrailleur (PM) à crosse rabattable N°9270, un pistolet automatique (PA) N°6282, calibre 7,65mm, un chargeur pour PM, garni de 30 cartouches, une moto SANILI, un Talki Walki, une cartouchière, deux menottes, deux téléphones portables et quatre allumeurs détenteurs électriques et des explosifs. Une unité diligenta une enquête au cours de laquelle, Aliou Mahamane TOURE reconnut s’être affilié aux membres du MUJAO pour combattre le Mali. Ensuite, il déclara avoir adhéré à ce groupe qui a prôné l’application de la charia, dès son arrivée à Gao.

Violation de l’article 25 de la loi fondamentale qui prône la laïcité

En outre, il a expliqué avoir été doté d’armes, de munitions, d’explosifs, de menottes et autres instruments pour commander et animer la police islamique afin d’arrêter et conduire devant le Juge islamique, les personnes qui enfreignaient la « charia », puis exécuter les décisions de celui-ci, soit par la flagellation des personnes condamnées, soit par l’amputation de leurs membres. Aussi, précisa-t-il, que sa rétribution provenait du « Ganina » (le butin de guerre). Il a, en outre, ajouté avoir non seulement gardé à vue des personnes qui refusaient de se soumettre à ses instructions, mais aussi d’avoir imposé aux boulangers de la localité une réduction du prix du pain. Pour mieux accomplir sa mission, il a été doté des moyens nécessaires, notamment des armes de guerre; des munitions et autres instruments. Muni de ces instruments dont la détention est formellement interdite, Aliou Mahamane Touré reconnait avoir exécuté les sentences du Tribunal Islamique en application de la « Charia », ayant consisté en l’atteinte à l’intégrité physique des personnes condamnées.

Ces exactions graves, allant de la flagellation, coups et blessures, traitements inhumains, aux amputions des membres, sont attestées par certaines victimes déjà entendues : Aga Agaly Ag Idiene Keitane Yattara, Algabas Ag Mourkel, Youssoufa Hamidou Diallo, Amadou Seydou, Idrissa Hamadou, Youssoufa Abdou, Alhader Ag Almahmoud, Mariam Maïga, Issa Idrissa Maïga et Aliou Salihou Touré qui se sont constitués partie civile. En agissant comme tel, indique l’arrêt de renvoi, il ne fait l’ombre d’aucun doute que l’inculpé, Aliou Mahamane Touré s’est associé à une entreprise terroriste pour commettre des crimes, porter atteinte à la sureté intérieure de l’Etat du Mali, notamment en se substituant aux autorités légitimes pour l’application de la « charia », en violation des dispositions de l’article 25 de la Loi fondamentale qui prône la laïcité.

L’arrêt de renvoie précise également que les différents mouvements armés qui s’opéraient au nord du Mali partageaient les mêmes idéologies à savoir porter atteinte à la sureté intérieure de l’Etat, en formant des associations de malfaiteurs pour commettre des attentats contre les personnes et les biens, de coups et blessures aggravés pour avoir amputé les personnes, de détention d’arme de guerre ainsi que des atrocités de toute nature pour ébranler l’autorité de l’Etat en vue de sa partition.

Dans son réquisitoire, le ministère publique à invité la cour à retenir l’accusé, Touré dans les liens de l’accusation, car, dit-il, il s’est rendu coupable d’atteinte à l’intégrité physique. Il a souhaité à ce qu’il soit condamné à la hauteur du crime commis. L’avocat de la partie civile, Me Mariko dira la même chose. Par contre, l’avocat de la défense, Me Tiéssolé Konaré n’a pas plaidé coupable, car selon lui, son client, Aliou Mahamane Touré n’a pas commis l’acte matériel.

A l’en croire, ce n’est pas son client qui détenait les couteaux d’amputations, encore moins l’exécution de la sentence, même si les victimes affirment le contraire. Dans son verdict, la cour a condamné, Aliou Mahamane Touré à 10 ans de prison ferme.

Aguibou Sogodogo

Le Républicain du 21 Aout 2017


L’EX-COMMISSAIRE ISLAMIQUE DE GAO CONDAMNE : Les leçons d’un procès pas comme les autres  

Tristement célèbre dans la Cité des Askia durant l’occupation terroriste, Aliou Mahamar Touré était le commissaire islamique qui a ordonné les amputations et autres flagellations. A la Cour d’assises, il a écopé dix ans de prison. Retour sur un procès qui marque le début de la lutte contre le terrorisme dans notre pays.  

C’est devant ses nombreuses victimes que l’ex-commissaire islamique de la Gao  a été entendu vendredi dernier. Et le moins que l’on puisse dire, ce procès est un symbole au moment où de nombreuses attaques terroristes continuent de frapper le pays ces derniers jours. Membre influent du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), M. Touré a fait régner la terreur sur les habitants de sa ville natale Gao durant l’occupation terroriste.

Vendredi dernier, la justice malienne a condamné à 10 ans de prison Aliou Mahamar Touré, surnommé le « coupeur de mains » de Gao, contrôlée par les jihadistes entre 2012 et 2013 dont il
était le chef de la « police islamique ».

« La Cour déclare l’accusé coupable de tous les faits qui lui sont reprochées, mais avec des circonstances atténuantes, et le condamne à une peine de 10 ans de réclusion criminelle », a déclaré le président de la Cour d’assises à l’issue d’un procès qui s’était ouvert vendredi matin dans la capitale malienne.

« Je m’attendais quand même à une peine plus lourde. Les crimes de guerre sont établis (…) Mais c’est un procès pour l’Histoire. La Cour a reconnu
coupable l’accusé », a réagi à l’issue du verdict prononcé dans la soirée un avocat des parties civiles, également président de l’Association malienne de défense des droits de l’Homme (AMDH), Me Moctar Mariko.

« Je regrette la peine infligée à mon client. On n’a pas apporté des preuves irréfutables. En outre, de gros calibres impliqués dans des crimes au nord du Mali pendant l’occupation (des jihadistes) sont à l’air libre, alors que notre
client n’était qu’un second couteau », a pour sa part déploré un avocat de la défense, Me Tiéssolo Konaré.
Arrêté en décembre 2013 par les forces armées maliennes, Aliou Mahamar Touré, « l’ancien commissaire islamique » de Gao, plus grande ville du Nord du Mali, était notamment accusé d’avoir coupé une main à des voleurs présumés et
fouetté en public des femmes qui ne portaient pas le voile islamique. « Ce n’est pas moi. Ce sont des jihadistes mauritaniens, algériens et sahraoui qui coupaient les mains », avait affirmé Aliou Mahamar Touré lors
d’unique audience de son procès.

Il répondait aux accusations des parties civiles qui ont défilé à la barre une bonne partie de la journée. Son procès est une première dans ce pays du Sahel où des groupes armés continuent à mener des attaques meurtrières. Au moins huit de ses victimes présumées étaient présentes, face à un jury composé de quatre civils, du président de la Cour et de deux magistrats assesseurs.

« J’ai été arrêté parce qu’on m’a accusé de vol. Aliou et ses compagnons m’ont donné de la drogue avant de couper ma main droite », a déclaré l’une d’elles. « Les quatre enfants de mon grand frère ont été arrêtés par Aliou. Il n’a
pas voulu les libérer, il a coupé lui-même leurs mains et pieds. Après il s’est promené avec les mains et les pieds », a témoigné une habitante de Gao, alors que l’accusé gardait la tête baissée.
Accusé également d’avoir fouetté en public des femmes qui ne portaient pas le voile islamique, Aliou est poursuivi pour « atteinte à la sûreté de l’Etat, coups et blessures, détention illégale d’armes de guerre et association de malfaiteurs ». Il risquait jusqu’à 20 ans de réclusion.

Redouté par la population

Originaire de Gao, M. Touré était un pilier du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), un des groupes jihadistes qui a occupé le Nord du Mali en 2012. Reconnaissable par sa grande taille et son véhicule pick-up qu’il conduisait lui-même, M. Touré, Malien le plus gradé dans les rangs des islamistes armés, était redouté par la population.

« Ici, c’est la charia (loi islamique) qu’il faut appliquer. C’est la loi de Dieu. Gao a quitté les mains de mécréants pour tomber dans les mains de Dieu. C’est au nom d’Allah que nous appliquons la charia », déclarait-il à l’époque à l’AFP.

Hasard de calendrier ou une véritable leçon à donner aux responsables  des groupes terroristes ? Une chose est claire, le procès de Aliou Mahamar Touré s’est tenu au lendemain du jugement rendu par la Cour pénale internationale (CPI) déclarant un autre jihadiste malien, Ahmad Al Faqi al Mahdi, coupable d’avoir provoqué pour 2,7 millions d’euros de dégâts en faisant détruire en 2012 des mausolées de la cité historique de Tombouctou.

A. M. C. avec AFP

L’Indicateur du Renouveau du 21 Aout 2017