L’implication du secteur privé dans la croissance énergétique, la baisse du coût de l’électricité sont, entre autres, des défis posés aux Etats de la Cédéao, qui sont réunis depuis lundi à Abidjan pour une réflexion sur le sujet. En marge des travaux, nous avons rencontré le commissaire chargé des politiques macroéconomiques de la Commission de la Cédéao, Pr. N’Galadjo Lambert Bamba, qui brosse la situation macroéconomique de la région, la question énergétique…
Les Echos : Comment se présente la situation macroéconomique en Afrique de l’Ouest ?
N’Galadjo Lambert Bamba : Au 3e trimestre 2010, la situation macroéconomique de notre espace est relativement bonne, malgré les dernières crises internationales. Il semble tout de même que notre région arrive à tirer son épingle du jeu. C’est vrai qu’il y a un fléchissement de notre rythme de croissance, mais notre taux de croissance reste l’un des plus élevés au niveau mondial. Nous sommes en 2e position en termes de rythme de croissance avec plus de 5 % juste derrière l’Asie qui connaît une plus grande performance.
Les Echos : Il y a néanmoins un déséquilibre entre Etats. Comment les classez-vous en tenant compte de leurs performances ?
N. L. B. : Si on essaye de la décliner au niveau de chaque Etat, on dira qu’il y a un groupe de pays qui sont pétroliers. Je veux parler
essentiellement du Nigeria qui, compte tenu de la relative stabilité du coût baril, reste dans une position relativement satisfaisante. Ce pays est suivi par un certain nombre d’autres qui sont en train de sortir de la crise et qui sont dans une phase de rattrapage. C’est le cas de la Côte d’Ivoire. Il y a aussi des pays comme la Sierra Leone qui enregistre un taux de croissance assez élevé. Il y a ensuite des pays pour lesquels l’impact de la crise a été beaucoup plus dur compte tenu du type de relations extérieures qu’ils ont.
Vous avez parfois pour un certain nombre de pays, tels que le Mali, le Sénégal, et, dans une moindre mesure le Niger qui ont des revenus importants en provenance de leur diaspora. Avec la crise, ces rythmes ont été relativement ralentis, mais par contre en ce qui concerne le Sénégal par exemple, on constate qu’il y a un certain boum au niveau du tourisme qui compense relativement en grande partie les pertes liées à la baisse des flux rapatriés par la diaspora.
Ce sont tous ces éléments qui font que la tendance est bonne dans la région. Bien entendu nous avons des difficultés structurelles qui restent en place et l’une de ces grosses difficultés qui va d’ailleurs faire l’objet du symposium que nous organisons, c’est la question énergétique qui, si elle n’est pas résolue, va constituer un frein important à la dynamique de croissance de notre sous-région.
Les Echos : Comment résoudre cette question énergétique si chère à l’Afrique de l’Ouest ?
N. L. B. : C’est pourquoi nous en appelons toutes les intelligences. Si nous avons à entendre beaucoup plus de voix du secteur privé, nous allons, ensemble, exposer les potentialités que nous avons parce que toutes les formes d’énergie peuvent être produites dans notre région. On a du pétrole, de l’uranium, du gaz, le soleil, le vent…
Toutes les sources d’énergie existent dans notre région. C’est vrai que nos États qui essayaient de produire cette électricité à travers des sociétés d’Etat sont aujourd’hui pratiquement essoufflés à cause de la forte demande, parce qu’il y a de plus en plus de gens qui veulent avoir accès à l’électricité. Et compte tenu du fait aussi que ça doit être une électricité avec un coût social, les États n’arrivent plus à subventionner.
Il faut que nous puissions impliquer le secteur privé pour qu’il prenne toute sa part dans la production de l’énergie à des coûts relativement limités pour permettre à la grande masse d’y accéder.
Propos recueillis, à Abidjan, par
Amadou Sidibé (envoyé spécial)
30 Septembre 2010