L’Indépendant : Comment êtes-vous venu dans la musique ?
Mamadou Tounkara : Depuis le bas âge, j’accompagnais mes parents sur les lieux de cérémonie, depuis ce moment j’ai commencé à murmurer les chansons. Mais j’ai véritablement commencé à faire de la musique dans les semaines artistiques et culturelles locales et régionales
Qu’est-ce qui vous a motivé à créer le groupe Les Escrocs ?
Après le diplôme d’études fondamentales, j’ai été orienté au lycée Askia Mohamed. La première chose qui m’est venu dans la tête était de continuer à faire de la musique. Dès lors, j’ai pensé à créer un groupe, pour défendre la cause des jeunes en exprimant leurs préoccupations à travers la musique. En complicité avec mes deux amis d’enfance Salim et Modibo Diallo je suis parvenu à former le groupe Les Escrocs. En ce moment c’est le rap qui était à la mode. Le rap étant le credo des sans voix prend le relais et dénonce les tares de la société. Avec l’aide de ma grande sœur Assetou Kanouté, nous avons pu réaliser la première maquette qui s’intitulait Sara, avec Mahamane Tandina qui nous a beaucoup aidé. Et Dieu faisant bien les choses, le jour ou Mahamane devait nous remettre la cassette à l’espace culturel le Hogon, nous avons rencontré Toumani Diabaté le maestro de la cora, qui, à son tour, nous a apporté une aide précieuse. A la sortie du premier album Sara avec un mélange de son de cora et d’instruments traditionnels, nous avons voulu faire un coup d’essai mais, ça a été un véritable coup de maître.
Pourquoi avez-vous choisi de donner le nom les escrocs à votre groupe ?
Vous savez tout est venu de notre titre ” Sara “, qui veut dire salaire en bamanan en référence au maigre salaire des travailleurs maliens. Depuis qu’on a fait écouter le morceau à des amis, avant même la sortie, brutalement, ils nous ont qualifiés d’escrocs parce que nous avons défendu la cause des femmes. A partir de cet instant nous avons décidé de donner le nom escroc à notre groupe. En ce moment si on escroque les faits de la société, les gens ne seront pas étonnés.
Peut-on connaître les raisons de votre départ pour une carrière solo ? Avez-vous rompu avec le groupe les Escroc ?
Je n’ai pas rompu avec les Escrocs, le groupe existe toujours. Ici au Mali les gens ne comprennent pas le principe. Dans le groupe chacun est libre de faire une carrière solo, sans pour autant rompre avec le groupe. Ma carrière solo s’explique par le fait que je suis griot et je voulais montrer ce coté caché de moi-même. Chez nous, on naît griot on ne peut pas devenir griot. C’est pourquoi j’ai sorti mon album solo intitulé “Comba et Sané” dédié à mes mères et composé de huit titres dans lesquels j’ai rendu un hommage particulier aux porteurs d’uniforme et aux enfants.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées au cours de l’exercice de vos activités ?
Pour être confirmé dès le début, ce n’est pas facile, les gens n’ont pas confiance en toi. Et le problème au Mali est que les opérateurs économiques ne financent pas la musique comme dans les autres pays de la sous région. Avec le problème de piratage c’est encore pire. Je lance un appel à tous les mélomanes pour qu’ils fassent un effort pour acheter les bonnes cassettes afin que les artistes vivent de leur musique.
Propos recueillis par Ramata Tembely
11 Mars 2005