Les interventions sur ces ouvrages respectent les chartes internationales et les règles de conservation applicables aux sites du patrimoine mondial de l’Unesco.
La très vieille civilisation malienne continue de survivre à travers de célèbres mosquées. Le temps et le climat ont causé de terribles dommages à ces édifices. Aussi depuis 2003, notre pays a-t-il entrepris avec l’appui technique et matériel de la Fondation Aga Khan la restauration de certaines mosquées en banco.
Le lot à restaurer inclut la mosquée « Komoguel » de Mopti, celle de Djenné et « Djingarey Ber » de Tombouctou. Les travaux sont déjà terminés à Mopti. Par contre, pour cause d’hivernage, les chantiers de Djenné et de « Djingarey Ber » sont actuellement en veilleuse. Le dernier prendra plus de temps. Il sera achevé seulement en 2010.
Des grands chantiers en perspective. L’état de dégradation avancée de ces mosquées était visible à l’œil nu. Ainsi d’année en année les populations et l’Administration ont effectué des tentatives de renforcement des structures ou des parties menacées dans l’architecture de ces ouvrages.
PLUS DE 3000 FIDELES:
La mosquée de « Djingarey Ber » semble entièrement construite en briques de calcaire hourdées avec un mortier de terre. Les Tombouctiens désignent le calcaire sous le nom poétique »Alhore ».
Les salles sont composées de murs massifs et de piliers supportant la toiture terrasse. Les murs anciens, variant de un à deux mètres d’épaisseur, ont souvent été doublés au fil du temps de contreforts ou de parements successifs.
Murs anciens et contreforts sont construits avec les mêmes matériaux. Mais les parties récentes sont de moindres qualité. Les pierres sont plus petites. Le banco est plus sableux et fragile. La mise en œuvre est moins soignée.
A l’intérieur, Les anciens maçons se souviennent, qu’à l’intérieur de l’emblématique « Djingarey Ber« , les plafonds traditionnels en bois apparent étaient entièrement décorés par un agencement soigné de jolies goulettes droites et régulières en dessins géométriques.
Aujourd’hui, on trouve trace de ce type de plafond uniquement en sous-face de l’ancien escalier permettant l’accès au grand minaret. Quant aux enduits extérieurs de la mosquée, ils sont entretenus chaque année.
Actuellement, l’enduit est réalisé avec une terre sableuse, facilement accessible, peu onéreuse, mais qui s’avère aussi de qualité médiocre. Toutefois, les maçons nous ont appris, ainsi que certains sondages l’ont révélé, qu’autrefois un banco pourri était appliqué sur toute la mosquée.
Le revêtement à l’intérieur de la mosquée, réalisé en 1965, est un enduit de terre sableuse ocre, d’aspect lisse et comprenant, toutefois, les marques de la truelle. Mais par endroits, l’enduit n’adhère pas au support ou apparaît craquelé.
En somme, les spécialistes remarquent que le caractère traditionnel de son architecture est mis en danger par des changements de plus en plus importants effectués avec des matériaux de qualité médiocre ou complètement hétérogènes.
Il est constaté que la perte progressive du savoir-faire et l’utilisation de matériaux non adaptés accentuent, encore davantage, la dégradation du monument. Il est donc important d’attacher beaucoup d’attention aux matériaux et au savoir-faire dans l’analyse des problèmes liés aux dégradations.
Construite en 1325, la mosquée est entièrement reconstruite entre 1570 et 1583 par l’Imam El Aqib, cadi de Tombouctou. Au fil des siècles, s’enchaînent d’autres transformations que relatent des écrits historiques.
De 1962 à aujourd’hui cette mosquée a subi une dizaine de transformations. Elles n’ont néanmoins pas changé la structure globale de l’édifice. L’actuelle mosquée de « Djingarey Ber » peut contenir plus de 3000 fidèles.
L’intérieur est divisé en 9 rangées dont chacune compte plus de 400 rôniers. La mosquée garde la même température du matin au soir. Elle est la dernière demeure d’une quarantaine de saints.
Le bâtiment est majestueux. Les campagnes de restauration sont limitées à la saison sèche. Durant cette période il est possible de construire en terre. Mais pour être efficace il est nécessaire de définir des zones d’intervention. Les restaurateurs fractionnent le monument pour pouvoir réaliser une série de petits chantiers.
En effet, il sera important de rendre étanche le bâtiment avant chaque saison de pluies. Le chantier du « Djingarey Ber » s’étale sur une période de 4 ans, de mai 2006 à mai 2010.
90 PILIERS À BASE RECTANGULAIRE:
Les travaux de restauration de la mosquée de Djenné, ont été précédés de quelques échauffourées entre les ingénieurs du Trust Aga Khan et un groupe d’habitants hostiles. Ces incidents vite circonscrits prouvent si besoin en était l’attachement des populations à leur mosquée.
La grande salle de prière, à Djenné, compte 90 piliers à base rectangulaire, organisés en 9 rangées supportant d’imposantes arcades. La toiture-terrasse est une structure traditionnelle en poutre de bois de rôniers. Elle est couverte par un revêtement en terre avec une hauteur sous plafond d’environ 8,20 mètres.
Le revêtement des murs intérieurs est en terre sableuse comme dans la mosquée « Djinguiray Ber« . Mais ici, il a été posé il y a 10 ans. Avant cette date, les murs étaient enduits avec le même banco pourri que celui toujours appliqué à l’extérieur de la mosquée.
Le sol à l’intérieur du bâtiment est composé d’une couche de sable sur laquelle sont posés les tapis de prière des femmes. Cette grande cour est utilisée pour la prière du soir, pendant la période la plus chaude de l’année. Elle possède un revêtement de sol en terre, également recouvert de sable.
Ce matériau permet une meilleure absorption et l’évacuation de l’eau tout en laissant le terrain praticable juste après une forte pluie. La plate-forme autour de la mosquée est construite en banco.
Mais il s’agit essentiellement des restes de banco apportés pendant la manifestation annuelle de crépissage. Par endroit, ce revêtement est très irrégulier. Il forme même de petites mares où peut s’accumuler l’eau en saison des pluies.
La présence d’une large colonie de chauve-souris a été détectée. Elle compte, probablement, plusieurs centaines d’individus concentrés principalement dans la grande salle de prière de la mosquée.
Les animaux peuvent y être observés pendant la journée, alors qu’ils se cachent de la lumière, accrochés au plafond dans les zones les plus sombres. Le toit présente par endroits des craquelures et des lacunes d’enduits. Ces cavités sont idéales comme habitats pour ces animaux.
Plusieurs fissures ne présentant pas de grande inquiétude pour la structure du bâtiment sont visibles. Toutefois, elles constituent des voies d’infiltration d’eau, qui au fil du temps pourraient poser problème.
L’entretien traditionnel de la mosquée est assuré chaque année avec le renouvellement de la couche d’enduit. Mais il est rendu difficile par l’amoncellement général de la terre sur l’ensemble du bâtiment. En effet le surplus des matériaux est toujours abandonné sur place.
LANTERNEAUX OBSTRUEES:
La plupart des lanterneaux ne jouent plus leur rôle. Ils sont obstrués par l’accumulation d’enduit. Et les couvercles sont presque tous scellés par la couche de banco de crépissage. Cette obstruction diminue grandement l’efficacité de l’aération et la ventilation.
Ces trous, par ailleurs, comportent des aspérités qui constituent un habitat privilégié pour les chauves-souris. Ils peuvent servir de voies d’accès possibles à l’intérieur de la mosquée, pour des individus mal intentionnés.
Avant l’électrification, la mosquée était éclairée avec des lampes à huile. Elles sont disposées dans les alcôves creusées à cet effet dans les murs. Elles sont toujours visibles. La salle de prière bénéficie simplement de la lumière naturelle.
Elle pénètre par les ouvertures pratiquées sur les façades sud, nord et ouest et les lanterneaux transperçant le plafond. Les installations techniques modernes de la mosquée sont récentes. L’électrification date de 1998 et la ventilation de l’an 2000.
Malgré cette rénovation, l’intérieur de la moquée est restée relativement sombre malgré les néons sur les murs périphériques de la salle de prière. Ces installations sont réparties essentiellement dans les allées de la grande salle de prière.
Elles comprennent, un compteur et deux disjoncteurs électriques. Les ampoules néons sont accrochées aux murs. Les ventilateurs sont montés principalement sur le mur est et sur les colonnes. Et enfin les amplificateurs et hauts parleurs sont raccordés à un branchement électrique apparent aérien.
Dans l’ensemble, ce réseau technique est en mauvais état. Les boîtiers électriques et les interrupteurs sont dans un état précaire. Les gaines et les fils électriques sont apparents et entremêlés. Les ventilateurs, à tout moment, peuvent se décrocher des murs et des colonnes.
Les toilettes fonctionnent très mal, car la vidange n’est pas correctement faite. Ce travail ne peut se faire que par le petit trou pratiqué au sommet de la fosse totalement enfouie dans la rue. Le vidange ne peut donc se faire que par pompage.
Les interventions sur ces mosquées respectent les chartes internationales et les règles de conservation applicables aux sites du Patrimoine mondial de l’UNESCO. Elles se font conformément aux codes internationaux de conduite acceptés pour la manipulation des animaux.
Y. DOUMBIA- L’Essor
20 septembre 2007.