Les pays de l’UE ont interprété en leur faveur l’article 24 de l’OMC en mettant l’accent sur le libre-échange. Cette vision a porté un coup préjudiciable aux négociations des APE avec les pays ACP. Nous avons pu nous entretenir avec Mohamed Lamine Ndiaye, directeur du programme juridique et économique de Oxfam International-Dakar. Il estime subjective la position de l’UE à ces négociations.
Les Echos : Quel est le contenu de l’article 24 de l’OMC ?
Mohamed Lamine Ndiaye : L’article 24 de l’OMCdéfinit la compatibilité des accords régionaux qui sont signés en dehors de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Cela veut dire que la préférence est accordée à toute organisation ou tout pays qui viendrait s’établir dans les marchés réciproques. C’est ce qu’on appelle la compatibilité. C’est cela qui crée la réciprocité que l’Union européenne demande dans le cadre des Accords de partenariat économique (APE). Le soubassement juridique se trouve dans l’article 24 de l’OMC.
Les Echos : Pourquoi les pays ACP sont-ils inquiets ?
M. L. N. : Les inquiétudes des pays Afrique Caraïbes Pacifique (ACP), des organisations de la société civile (OSC) et des mouvements pour la forme actuelle des APE relèvent de l’interprétation subjective de cet article par l’UE. Il ne répond pas aux attentes des pays ACP.
Quand on parle des échanges commerciaux, le pourcentage ne peut pas être défini à 90 % par l’UE. En sus, le délai raisonnable de dix ans valable pour d’autres pays doit pouvoir l’être pour les ACP. Nous estimons qu’un délai peut être accordé aux pays ACP au-delà de 25 ans ou même 50 ans. _ Pour preuve, l’UE vient de célébrer ses 50 ans de traité. Il est donc impératif de revoir l’interprétation de cet article. Il s’agit tout simplement d’inclure l’aspect du traitement spécial et différentié. Cela garantit dans les textes de l’OMC les Accords de Cotonou. L’avantage est que Cotonou prend en compte les aspects liés au développement alors que les APE en négociation insistent sur le libre-échange. La réciprocité demandée ouvre la voie à une concurrence entre des pays riches et des pays pauvres que sont les Pays les moins avancés (PMA). Il est important de souligner que des pays souhaitent vivement la révision de l’article 24 de l’OMC qui renferme des clauses injustes.
Propos recueillis, à Accra, par
Amadou Sidibé (envoyé spécial)
03 juillet 2007.