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‘’La nature a honneur du vide comme Madame la Baronne a honneur du thé’’, a- t- on coutume de dire.


Dans l’histoire récente de la démocratie au Mali, un constat amer s’impose : les politiciens en mal de crédibilité et de popularité se sont convertis en courtisans bon teint des leaders religieux. C’est pourquoi, dans les stades, les salles de conférences, dans les établissements scolaires, lors des campagnes électorales et de rassemblements à caractère religieux, les ‘’démocrates maliens’’ se battent avec corps et âme pour être aperçus par les notoriétés musulmanes.

Avec le temps, cette courtisanerie a fini par mettre au devant de la scène politique bien de leaders musulmans. La conséquence constatée c’est que les gouvernants garants de la laïcité de l’État se sont mués en croyants bon teint qui foulent au pied cette laïcité qui, pourtant, a permis au Mali d’être l’un des pays, où l’appartenance religieuse s’accommodait bien avec ladite laïcité.

Notons au passage que la laïcité ne signifie nullement choisir seulement entre les religions comme on le penserait ici. La laïcité de l’État, c’est la séparation des affaires de l’État et des églises et des mosquées. N’en déplaise aux politiciens démagogues !

De plus en plus, les politiciens maliens, fuyant tout débat scientifique, mettent en avant leur penchant religieux chaque fois qu’ils interviennent sur les problèmes de la nation. Ainsi, ils n’ont cesse de se blottir derrière le nom de Dieu pour être dans les grâces des leaders religieux capables de leur fournir les voix indispensables à leur élection aux différentes instances politiques du pays. Peu importe s’ils n’ont aucune vision, aucun projet sérieux pour le devenir de ce pays !

Aujourd’hui, il est impensable que les politiciens maliens brillent par leur absence aux rencontres religieuses que tiennent les leaders religieux, leurs pourvoyeurs d’électeurs. L’on comprend donc pourquoi les religieux s’imposent comme incontournables dans les hautes prises de décisions politiques engageant la vie de la nation. Ainsi, toute attitude des religieux en porte à faux avec la laïcité de l’État est sournoisement camouflée.
Cela nous rappelle, hélas, la célèbre expression de cet homme de culture: «Si État est fort, il nous écrase. S’il est faible nous périssons !».

La faiblesse de l’État malien ne souffre plus d’aucun doute. À titre d’exemple, par leur comportement hypocrite, les politiciens maliens ont cédé devant la passe d’armes de leaders religieux face au code la famille que le président ATT se devait de promulguer.
Aujourd’hui, face à la menace du Covid-19, bien de chefs religieux affichent leur refus de fermer les mosquées au Mali au motif que la vie appartient à Dieu seul, tout en oubliant cette célèbre phrase ‘’Aides –toi le ciel t’aidera’’. Ce refus manifeste de voir la réalité en face n’intrique outre mesure les décideurs politiques dans notre pays. Même quand ils savent qu’il est de leur devoir d’appliquer les mesures préventives pour éviter la propagation du coronavirus.

Pourtant, le couvre-feu est en vigueur ainsi que la fermeture des écoles et des compétitions sportives. Ce double jeu des décideurs politiques prouve à suffisance que force n’est pas à la loi au Mali chaque fois qu’il s’agit de rappeler les chefs religieux à respecter scrupuleusement les décisions de l’État permettant un meilleur devenir du peuple malien.

Dans le même temps, on constate qu’ailleurs dans les autres pays musulmans, les mosquées sont fermées jusqu’à nouvel ordre. Coronavirus et l’intérêt national obligent ! Va-t-on jusqu’à penser que les maliens sont plus musulmans que les citoyens de ces autres pays ? Non ! Bien au contraire ! Le constat patent est que les Maliens, dans leur écrasante majorité, foulent au pied les leçons de morale qui doivent guider tout bon musulman: la négation de la corruption, de la délinquance financière, de l’escroquerie, de l’adultère, du vol, du mensonge pour des intérêts sordides, etc.

Aujourd’hui, hélas, le terrain politique est occupé par les religieux à tel point qu’ils ont nettement effacé l’Etat au Mali et cela aux dépens du peuple travailleur. Sinon, il n’y aucune raison sérieuse pouvant empêcher la fermeture des mosquées en attendant le passage de cette étrange tempête mondiale qu’est le coronavirus.

Il est donc grand temps de remettre les choses à leur place pour que l’État puisse vraiment s’assumer pour le bonheur de notre peuple.

Fodé KEITA
L’Inter de Bamako du 30 Mars 2020