La transition en vue ne réussira qu’avec un militaire à sa tête. C’est la conviction du Mouvement populaire du 4 septembre 2020 (MP4) qui a tenu, hier à la place de l’Indépendance, un meeting de soutien aux Forces armées maliennes. Cette manifestation, première activité d’envergure de ce mouvement porté sur les fonts baptismaux, il y a seulement quelques jours, intervient au lendemain d’une rencontre des chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Au cours de ce sommet, les dirigeants ouest-africains ont exigé que le président et le Premier ministre de la transition soient des civils.
Une exigence contre laquelle vitupéraient les manifestants, à travers des slogans hostiles à l’organisation sous-régionale qui, estimaient-ils, doit se conformer à la volonté du peuple malien. Et cette volonté, selon Baba Sanogo, un manifestant, c’est de confier la gestion de la transition aux militaires qui ont renversé le régime de l’ancien président de la République. Les chefs d’État prouveront ainsi que la «Cedeao n’est pas un syndicat de présidents de la République».
Notre interlocuteur va plus loin, en prédisant l’issue de la concertation nationale qui démarre le jeudi prochain : «Les Maliens confirmeront qu’ils sont favorables à ce que la transition soit dirigée par le Comité national pour le salut du peuple».
Mais au sein du MP4, certains militants sont conscients que nombre de nos compatriotes ne partagent pas leur avis sur la question. Néanmoins, ils sont bien déterminés à se faire entendre pour que le CNSP garde la main. Partageant ce souhait, Hamidou Guindo met cependant un bémol en soutenant que «les militaires corrompus doivent être écartés» et rappelle les événements de 2012, dont l’issue prouve à suffisance qu’il ne « sert pas à grand-chose d’imposer des civils à la tête d’une transition ».
POUR LA PATRIE. Cet engagement du MP4 en soutien à l’armée, est motivé, selon les initiateurs, par le seul souci de préserver la mère patrie qui est confrontée, depuis une dizaine d’années, à de dures épreuves. La descente aux enfers a été stoppée par le CNSP, selon Seydou Oumar Traoré, président de la plateforme «Les Patriotes».
Par conséquent, il a estimé que tous les patriotes doivent se mobiliser pour soutenir les militaires dans « toutes conduites qu’ils auront décidé de tenir ». D’ores et déjà, lui-même a plaidé pour une transition de trois ans et que, pendant ce temps, les «politiques qui veulent gérer le pays se préparent pour l’élection de 2023».
Seydou Oumar Traoré a, dans la foulée, tancé la vieille garde. Les autres intervenants lui emboîteront le pas, fustigeant la gestion des acteurs politiques. «Les civils ne peuvent pas gérer la transition», a tranché Alassane Tangara, président de la plateforme «Mali pour nous Tous». Et de mettre en garde ceux qui tenteront de se mettre au travers du chemin de l’armée.
Abdoulaye Keïta, président de Wati Sera, s’est appesanti sur les sanctions prises par la Cedeao, qui ne vont que fragiliser davantage la situation de notre pays. «L’embargo est pour nous, des souffrances de trop», a-t-il déclaré, avant d’appeler les dirigeants ouest-africains à reconsidérer leur position. Par ailleurs, il a salué le CNSP pour avoir organisé des funérailles dignes de ce nom pour les soldats tombés récemment à Guiré.
Comparativement aux dernières manifestations qu’a connues la place de l’Indépendance, celle-ci a mobilisé peu. Visiblement déçue, Aissata Traoré s’en prend à nos compatriotes qui auraient «certainement effectué le déplacement par milliers s’il s’agissait de défendre des intérêts personnels». Pour sa camarade, Mariam, la majorité des Maliens ne sont «patriotes que du bout des lèvres».
Néanmoins, les organisateurs se sont félicités d’avoir réussi le coup et promettent d’autres actions.
Issa DEMBÉLÉ
L’Essor du 09 Septembre 2020