Partager

Juriste pratiquant et adoubé par ses pairs, le ministre de la Fonction publique, Me Abdoul Wade Berthé, n’a pourtant pas été regardant sur les textes régissant le recrutement dans l’administration de la douane.

Personne ne peut nier le fait que l’actuel ministre de la Fonction publique est un éminent juriste. Avocat et professeur de droit, Me Abdoul Wahab Berthé a été président du PMDR avant de rallier l’URD dont il est aujourd’hui le 1er vice-président.

Très connu et respecté dans les cercles de la justice et surtout dans le landerneau politique malien, l’homme a été propulsé au poste de ministre de la Fonction publique et du Travail en octobre 2007.

Mais, pendant que les autorités claironnent à longueur de journée le renouveau de l’action publique, le ministre de la Fonction publique vient de s’illustrer par un mauvais exemple en procédant au recrutement caché de 300 agents dans l’administration de la douane.

Le problème n’est pas pourquoi l’Etat a recruté des agents au niveau de la douane mais le fait est que les dispositions réglementaires en la matière ont été violées. A preuve, les articles 9 et 10 du décret 038/P-RM du 27 janvier 2000 relatifs respectivement à la vacance d’emploi constatée et vérifiée et aux modalités d’organisation des tests de recrutement pour des emplois des catégories C, B et A… ont été foulés au pied par le ministre de la Fonction publique.

A la lecture de ces dispositions, l’on s’aperçoit que l’une des conditions de l’organisation d’un concours direct d’entrée à la fonction publique découle des besoins exprimés par les différents départements ministériels. Pourtant, ni le département de tutelle de la douane ni la direction générale de ce service n’a exprimé un besoin quelconque pour recruter des agents de constatation, contrôleurs et inspecteurs journaliers.


Quel respect de soi-même ?

Curieusement, le ministre de la Fonction publique, qui n’a apparemment que faire des textes de la République, a trouvé le moyen de recruter des agents à la douane sans en référer à la direction nationale de la fonction publique comme il se doit aux fins d’aviser tous les candidats potentiels.

En procédant à ce recrutement « fermé », quelles sont les motivations du ministre ? Sur quoi s’est-il fondé ? A-t-il reçu des pressions de l’autorité suprême pour faire des bienheureux au milieu de ceux qui n’auront rien dans le Mali d’ATT ?

Difficilement, Me Abdoul Wahab Berthé pourra se sortir de ce piège. L’on aurait compris à la limite si c’est l’administratif qui s’était comporté de la sorte, mais de la part d’un juriste doublé d’un homme d’Etat, il n’y a plus rien à dire.

Au cas où le ministre Berthé aurait reçu des pressions pour satisfaire une telle exigence, il aurait dû démissionner comme on l’a vu sous d’autres cieux. Peut-être qu’il ne mesure pas aujourd’hui l’ampleur et la portée de l’acte qu’il a posé, mais qu’il se rassure d’une chose : il s’est disqualifié dans ce pays.

Sinon où est le renouveau de l’action publique prôné par le Premier ministre d’autant que l’Etat lui-même ne parvient pas à respecter le cadre qu’il a tracé alors qu’il reste un sujet de droit. Si c’est des dirigeants eux-mêmes qui portent atteinte aux lois et règlements de leur pays que peut-on exiger du citoyen lambda ?

Mohamed Daou

17 Juillet 2008