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Les cargaisons débarquent sur les différents marchés de la capitale, sans doute dans la perspective de la forte pression des derniers jours avant la fête.La dernière ligne droite s’amorce vers la fête de Tabaski. Dans un peu moins de deux semaines, la communauté musulmane célébrera sa plus grande fête annuelle appelée l’Aïd El Kébir. A cette occasion, selon les prescriptions divines, tout musulman adulte ayant les moyens financiers de le faire, doit sacrifier soit un mouton, un bœuf, une chèvre ou un chameau. Mais de tous ces animaux, c’est le mouton qui est particulièrement recommandé. De fait, l’Aïd el Kébir est devenue chez nous « la fête du mouton ».

Comme tous les ans, à l’approche de cette fête, la course au mouton est engagée. Depuis quelques semaines, les bêtes ont commencé à converger vers la capitale. On les aperçoit dans les rues par petits groupes conduits par des vendeurs ambulants à la recherche de clients. Les marchés à bétail ont commencé à s’animer, même si ce n’est pas l’effervescence pour le moment. Nous sommes mardi au marché à bétail de Faladié en Commune VI du District de Bamako. Un homme que nous désignerons par ses initiales, A. S., arrive. Un jeune homme se précipite sur lui. « Quel type de mouton cherchez-vous ?

Un gros, un moyen, un petit ? J’ai ce qu’il faut pour toi mon ami », assure Modibo Diallo qui présente les moutons avec les différentes propositions de prix. Mais A. S., enseignant de formation, trouve que les prix proposés ne sont pas à sa portée. La tentation de comparer avec ceux de la fête précédente étant toujours grande, l’enseignant trouve que le mouton est plus cher cette année que l’an passé.

Le constat est partagé par le propriétaire des animaux lui-même. Celui-ci dispose d’un petit troupeau de béliers dont les prix annoncés vont de 55 000 à 225 000 Fcfa. Un peu plus loin, est installé Saya Maiga. Il veille sur une dizaine de superbes béliers blancs avec l’assistance de deux autres personnes qu’il présente comme ses frères. Originaire de Gao, Saya Maiga connaît bien son boulot.

Il explique : « Pour un départ, je viens à Bamako avec seulement quelques moutons pour tâter le pouls du marché. Je suis arrivé à Bamako il y a une semaine en provenance de Gao où j’achète mes moutons. Les espoirs de faire de bonnes affaires cette année me paraissent grands. Même si pour le moment, elles ne marchent pas bien. Les clients sont encore rares. Dans tous les cas ce n’est qu’une question de temps. Ils viendront obligatoirement ». Il explique que nombre de Bamakois préfèrent attendre la dernière minute pour acheter leur mouton, car il n’est pas facile d’entretenir un bélier dans la grande ville.

D’abord il y a des problèmes d’espace pour le garder et ensuite, l’entretien de l’animal coûte cher. N’ayant pu trouver un bélier à la hauteur de sa bourse, A. S. s’enfonce dans le marché et se retrouve chez Aboubacrine Haidara. Là aussi, il ne pourra pas acheter son mouton. Le vendeur est venu de Léré avec ses 4 frères et son neveu. Bien qu’il soit berger de père en fils, Aboubacrine ne se contente plus du stock familial. « Je descends dans le Télemsi tous les ans à l’approche de la Tabaski pour acheter les animaux et ensuite je les achemine vers Niono.

De là, je loue les services d’un transporteur qui se charge d’amener mes moutons à Bamako », explique le berger. Pour le transport de chaque bête, il paie 3 000 Fcfa. Nombre de ses 400 moutons sont castrés. Un procédé auquel les éleveurs ont recours pour permettre à l’animal de grandir plus vite. Aboubacrine propose ses moutons entre 75 000 Fcfa et 100 000 Fcfa.

Des démarcheurs très actifs.

L’un des marchés à bétail les plus courus de la capitale est celui de Lafiabougou. Il a commencé à faire peu à peu le plein de moutons. Les cargaisons débarquent généralement la nuit. Les animaux viennent généralement du Pays dogon, de Douentza et de Djenné. Les plus gros béliers proviennent des régions du Nord. Ce marché qui longe la petite voie qui traverse le vieux quartier de Lafiabougou-Koda mérite son appellation de « bourse du mouton ». Ici plus que sur d’autres marchés, ceux qui savent bien marchander trouvent des moutons à prix raisonnable.

Les clients qui ne veulent pas perdre trop de temps et d’énergie sont évidemment à la merci de vendeurs appuyés par une nuée de démarcheurs. Ces derniers sont particulièrement actifs. Ils accueillent les clients et les dirigent vers les vendeurs. Il est même souvent difficile de savoir à qui appartient l’animal.

Dans les différents marchés, il y a des moutons pour les bourses modestes. Leurs prix varie entre 30 et 40 000 Fcfa. Mais ils sont chétifs. Pour avoir « un bon mouton », il faut (pour le moment) débourser au minimum 60 000 Fcfa. Les plus gros béliers qui dominent de loin le reste du troupeau sont proposés à 200 000 voire 300 000 Fcfa. Le constat général est que l’embonpoint des moutons est très satisfaisant, témoin d’un fourrage abondant après une forte pluviométrie cette année. Pour le moment, bien que le prix du mouton soit jugé dissuasif, les différents marchés sont en plein approvisionnement se préparant ainsi à la forte pression des jours à venir.

Amadou M.Cissé

Essor du 05 Novembre 2010.