Le collectif qualifie ce projet comme un véritable outil de discrimination, inacceptable et méprisant, violant les droits les plus fondamentaux. Un projet, qui une fois adopté au Sénat, mettra en péril l’intérêt des immigrés, il fabriquera une masse de « Sans papiers » tout en durcissant les conditions d’entrer et de séjour des étrangers en France. En plus de sa loi sur l’immigration dite choisie, le ministre de l’intérieur français continue sa chasse aux étrangers sur d’autres terrains comme le confirme ce passage de sa circulaire (N° INT/D05/00097/C) adressé aux préfets de France le 10 octobre 2005 : « je n’ignore pas que vous êtes, de manière récurrente, confrontés à la situation délicate des jeunes majeurs scolarisés qui ne peuvent de plein droit prétendre à un titre de séjour. Vous pourrez leur remettre une autorisation provisoire de séjour leur permettant de finir leur année scolaire en vue de passer leurs examens. Vous devrez alors les inviter à regagner leur pays d’origine pendant la période des vacances scolaires. S’ils ne défèrent pas à cette invitation, vous en tirez les conséquences en appliquant les dispositions relatives à l’éloignement…vous veillerez en outre, à ne pas mettre à exécution avant la fin de l’année scolaire l’éloignement de familles dont un enfant est scolarisé depuis plusieurs mois« .
Cette « clémence » sur la suspension des expulsions des enfants sans papiers et leur famille qui avait été initié, suite à la mobilisation des établissements scolaires contre l’expulsion des élèves sans papiers, prendra fin le 30 juin prochain. Malgré l’aumône du ministre de l’intérieur de régulariser 720 familles étrangères, des milliers de familles vivent dans la crainte et le désespoir, car ces 720 ne sont qu’une goutte d’eau : le nombre de familles expulsables étant estimé à 50 000 par le même ministère. Selon le réseau de l’éducation sans frontières, au-delà du 30 juin, les préfets, les forces de police auront l’autorisation d’intensifier les traques contre tous les « Sans papiers », ils pourront être interpellés partout, en leur domicile, dans la rue, en préfecture ou même à l’hôpital. Selon les consignes qui seraient déjà donnés, ces étrangers en situation irrégulière arrêtés, seront aussitôt placés en garde à vue, ils seront enfermés dans des centres de rétention avant d’être expulsés vers leurs pays d’origine.
Aujourd’hui ces milliers d’étrangers vivent dans la hantise de perdre tout ce qu’ils ont construit en France depuis des années. Certains ont même peur de sortir, tremblent à la seule vue d’un uniforme. Les immigrés dans cette vie de calvaire peuvent compter sur le soutien de certaines associations et bonnes volontés qui les épaulent dans leur combat quotidien. Collectif uni contre l’immigration jetable Selon le responsable de ce collectif, Djibril Diabi, le projet de loi Sarkozy est un véritable outil de discrimination. « Depuis la présentation du projet de loi sur l’immigration choisie les sans papiers vivent l’enfer. Ce que nous recherchons n’est pas utopique, nous réclamons la régularisation globale de tous les immigrés, la fermeture des centres de retention, le retrait de la circulaire adressée aux préfets et l’abrogation de la loi Sarkozy. Depuis le mois de mars, nous nous sommes rendus à la présidence pour solliciter l’appui de Jacques Chirac qui nous a renvoyé chez l’initiateur du projet au ministère de l’intérieur. Nous allons accentuer la mobilisation pour obtenir gain de cause. La décision du ministre de l’intérieur de régulariser à peine 800 familles sur plus de 400 000 familles est uniquement destinée à tromper l’opinion nationale, et sera soumise à l’arbitraire des préfets. Pour nous, cette décision qui ne concernera ni les célibataires ni les couples en concubinage est inadmissible« , nous précisera t- il.
Le responsable du collectif des sans papier de Paris ajoutera qu’ils « déplorent l’accueil de Sarkozy par certains dirigeants africains qui auraient dû imiter leur pair du Sénégal qui a osé dire non« . Toutefois il regrette la passivité des immigrés qui, selon lui, restent inactifs et sourds face aux cris d’alarme de leurs confrères en situation irrégulière. Pour Annic Rlageolet membre du collectif, avec ce projet de loi Sarkozy, les immigrés seront considérés comme des « objets qui finiront leur course à la poubelle après usage, ils n’auront aucune sécurité« .
Avant de poursuivre : « avec nos manifestations, nous avons pu obtenir des amendements, mais notre objectif reste l’abrogation du projet de loi sur l’immigration jétable. Ce projet ne concernera pas uniquement les sans papiers mais tous les étrangers, elle nuira aux droits de vivre en famille pour les pauvres. Car pour prétendre à un regroupement familial, l’immigré doit avoir un travail stable, un logement dans un quartier assez tranquille, des conditions assez drastiques de sorte que faire venir sa famille en France devient impossible, toute chose qui est contraire à la déclaration universelle des droits de l’homme et à la convention Européenne. En plus, le mariage mixte sera plus difficile. Cette loi nous conduit dans un type de société xénophobe en tant que citoyenne française, je refuse ce type de société. Pour moi, la France aura toujours besoin d’immigrés pour accomplir les tâches les plus ardues que les Français rejettent. Je pense que la France multiculturelle est une richesse, nous devons cohabiter ensemble, combattre le racisme et rester solidaires« , nous a t- elle indiqué.
Quant à Nadjoum, immigré Algérien, la loi Sarkozy cible uniquement les africains, c’est une loi issue du fascisme : « la France s’est construite grâce à l’exploitation des richesses africaines et les immigrés africains continuent de contribuer à son développement. L’acharnement de Sarkozy est sans fondement valable« . Les sans papiers de Montreuil ne resteront pas en marge de cette mobilisation, beaucoup d’entre eux dénoncent la loi Sarkozy qu’ils jugent très discriminatoire. Ils diront que la France a toujours eu besoin de l’Afrique depuis la période de la deuxième guerre mondiale, en réplique à l’assertion de Nicolas Sarkozy qui insinuait lors de son séjour en Afrique : « la France n’a pas économiquement besoin de l’Afrique« . D’autres manifestations sont prévues le 1er juillet. Arriveront-elles à abroger la loi initiée par le président de l’UMP ? Affaire à suivre Sacko Doumlbia Correspondante à Paris Encadré Deux réseaux : un seul combat Réseau Education Sans Frontière RESF Cette association qui était présent au sit-in du 11 juin entend défendre le droit des immigrés surtout les enfants scolarisés, « les enfants en situation irrégulière« , s’ils sont arrêtés. Réseau pour l’autonomie des femmes immigrées et réfugiées Claudile Letellier, membre du réseau pour l’autonomie des femmes immigrés réfugiées RAJFIRE, une association qui milite pour le droit des femmes immigrées, membre du collectif uni contre l’immigration jetable, plaidera la cause des femmes immigrées.
Elle a affirmé que la loi Sarkozy compliquera davantage les conditions des femmes étrangères en accentuant leur vulnérabilité et leur dépendance conjugale. « Une femme immigrée qui épouse un français n’obtiendra plus automatiquement un titre de séjour, les délais de régularisation, d’obtention du titre de résident sont prolongés de trois ans, et dépendent du pouvoir discrétionnaire des préfets avec des possibilités de retrait. Toute chose qui pourrait avoir des conséquences préjudiciables pour les femmes, qui seront plus enfermées dans des situations conjugales oppressives« . Une de nos compatriotes confirmera l’effort de cette association qui lui a permis d’être en situation régulière après des années de tracasserie auprès de la préfecture et une interdiction de séjour sur le territoire français.
Ahmadou Traoré
19 juin 2006
19 juin 2006