Partager

Après Blaise Compaoré du Burkina Faso, Idriss Deby du Tchad, Abdoulaye Wade du Sénégal, Paul Biya du Cameroun, Denis Sassou N’Guesso du Congo Brazaville, Oumar Bongo du Gabon, Abdoul Aziz Boutéflika de l’Algérie, voici Mamadou Tandja qui annonce à son peuple un référendum pour relire la Constitution nigérienne pour lui permettre de se succéder à lui – même. Mais, il est mal parti puisque plus de vingt mille personnes ont manifesté le week – end dernier à Niamey avec un seul objectif : empêcher l’actuel président de rester un jour de plus au pouvoir après un double quinquennat à la présidence de la République.

ATT sera-t-il inspiré par la situation dans ces différents pays pour modifier la Constitution malienne ou la maintenir en l’état ? En tout cas, l’on est fondé à s’interroger si le chef de l’Etat du Mali empruntera le même chemin lorsque sonnera la fin de son second mandat constitutionnel en juin 2012. Plus que jamais le débat est ouvert.

Agé aujourd’hui de 70 ans, le président Tandja, élu en 1999 puis en 2004, a vite fait d’éliminer politiquement son ancien Premier ministre, Hama Amadou, jeté en prison comme un mal propre, pour «  détournements de deniers publics « . Une accusation que le désormais ancien président du MNSD a toujours refutée.

Actuellement, avec les prétentions de Mamadou Tandja, on comprend aisément les vraies raisons de l’incarcération de Hama Amadou. Compétent, charismatique et têtu, celui-ci s’était légitimement mis dans la peau d’un candidat virtuel à la présidentielle de décembre 2009.

C’est pourquoi, Mamadou Tandja l’a «  arbitrairement  » mis en prison depuis six mois. Pour autant, sa tâche n’est toujours pas facile puisqu’il y a des embûches sur le chemin qui conduit au troisième mandat.


Et pour cause
: le parti du président, le MNSD, est actuellement déchiré et au bord de l’implosion entre pro-Tandja et partisans de l’ex-Premier ministre Hama Amadou. De plus, Mahamane Ousmane, président du parlement et chef de la Convention démocratique et sociale (CDS), principal allié de Mamadou Tandja), a appelé au « respect strict de la constitution » et à « une bonne organisation » des élections de 2009.

Un autre allié du régime, Moumouni Adamou Djermakoye de l’Alliance pour la démocratie et le progrès (ANDP) s’est également démarqué de la démarche de Mamadou Tandja. Plusieurs autres partis de la mouvance présidentielle – Rassemblement social et démocrate (RSD), l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS, pro-touareg) et le Rassemblement pour la démocratie et le progrès (RDP) – ont également donné de la voix dans le même sens.

Le principal parti d’opposition, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS) de Mahamadou Issoufou, menace également de provoquer des troubles si jamais les élections ne sont pas organisées aux dates indiquées.


Voilà que Mamadou Tandja est mal parti
. Avec l’annonce du pétrole et l’important gisement d’uranium que recèle le sous- sol nigérien, il entend rester encore au pouvoir. Avec toutes ces désapprobations (une bonne partie de la majorité et l’opposition), on voit mal comment il pourrait organiser ce référendum ? Et même s’il parvenait à le faire comment pourrait -il convaincre le peuple nigérien à voter sa nouvelle Constitution ? En tout cas, s’il réussissait ce challenge, rien ne pourrait l’empêcher d’être réélu à l’infini.


Le Mali n’est pas le Niger.
Mais, nous avons une situation similaire car le mandat du président ATT prend fin en juin 2012. Déjà, des voix s’étaient élevées pour demander un troisième mandat pour le locataire de Koulouba, arguant que le Mali sous ATT avance à grandes enjambées, se modernise et se développe.


Très souvent,
c’est son bilan qui est évoqué pour justifier son maintien aux affaires. Entres autres, les partisans de cette thèse citent les infrastructures routières, les ponts (Gao, 3ème pont de Bamako et les nombreux petits ponts reliant des villages et certains cercles à l’intérieur du pays), le nouvel échangeur de la capitale, l’augmentation et l’aménagement des superficies cultivables, les tours jumelles, le complexe hospitalier de Yirimadjo, le centre commercial de Bamako, le nouvel aéroport hub de Bamako. S’y ajoutent les promesses pétrolières et gazières pour 2009.

Les supporters d’ATT qui souhaitent une modification de la Constitution pour lui permettre de briguer un troisième mandat, estiment  » qu’il doit rester au pouvoir pour achever les chantiers de développement « . En revanche, ceux opposés au tripatouillage de la Constitution, soutiennent que  » nul n’est indispensable et que les cimetières sont pleins d’hommes indispensables ». Pour eux, un homme quels que soient sa compétence, son patriotisme, ne devrait pas dépasser dix ans au pouvoir.

Au Mali, le débat n’est pas réellement engagé parce qu’aucune voix autorisée n’a, jusque là, demandé un troisième mandat pour ATT. Seul le président de l’ADEMA, Dioncounda Traoré, a clairement déclaré que « ATT n’aura pas un troisième mandat « .

Actuellement, il n’y a aucune lisibilité sur la question parce que encore une fois, ni ATT ni un de ses proches n’a souhaité officiellement le déverrouillage de l’article 30 de la Constitution qui limite le mandat présidentiel à deux. Peut – être que le moment n’est pas arrivé. On est bien loin de 2012 alors que le Niger est très proche de décembre 2009.

Le Mali n’est pas le Niger. Et si ATT s’engouffrait dans cette brèche, il est à parier que les principales formations politiques de la majorité (l’ADEMA, l’URD) seraient divisées et les autres partis de la mouvance présidentielle, à n’en pas douter, se mettront derrière ATT comme ils l’avaient fait en 2002 et 2007.

Maintenant, attendons 2011 pour voir clair. Sinon, on pourrait être situé avec le vote de la loi constitutionnelle dont le projet de loi est en préparation au niveau de la Commission Daba Diawara II.

L’Assemblée nationale aura le dernier mot avant le nécessaire référendum pour l’adoption de la nouvelle Constitution.

Vivement donc ce moment ultime !

Chahana TAKIOU

12 Mai 2009