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Avec Alpha Oumar Konaré, M. Goerens a discuté du renforcement de l’architecture de sécurité africaine dont l’idée de base est la gestion par les Africains eux-mêmes des crises sur le continent.

Mais l’Afrique étant pauvre, il revient alors à ses partenaires, qu’il s’agisse de pays ou d’organisations internationales, d’apporter leur appui aux Africains pour leur donner les moyens d’exercer cette responsabilité.

Présentant son rapport à la presse, M. Goerens a signalé que ses conclusions portent sur trois autres points en plus du renforcement de l’architecture de sécurité africaine ; à savoir : le financement des opérations de maintien de la paix sur le continent, le règlement des différentes crises actuelles (Darfour, Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo…) et le trafic des armes légères et de petit calibre.

Ses recommandations seront adressées aux gouvernements de l’Union européenne dans la perspective de l’adoption de la stratégie de partenariat pour l’Afrique lors de la réunion à Bruxelles du Conseil de l’Union européenne les 15 et 16 décembre prochains.

Le rapporteur de l’Assemblée de l’UEO a tenu à souligner la complexité des conflits en Afrique. « N’importe quel pays membre de l’Union européenne sera vraisemblablement dépassé par l’ampleur du défi que représentent la gestion du conflit, le maintien et la consolidation de la paix », a-t-il déclaré avant d’ajouter que l’UA, disposée à traiter les problèmes du continent, doit faire face à des carences graves dans les domaines politique, financier et matériel car, écrit-il dans son rapport « l’absence de financement propre à l’Union africaine est la plus grande contradiction affichée aux attentes qu’elle suscite et au principe de la maîtrise de son développement ».

En effet, l’Union africaine sait que le nerf de la guerre, c’est l’argent. Son budget 2004-2007 s’élève à 570 millions de dollars US par an. Rien que pour la résolution des crises ivoirienne, soudanaise et congolo-rwandaise, le Conseil de paix et de sécurité (CPS) doit engranger 200 millions de dollars, sur les 600 demandés par la Commission de l’UA.

Pour ses opérations de maintien de la paix, un fonds spécial de quelque 63 millions de dollars US, source unique de financement autonome, a été mis en place. Mais il y a une douzaine de millions d’impayés de contributions des Etats membres.

Alors le CPS, dirigé par l’ambassadeur algérien Daid Djinnit a imaginé un financement original. Réduire de 1,5 % l’enveloppe accordée par chaque pays africain par le Fonds européen de développement (Fed).

Résultat immédiat, une économie de 126,4 millions d’euros ont pu être dégagés « côté africain » tandis que du « côté européen » ce sont pas moins de 123 millions et demi venant d’autres fonds du Fed qui n’ont pas été attribués qui sont venu s’y ajouter.

La facilité de paix pour l’Afrique est donc à ce jour dotée d’un budget de 250 millions d’euros. Le programme est destiné à financer les opérations de maintien de la paix conduite par la Commission de l’UA.

Toutefois, il demeure la difficulté administrative des décaissements. La bureaucratie de la Commission de l’UE et la complexité des droits d’éligibilité à ces mêmes fonds entraînent que « ces fonds circulent dans de longs tuyaux » avant d’arriver dans les caisses du CPS un véritable engloutisseur.

A la date d’octobre dernier, il ne restait que 8 millions seulement dans les caisses de cet instrument que qualifie le rapporteur européen de « référence incontournable ». Les questions de sa ré-alimentation restent en suspens et le haut représentant de l’UE Javier Solana déclare à son sujet que « la nature propre à la facilité rendait sa ré-alimentation difficile ».

Mais « une stratégie financière à long terme pour le soutien des missions de maintien et de consolidation de la paix conduites par les Africains doit songer à développer des instruments indépendants (le mot est souligné par M. Goerens) des fonds prévus pour l’aide au développement officielle ».


O. Diagola
(Paris)

10 novembre 2005.