Ces propos sont de Peter Mandelson, Commissaire européen au commerce à l’occasion de la conférence de presse sur le coton animée hier à l’Hôtel Kempinski. On notait la présence des membres du gouvernement Choguel K. Maïga, Seydou Traoré, Ousmane Thiam et d’autres personnalités dont plusieurs ministres du Commerce des pays ACP et de Mme Irène Jorejs.
La Banque mondiale estime que ces politiques de soutien réduisent le prix mondial de quelque 10 à 15%. Et, à présent, nous assistons probablement à la chute la plus forte de ces prix en termes absolu depuis 1985. Le commissaire européen au commerce a déjà effectué une visite de terrain dans des usines d’égrenage du Mali.
C’est ainsi qu’il dira : « J’ai été. J’ai vu. Et je suis maintenant déterminé à agir ».
Mon engagement est de vous offrir mon soutien. Je veux travailler avec vous pour résoudre cette crise. Je veux aussi travailler avec les autres nations riches qui contribuent à vos problèmes, principalement les Etats-Unis, dans un esprit de sens commun et d’harmonie, pour trouver des solutions qui sont dans l’intérêt de tous.
Les problèmes que vous avez ne sont pas le résultat d’un calcul délibéré. Ils sont la conséquence intentionnée de l’action des gouvernements des parties riches du monde pour défendre ce qu’ils croient être les intérêts légitimes de leur population. Ils peuvent avoir tort, mais ce ne sont pas des actes délibérément injustes. C’est seulement grâce au pouvoir d’arguments logiques et d’une persuasion pacifique digne que, vous et moi, pouvons faire des progrès pour vos citoyens qui en ont désespérément besoin.
Il a martelé que deux à trois millions de producteurs et à peu près 15 millions de personnes dépendent, directement ou indirectement, du coton. Il représente entre 30 et 40% des revenus à l’exportation du Bénin, du Burkina Faso, du Tchad et du Mali. Derrière ces chiffres se cache la vie d’hommes et de femmes dont l’existence et le bien-être dépendent, directement ou indirectement, du coton. Dans les conditions actuelles des marchés, cette dépendance est une cause de précarité et de pauvreté pour les familles comme pour les communautés entières.
Améliorer la situation du coton n’est peut-être pas, en fait n’est pas, une solution pour les problèmes complexes de ce vaste continent africain. Et personne ne doit donner une impression autre. Mais le coton est crucial pour ce coin du continent. Et c’est un domaine où des actions pour corriger les distorsions commerciales peuvent avoir un impact mesurable sur la vie des gens.
Mais le temps ne joue pas pour nous. L’effondrement actuel des prix menace le futur de votre industrie. Ainsi, vous ne pouvez pas vous permettre d’attendre alors que les discussions à Genève avancent lentement vers une conclusion. Vous ne devez pas être gardés en otage de la résolution d’autres personnes et problèmes dans le cycle mondial du commerce. Il est vital de traiter de cette question aujourd’hui.
REMARQUES
Le commissaire européen au commerce a fait des remarques qui s’articulent en trois parties.
Premièrement, l’Europe ne peut pas appeler à une action du reste du monde si l’Europe ne réussit pas elle-même à mettre sa maison en ordre.
Deuxièmement, à partir d’aujourd’hui, dans tous les forums dont l’objet est de faire progresser les négociations du Cycle de Doha, l’Europe va faire pression pour une action multilatérale pour construire un système réglementé plus juste, qui permette plus d’équité et de prévisibilité pour le marché du coton. En particulier, je vais appuyer un plan qui assure que le secteur du coton bénéficie immédiatement de mesures, dès la signature de l’Engagement Unique qui va conclure le cycle de Doha, plutôt que d’attendre des années de mise en oeuvre.
Troisièmement, je vais expliquer, au nom de mon collègue Louis Michel, une nouvelle politique de l’UE pour étendre l’assistance au développement du secteur coton.
POLITIQUE EUROPEENNE DU COTON
L’UE produit du coton mais comme vous le savez l’UE est un acteur relativement mineur sur les marchés internationaux du coton. Notre production représente seulement une part marginale de la production mondiale de coton – environ 2%. Cette relativement faible production explique que nous n’influençons pas les prix sur le marché international. L’UE ne fait pas de dumping de sa production de coton sur le marché international via un soutien à l’exportation puisque nous ne procurons aucun soutien à l’exportation, a-t-il ajouté.
Parmi les nations riches, l’UE a montré le chemin en réduisant les distorsions commerciales. L’année dernière les ministres européens ont approuvé une réforme fondamentale de notre régime coton interne qui réduit significativement les subventions ayant un effet de distorsion sur les échanges. A partir de 2006, 65% des subventions que l’UE octroient aux producteurs de coton ne seront plus liés à la quantité qu’ils produisent. Le résultat sera que les agriculteurs européens produiront moins de coton. L’opportunité pour l’Afrique de l’Ouest de vendre plus de coton en Europe sera augmenté.
Il a affirmé que le futur du coton est maintenant définitivement à l’agenda des ministres du commerce de la planète. Je me dois de donner du crédit lorsque le crédit est dû. C’est le résultat de l’initiative coton présentée à l’OMC par le Bénin, le Tchad, le Burkina Faso et le Mali. Cela montre que les pays en développement, quel que soit leur poids économique, peuvent avoir une voix significative dans les négociations de l’OMC. En restant accrochés à vos armes, vous êtes devenus des acteurs centraux du débat. Grâce à votre persévérance et à votre détermination, la question du coton n’a pas pu être mise à l’écart de l’Accord Cadre du 1er août de l’année dernière.
Il a rappelé ce à quoi le monde s’est engagé l’année dernière : <
En face de l’épreuve douloureuse vécue par les pays africains producteurs du coton, l’UE est maintenant prête à faire une exception pour ces pays vulnérables dans ce secteur particulier. Notre point de départ doit être que le secteur du coton en Afrique est dans une crise profonde. Cette crise a un impact sur des pays qui sont parmi les plus pauvres du monde.
APPEL DU COMMISSAIRE AUX AUTRES SUBVENTIONNAIRES
Par la voix de son commissaire, l’UE appelle aujourd’hui les autres membres de l’OMC à progresser plus vite (fast track) dans le coton pour chacun des, ainsi dénommés, trois piliers de la négociation agricole : l’élimination de toutes les formes de subventions à l’exportation ; des progrès pour accorder l’accès aux marchés en franchise de droits et sans contingentement pour les importations agricoles sauf de la part des pays en développement qui nécessitent un traitement spécial et différencié est justifié ; et la réduction des soutiens domestiques ayant des effets de distorsion des échanges.
Pour chacun des trois piliers, l’UE appelle aujourd’hui le monde pour atteindre le niveau d’ambition auquel il s’est engagé en août dernier et accepte que ces engagements prennent effet immédiat dès le premier jour de l’entrée en vigueur de la signature de <
L’ASSISTANCE AU DEVELOPPEMENT
Le commissaire européen au commerce a affirmé que de meilleures opportunités pour emporter ne sont pas suffisantes pour régler les problèmes. Le commerce libre n’est pas la panacée ou une recette magique. Il a rappelé que la commission européenne a accordé des ressources additionnelles de 310 millions d’Euros pour la programmation au développement des quatre pays à l’origine de l’initiative coton.
Un programme international de renforcement des capacités pour les produits de base agricoles, doté d’un budget de 45 millions d’Euros, avec 15 millions d’Euro spécifiquement sur le coton.
Les ministres Maïga, Traoré et Thiam se sont tous réjouis des propositions du commissaire européen au commerce. Choguel Maïga dira que le changement de position de l’UE est très important sur le plan politique, car les autres pays qui hésitent encore pourront la suivre.
L’initiative a été vivement saluée par les cotonculteurs présents dans la salle et ils ont demandé au commissaire de transformer les propos en actes concrets.
Mamadi TOUNKARA
20 avril 2005