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La formule fait toujours recette comme le prouve l’engouement qu’elle suscite auprès des journalistes.

Comme les autres années, le milieu de la presse était fortement représenté hier à Koulouba à l’occasion du premier anniversaire de l’investiture du président Touré pour un second mandat : patrons de presse, responsables des institutions de régulation de la presse et d’associations de médias, chargés à la communication dans les départements ministériels, journalistes de la presse internationale.

La rencontre s’est déroulée en présence du Premier ministre Modibo Sidibé, de certains membres du gouvernement, dont le ministre de la Communication et des Nouvelles technologies, Mme Diarra Mariam Flantié Diallo. Les responsables du cabinet du président de la République étaient également présents.

C’est dans la salle de banquet du palais présidentiel qui avait comble que le chef de l’État a introduit les débats par un exposé liminaire dans lequel il a brossé la situation générale du pays. Les reformes en cours, la cherté de la vie, l’école, la lutte contre la corruption, la situation dans le nord-est de la Région de Kidal, voilà les principaux sujets abordés.


Des réformes indispensables.

Comme d’habitude, le chef de l’État a voulu cette rencontre très détendue et il n’a pas manqué de taquiner certains confrères dans le style qui lui est propre et qui crée une grande complicité entre lui et les hommes de média. Tout au long de la conférence de presse, le président Touré n’a occulté aucun sujet.
« Nous respectons une tradition, a-t-il introduit.

Je peux dire que cette invitation n’est pas a proprement parlé une conférence de presse. Je la considère plutôt comme espace d’échanges avec les relais de l’opinion que vous êtes. C’est l’occasion pour moi de saluer et remercier la presse internationale et nationale qui ont tenu à participer à cet exercice. Nous allons parler de nos difficultés, mais parler aussi de nos réalisations.

Nous allons aussi nous attarder sur nos échecs, les analyser et trouver des perspectives. Dans le cadre du PDES nous évoquerons bon nombre de reformes indispensables au développement de notre pays. Et tous les secteurs d’activités sont ces par ces nouvelles dynamiques« .

Parlant d’abord des reformes, le président de la République a cité la commission de réflexion sur les textes fondamentaux, la relecture du code de la personne et de la famille, l’organisation des états généraux de la sécurité routière, ceux programmés sur la corruption et la délinquance financière, la création du Conseil supérieur de l’éducation, celui de l’Agriculture.

Les reformes concernent aussi la sécurité sociale avec la mise en place de l’assistance judiciaire en faveur de tous les justiciables et de l’assurance maladie obligatoire qui sera soutenue par la création d’un fonds.

Autres initiatives majeures : le projet de création d’une Autorité de régulation des marchés publics, l’adhésion de notre pays au Mécanisme africain d’évaluation des pairs (MAEP).

15 Points exécutés sur 18.

La crise scolaire et la situation dans une partie de la Région de Kidal ont été les sujets les plus évoqués. Concernant la seconde question, le chef de l’État est revenu sur le choix qu’il a fait de privilégier le dialogue. « L’Accord d’Alger et le Pacte national restent les seuls cadres de règlement du problème« , a-t-il dit. Dans cet esprit tout est négociable. Sauf l’unité nationale et l’intégrité du territoire.

« Ces accords, a-t-il poursuivi sont les seuls instruments de négociations et tous ceux qui veulent les rompre ou les renier sont considérés comme des bandits et seront traités en conséquence comme tels. Nous avons toujours privilégié la voie du dialogue pour gérer la situation, mais apparemment Bahanga et ses camarades ne sont pas sensibles à cette disponibilité« .

Rejetant les accusations de certains insurgés prétendant que le gouvernement n’applique pas les dispositions de l’Accord d’Alger, le président de la République a révélé que les 18 points contenus dans l’Accords, 15 points ont été déjà appliqués et les trois autres restants sont en cours d’exécution.

Dans tous les cas, si le gouvernement privilégie toujours le dialogue, les forces armées et de sécurité poursuivront leur mission de défense de l’intégrité territoriale du pays et de sécurisation de toutes les populations. L’armée répondra donc désormais à toutes les provocations.

L’attaque et la destruction de la base logistique de Bahanga intervenues la semaine dernière (voir article en page 4) s’inscrit dans ce sens.

Répondant à une question relative à la présence de réfugiés maliens au Burkina Faso, Amadou Toumani Touré a dit que pour le moment, rien n’indique au gouvernement qu’il s’agit de personnes qui auraient effectivement fui de chez eux pour des raisons de sécurité. « Certains veulent faire de la délation en prétextant que l’armée fait des exactions sur les populations.

C’est loin d’être vrai. D’ailleurs ceux qui combattent nos forces ont leurs familles qui vivent dans les villes. Nous protégeons ces populations et leurs biens comme cela est de notre devoir. Nous avons une armée responsable et foncièrement républicaine« , a dit le chef de l’État.

Il a reconnu que sa démarche reste toujours incomprise d’une grande partie de la population. « Mais je préfère être incompris que de lancer notre pays dans une aventure« , a-t-il poursuivi.

Les nouvelles nominations intervenues au sein de la hiérarchie des forces armées et de sécurité (voir l’Essor du vendredi) ont-elles un rapport avec la situation dans la Région de Kidal ? Pas du tout, a répondu le président Touré. Ces changements d’hommes répondent à un principe d’alternance.

« Il y a dans l’armée ce qu’on appelle le temps de commandement. Vous quittez une fonction après une certaine durée pour permettre à d’autres de faire prévaloir leurs compétences.

Il ne s’agit point des désaveux pour les anciens titulaires de ces fonctions. Au contraire, je profite de l’occasion pour les féliciter et les remercier pour tous les services qu’ils ont rendus au cours de leur commandement« , a spécifié le chef suprême des armées.

Des soubresauts récurrents.

Abordant la question de la vie chère, le président de la République, a évoqué les mesures prises par l’État pour soulager les populations. Ainsi les exonérations accordées sur l’importation de certains produits ont coûté plus de 18 milliards au Trésor public en 2007. Plus de 200 millions de subventions ont été accordés aux bouchers pour maintenir les prix de la viande à un niveau abordable.

Les tarifs d’eau et d’électricité restent bloqués depuis 2003 alors qu’ils auraient dû être quadruplés aujourd’hui. Cela coûte 12 milliards Fcfa par an à l’État qui supporte les pertes de l’Énergie du Mali.

De juin 2007 à avril 2008, l’État a renoncé aux taxes sur les produits pétroliers pour 27 milliards Fcfa. Il y a aussi l’augmentation des salaires de 5 % à partir de janvier 2008 et janvier 2009.

Sans compter la réduction de l’impôt sur les traitements et salaires de 20%.
Le président de la République a aussi souligné que la masse salariale est passé de 97 milliards Fcfa en 2002 à 168 milliards aujourd’hui.

Concernant l’école, il annoncé l’inauguration prochaine des locaux de deux nouvelles facultés, la création d’une nouvelle université et d’une bibliothèque universitaire. Tout cela n’est qu’une petite partie des gros efforts fournis en faveur du secteur de l’éducation qui se taille aujourd’hui la part du lion dans le budget d’État.

« Jamais autant d’efforts financiers n’ont été faits en faveur de l’école. Mais jamais, les soubresauts qui la secouent n’ont été aussi récurrents« , a déploré le chef de l’État.

Ne fallait-il pas tout faire pour que les enseignants de la Coordination des syndicats de l’enseignement secondaire (COSES) participent aux évaluations ? Ce serait l’idéal, a reconnu le président Touré, en regrettant l’attitude intransigeante de ce syndicat.

« Nous avons fait beaucoup d’efforts de médiation qui sont restés vains. Nous sommes même sortis du cadre classique de négociation. Des mères de familles, des personnes âgées et d’autres personnes de bonne volonté sont ainsi allées rencontrer le syndicat pour sauver l’année scolaire.

Nous ne pouvons pas accepter qu’un groupe de personnes prennent nos examens en otage« , a ajouté Amadou Toumani Touré qui s’est réjoui de la tenue des examens d’entrée en 7è. Le DEF et le bac seront bien organisés. Le gouvernement reste toujours à l’écoute des enseignants pour un dialogue constructif.


Une autre vie.

S’agissant de la lutte contre la corruption et la délinquance financière, le président Touré a indiqué que le combat est résolument engagé. L’institution du Vérificateur témoigne entre autres preuves de cette volonté politique forte. Mais la lutte se fera sans tambour ni trompette. Elle sera menée dans le respect de la dignité et de l’honneur des responsables mis en cause. « Ce n’est pas une soirée de gala », a-t-il précisé.

Interrogé sur la polémique qui a lieu dans la presse sur la nécessité de déverrouiller la Constitution pour offrir la possibilité de faire plus de deux mandats à la tête de l’État, Amadou Toumani Touré a été on ne peut plus clair : ce débat ne le concerne pas. « Je ne rentrerai pas dans ce débat. J’aimerai avoir une autre vie après toutes ces épreuves« , a-t-il dit.

Il a été également question de la dette du pays. Le chef de l’État n’avait pas été interrogé sur ce sujet, mais il a tenu à donner des éclairages à ce propos. A la date du 31 décembre 2007, l’encours de la dette extérieure se chiffrait à 689 milliards Fcfa.

Ce qui représente 20 % du PIB du pays alors que le ratio autorisé par l’UEMOA va jusqu’à 70% du PIB. Toutes les échéances sont dûment payées, a assuré le président Touré. Dans le cadre de l’initiative du G-8 en faveur de l’annulation de la dette des pays pauvres, le Mali a bénéficié d’une remise de dette de 1085 milliards Fcfa.

Quant à la dette intérieure, à la date du 5 juin 2008, elle se chiffrait à 80,5 milliards Fcfa. Le créanciers sont les banques, les opérateurs économiques et les sociétés minières. Et là aussi, le pays reste largement dans les normes fixées par l’UEMOA.

M. N. TRAORÉ

09 Juin 2008