Partager


Le 10 Février 2008, les lampions se sont éteints sur la CAN 2008 au Ghana. Mais cette CAN aura été marquée par un nombre élevé d’entraîneurs étrangers -plus particulièrement européens- qu’on a nommés“ les sorciers blancs du football africain”.

Parmi les entraîneurs des 16 équipes présentes à la CAN, 12 viennent de l’étranger, et 4 sont Africains : on les appelle communément“les locaux” . Et parmi ces 12 entraîneurs étrangers figurent 8 Français, 3 Allemands et 1 Sud-Américain.

Pourtant, celui qui a remporté le trophée de la CAN est un entraîneur africain, et un entraîneur… local, de surcroît. Aussi, la grosse question qui se pose aujourd’hui est celle-ci : pourquoi l’Afrique continue-t-elle d’accorder autant d’intérêt pour les entraîneurs étrangers en général, et européens en particulier?

La mode des “sorciers blancs”

De l’avis de tous les observateurs avertis de la scène footballistique, cet intérêt est du au fait que la plupart des équipes nationales sont composées de joueurs évoluant dans des clubs européens.

En plus, sachant qu’aujourd’hui, le football est devenu une affaire de business, les Européens sont obligés de faire la promotion de leurs compatriotes en Afrique, où le marché européen est saturé. Ainsi, une équipe africaine essentiellement composée de joueurs évoluant en Europe ne peut convenablement travailler, si son entraîneur n’est pas européen.

Mais d’autres observateurs évoquent aussi cette facilité que les entraîneurs européens entretiennent avec leurs homologues des clubs employeurs africains. Ce qui est du au fait que ces homologues constituent de véritables “chercheurs” de nouveaux talents en Afrique. C’est pourquoi il n’est pas rare qu’après chaque phase finale d’une compétition internationale africaine (CAN), beaucoup de joueurs africains affluent vers l’Europe.

C’est que les statistiques ont toujours démontré qu’une fois que l’entraîneur est local, c’est la croix et la bannière, pour les clubs étrangers, d’obtenir des joueurs africains. A condition que cet entraîneur local accepte les caprices et le bon vouloir des entraîneurs des clubs employeurs européens…

D’autre part, il y a surtout cette entraide et cette solidarité entre les entraîneurs européens, où qu’ils se trouvent. L’essentiel pour eux, c’est de vendre l’image de leur pays en Afrique: une Afrique devenue ainsi une terre de consommation sportive en tous genres.

La présence des entraîneurs français en Afrique, qui est la plus forte, s’explique tout simplement par le fait que, soit la plupart des joueurs africains évoluent dans le championnat français, soit ils sont formés par des entraîneurs français.

Partant de ce principe, on voit mal un entraîneur français refuser de rendre service à un Claude Leroy ou à un Henri Michel, entre autres… D’ailleurs cette solidarité des “sorciers français” explique bien la présence de plus en plus rare d’entraîneurs allemands, espagnols ou autres, sur le terrain sportif africain.

Pour que l’Afrique puisse donc maintenir ses grands joueurs sur son sol, ses responsables sportifs doivent beaucoup miser sur leur formation à la base et leur créer des conditions idoines pour qu’ils restent.

Mieux, ils doivent trouver les moyens de dissuader les talents sportifs africains à “immigrer” vers l’Europe ou des pays autres que l’Afrique. Bref, les responsables sportifs africains doivent faire en sorte que ces jeunes talents sportifs “immigrants “ n’aient aucune envie de partir vers des cieux autres que l’Afrique. Ce qui n’est guère une mince affaire…

Le cas de Hassan Shehata

Quel qu’il en soit, l’exemple égyptien (avec son entraîneur “local” ) doit être non seulement encouragé, mais suivi. En effet, le cas de l’entraîneur égyptien, Hassan Shehata, vient de prouver qu’avec une ferme volonté, on peut réussir avec brio.

Sur les 23 joueurs égyptiens de la CAN, 5 à 6 seulement évoluent en Europe. C’est le même cas, pour l’équipe angolaise. Quant au Soudan et à la Zambie, leurs joueurs évoluent en Afrique, dans leurs propres pays.

Hassan Shehata est celui qui est désormais entré dans l’histoire du football africain, d’abord en remportant la CAN en tant que joueur, puis en tant qu’entraîneur, à deux reprises. Il vient ainsi d’administrer la preuve que seuls le travail et la bonne organisation sont payants.

Pour atteindre de bons résultats

Au cours de cette CAN 2008, ces entraîneurs et joueurs africains ont tout été, sauf ridicules. C’est dire donc que pour atteindre les résultats escomptés, il faut seulement un peu de motivation et un minimum de conditions. Il s’agira également d’assister et aider les entraîneurs locaux, avec des stages de formation et de perfectionnement dans de grandes écoles sportives.

Par ailleurs, le cas des Aigles du Mali (avec Amadou Sidibé et Souleymane Dembélé) a impressionné plus d’un. Ce qui procure quelque peu du baume au coeur, en dépit de l’élimination prématurée des Aigles.

Sur le plan du foot africain, tant qu’il y aura de l’amateurisme et de la désorganisation, nos équipes nationales continueront à faire appel à des entraîneurs étrangers.

L’autre réalité est que beaucoup d’Africains expliquent la présence des “Sorciers Blancs“ (les entraîneurs étrangers) par le fait que dans la plupart des pays africains sévit le manque d’unité, d’entente et de cohésion.

L’égoïsme, la méchanceté, et surtout, les inutiles rivalités internes, entre entraîneurs locaux et entre joueurs eux-mêmes…, autant de maux qui constitue un frein, sinon un étau, à une vraie promotion du sport.

Du reste, on a pu le constater chez certains pays présents à la CAN, dont le Mali.


Sadou BOCOUM

Soir de Bamako du 12 février 2008.