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En effet, les
formations politiques ont été superbement ignorées
dans les correctifs apportés à l’équipe
gouvernementale. Le comportement peu loyal de certains
partis à l’approche de la présidentielle de 2007
serait-il à l’origine de cette méfiance de Koulouba
vis-à-vis des politiques ?

Lors de sa conférence de presse du 8 juin, le
président ATT ne s’était guère montré favorable à
l’idée d’un remaniement ministériel en profondeur. “Je
ne peux pas me permettre de jouer avec les
gouvernements. Le gouvernement n’est pas responsable
des difficultés actuelles.

Toutefois, il y a des
correctifs à faire et on va les faire”, avait-il
annoncé. Nonobstant cette réticence et cet
avertissement du chef de l’Etat, nombre de personnes y
compris les hommes politiques se sont attendues à un
changement en profondeur de l’attelage gouvernemental.

Ce qui fait qu’aujourd’hui encore le réaménagement
technique effectué suscite beaucoup de commentaires.
C’est que ces retouches au gouvernement sont
intervenues dans un contexte de vives tensions entre
ATT et certaines formations politiques qui, s’étant
senties frustrées voire lesées par le consensus
politique, avaient ces derniers temps chauffé à blanc
le paysage politique.

Tant et si bien que le chef de
l’Etat dut les rappeler à l’ordre à l’occasion de la
célébration du 8 juin en ces termes : “le consensus
politique n’est pas une camisole de force. Les partis
qui ont un autre agenda peuvent partir et me laisser
assumer le reste du mandat. Je comprends que certains
veuillent se démarquer.

Mais il ne faut pas attendre
la fin pour partir”. Ces propos du chef de l’Etat
auront été une véritable Epée de Damoclès sur la tête
de certains partis politiques comme le RPM.

En effet, le parti du Tisserand s’était senti
directement visé par le remaniement ministériel
annoncé. Bien que le président ATT ait affirmé n’avoir
pas encore toutes les cartes en main pour opérer un
changement en profondeur, le RPM s’inquiétait de voir
ses ministres débarqués.

Mais le “Tsunami politique”
censé emporter les ministres RPM n’a pas eu lieu au
grand soulagement des Tisserands. Ce qui fera dire à
certains que la montagne a accouché d’une souris.

Par ailleurs, des forces politiques très proches de
Koulouba étaient impatientes d’intégrer l’équipe
gouvernementale à la faveur de ce réaménagement
technique.

Celles-ci sont aujourd’hui surprises et
écoeurées de voir le président ATT poursuivre son
mandat avec des fauves politiques prêts à lui sauter à
la gorge en 2007. Restées longtemps sur le banc de
touche, elles ne comprennent guère que leur “homme”
les maintienne encore dans une telle position à
quelques encablures de 2007.

Faudra-t-il donc attendre
que le tour soit joué pour qu’on leur fasse appel ? La
frustration de ces forces politiques proches de
Koulouba est d’autant plus grande qu’elles se sentent
spoliées de leur place au profit de leurs adversaires
politiques de demain, et ce, en dépit de leur loyauté
et de leur fidélité sans faille.

Combien de temps
faudra-t-il encore attendre, s’interrogent-elles, pour
que le chef de l’Etat ait toutes les cartes en main et
mette un terme à tant de frustrations ?

Et le PARENA dans tout ça ? Est-on tenté de
s’interroger. Comment le parti du Bélier blanc a-t-il
accueilli le départ de son unique ministre ? Joint par
nos soins, le chargé de communication du parti
Djiguiba Kéïta dit PPR a simplement laissé entendre
que le PARENA a pris acte du départ de son ministre.

Il s’est bien gardé de s’étendre sur un sujet aussi
délicat et a soigneusement évité de fustiger
l’attitude du président de la République. Mais le
parti de Tiébilé Dramé ne fait-il pas contre mauvaise
fortune bon coeur ?

Il a été, on se le rappelle, exclu
du gouvernement d’Ag Hamani I et II pour sa très
faible représentativité à l’Assemblée Nationale.
Mauvaise stratégie électorale ou accident de parcours
? Toujours est-il que le parti est sorti presque
bredouille lors des dernières législatives (1député.)

A cause de ce fiasco électoral grave, le PARENA a
assisté pendant longtemps impuissant au partage du
gâteau du pouvoir. Ce n’est qu’avec la nomination de
l’actuel Premier ministre M. Ousmane Issoufi Maïga
qu’il a pu souffler un peu.

Enfin, un jeune cadre du
PARENA venait d’être propulsé au département de la
Jeunesse et des Sports en la personne de Moussa Balla
Diakité. Un portefeuille d’autant plus méritoire que
le parti demeure quand même un poids moyen du paysage
politique.

Son absence au gouvernement était d’autant
plus injustifiée que des micros-partis, qui avaient
par miracle obtenu quelques députés aux législatives
passées, persistent encore au gouvernement malgré le
départ de leurs élus. Cette présence du parti du
bélier blanc au gouvernement avait quelque peu amorti
sa descente aux enfers amorcée depuis les législatives
passées.

Avec le réaménagement ministériel du lundi dernier,
cet ultime espoir vient de s’envoler. Une lueur vient
de s’éteindre au PARENA. Le coup est d’autant plus dur
à encaisser que le ministre PARENA a été balayé au
profit d’un ministre sans coloration politique.

Et
dire qu’il n’y a pas si longtemps, le parti de Tiébilé
Dramé s’était associé à d’autres formations politiques
pour dénoncer la banalisation du pouvoir par la
nomination d’illustres inconnus à des postes
ministériels.

Toute chose qui fait que malgré son
apparente sérénité, le parti pourra digérer
difficilement son départ du gouvernement. A moins que
le chef de l’Etat ne comble le vide laissé par le
départ du Dr Moussa B Diakité par la promotion
d’autres cadres du parti.

Et que dire alors de l’Union pour la Démocratie et le
Développement (UDD) ? Nommée sous les couleurs de
l’UDD, l’ex-ministre de la Promotion de la Femme, de
l’Enfant et de la Famille Mme Berthé Aïssata Bengaly
avait par la suite rallié le Mouvement Citoyen. Le
parti de la Colombe, qui avait dénoncé l’attitude de
la ministre, espérait secrètement qu’à la sortie de
celle-ci du gouvernement, le président ATT allait faire
appel à un autre cadre UDD pour la suppléer. Mais mal
lui en prit.

Car si le parti a pu se réjouir du départ
de la ministre, il n’en demeure pas moins qu’il est
resté sur sa faim quant à son remplacement. Loin de
regarder à nouveau du côté de l’UDD, Koulouba a
préféré réserver ledit portefeuille à l’ex-ministre de
l’Emploi et de la Formation Professionnelle Mme Diallo
M’Bodji Sène.

L’UDD, qui a également perdu son unique
député, vient ainsi de se voir barrée pour de bon la
route du gouvernement. Comme quoi, le parti de Me
Hassan Barry peut continuer sa descente aux enfers.

Ainsi qu’on peut le constater, aucun des deux
ministres qui viennent d’intégrer le gouvernement n’a
une coloration politique. Cet état de fait traduit-il
la méfiance de Koulouba vis-à-vis des partis
politiques ?

En tout cas, le consensus politique de
façade d’aujourd’hui n’est pas de nature à encourager
le chef de l’Etat à recourir aux partis politiques
pour apporter des correctifs à l’équipe
gouvernementale.

Ce, d’autant que certains partis qui
l’accompagnent ont déjà montré des signes patents de
découragement et dont il n’arrive pourtant pas à se
débarrasser. Obnibulés par 2007, les partis politiques
pourront difficilement se consacrer à l’action
gouvernementale.

Cependant, ce réaménagement ministériel risque de
relancer le débat sur la marginalisation des partis
politiques dans la gestion des affaires publiques.

Mais Koulouba peut-il continuer à faire aveuglément
confiance aux partis politiques alors que certains
d’entre eux sont en campagne électorale prématurée ?

Samou KONE

24 juin 2005