La crise de l’école malienne est l’un des éléments moteurs de la chute de la dictature militaire en 1991 et de l’avènement de la troisième République. Le développement de la scolarisation est très vite affiché comme une priorité nationale par le nouveau gouvernement. Cet objectif nécessite cependant bien plus que des ajustements tant les contraintes sont fortes : déséquilibres structurels considérables, attentes sociales fortes, moyens limités et contraintes de l’Ajustement Structurel.
Deux principaux chantiers seront engagés : d’une part la création d’une université du Mali, d’autre part, la réorganisation de l’enseignement, en s’appuyant sur l’enseignement privé et la mobilisation des communautés locales.
La création de l’université
L’université du Mali a ouvert ses portes en novembre 1996 comme université de Bamako, en s’appuyant sur les grandes écoles existantes. Elle compte aujourd’hui 40 000 étudiants.
Destinée à se développer, elle réunit actuellement neuf facultés, instituts et grandes écoles qui sont : la Faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Ondoto-Stomatologie (FMPOS), l’Institut Polytechnique Rural de Formation et de Recherche Appliquée (IPR-IFRA) ; l’Institut Supérieur de Formation et de Recherche Appliquée (ISFRA), l’Institut Universitaire de Gestion (IUG), l’Ecole Normale Supérieure (ENSUP) et l’Ecole Nationale d’Ingérieur (ENI).
La nouvelle école
Les structures scolaires existantes et le budget de l’Etat n’étant pas de taille à apporter un véritable développement de la scolarisation, les acteurs de la société civile sont mis à contribution. L’enseignement privé qui s’exerçait jusqu’alors dans un flou institutionnel sans réglementation précise, est reconnu en juillet 1994.
Les établissements d’enseignement privé peuvent désormais conclure des conventions particulières avec l’Etat et bénéficier le cas échéant, d’un soutien pour l’acquisition de terrains pour la réalisation d’infrastructures scolaires.
Plus généralement, l’Etat s’engage à mettre à la disposition des partenaires de l’école, selon ses possibilités, des moyens financiers, humains et matériels ; il veille sur les programmes sur l’organisation des examens, sur le contrôle, le respect des normes légales par les écoles et établissements privés. Les frais de scolarité sont libres dans le privé, l’enseignement public restant intégralement financé par l’Etat.
Les écoles communautaires sont une composante essentielle du dispositif de refondation du système scolaire. Ces écoles privées gérées et financées par les communautés, notamment villageoises ou des associations bénéficient de la reconnaissance et du soutien (matériel, scolaire, soutien pédagogique, formation des enseignants) de l’Etat dans le cadre d’une réglementation particulière.
Elles jouent un rôle essentiel dans la relance de la scolarisation des enfants en milieu rural. Relevant de l’initiative et de la responsabilité des communautés, mises en oeuvre dans un contexte de décentralisation et de climat politique apaisé, elles permettent aux populations de réinvestir le projet d’école et sont largement adoptées en dépit de leur coût, largement assumé par les familles.
Ces nouvelles écoles offrent par ailleurs un débouché aux jeunes diplômés revenus au village et contribuant ainsi à une revalorisation de l’investissement éducatif. La nouvelle politique de scolarisation a porté ses fruits et on assiste à une véritable explosion de la scolarisation au courant des années quatre vingt dix.
Au sein des générations atteignant l’âge de scolarité en 1998, la moitié des garçons et plus d’un tiers des filles entrent à l’école, contre respectivement un tiers et un cinquième dix ans plus tôt. La scolarisation dans le secondaire connaît, partant d’un niveau bien plus bas, une augmentation tout aussi considérable, à la fin des années quatre-vingt dix, un cinquième des garçons et un dixième des filles, soit des valeurs deux fois plus élevées qu’en 1990.
La vision du PRODEC
La politique de l’éducation se poursuit depuis 1998 dans le cadre du Programme Décennal de Développement de l’Education (PRODEC), mis en oeuvre avec l’appui de la Banque Mondiale. Ce programme a pour missions de restructurer le système éducatif en améliorant l’accessibilité à l’éducation de base, la qualité de l’enseignement à tous les niveaux, la capacité de gestion du système et le développement de l’alphabétisation.
L’objectif est d’atteindre un taux de scolarisation de 75% en 2008 (70% pour les filles, 95% en 2010, et, à plus long terme, d’assurer l’enseignement secondaire à 65% des titulaires du DEF. Ce projet s’appuie sur une politique d’investissement, en terme d’infrastructures scolaires et de formation des enseignants et sur la poursuite d’une politique de soutien à l’enseignement privé, notamment par le développement des écoles de villages.
Une réorganisation du programme scolaire était prévue avec une réduction à 8 ans (au lieu de 9 actuellement) des deux cycles de l’enseignement fondamental, une augmentation du volume horaire de l’enseignement de l’anglais et l’introduction de la langue maternelle des élèves de la 1ère année à la 4ème année pour une meilleure adaptation de l’école aux réalités socio culturelles des enfants.
Le constat qui se dégage de la mise en oeuvre du PRODEC souligne que des progrès tangibles ont été réalisés mais que certains points clés tels que la réduction du cycle et l’introduction des langues maternelles sont à la traîne.
Les défis restent importants
Si la poursuite du développement de la scolarisation est un enjeu majeur pour les années à venir, d’autres défis sont à relever en matière de traitement des inégalités d’accès à l’école mais aussi de contrôle de la qualité des enseignements dispensés et du niveau des diplômes délivrés.
Les enseignants, par le canal de leurs syndicats, dénoncent le désengagement de l’Etat du secteur de l’éducation, ce qui se traduit par la multiplication des établissements privés qui détiennent plus de 70% des élèves du secondaire.
Mamoutou DIALLO
04 Février 2009