La présente note se veut un résumé très sommaire de notre tâche, afin de faire connaître une infime partie de l’immense savoir-faire de notre pays. Dans le cadre de ce condensé, nous vous parlerons pèle-mêle de notre vision sur le grand pays de mes chers cousins, les Dogons dont je loue le savoir au passage.
Encore un cri de cœur
Encore une fois, sachons qu’une saine et scientifique valorisation et restauration de notre patrimoine culturel si riche et diversifié, ne tient qu’à nous tous, autorités et professionnels de tous les horizons.
Trajet de la mission
La mission est partie de Bamako pour Bandiagara, le cœur du pays dogon, en passant par Sévaré – la façade riveraine de Mopti la Venise malienne. Il faut avouer que cela n’a pas été facile et rapide de rallier les différents points retenus sur des pistes rocailleuses ou pleines de sable notamment : Pelu sur le plateau, Nombori dans la falaise et Sadia dans la plaine.
Le pays dogon
L’habitat
Environnement social
En occupant la falaise, les dogon, descendants d’une même lignée et d’un même ancêtre commun, habitèrent dans une même communauté. Cette communauté, regroupant les individus mâles, leurs femmes et leurs enfants, s’appelle ginna (on prononce guinna). Les frères d’un ou plusieurs clans se dispersèrent et fondèrent ainsi, plusieurs unités d’habitations comme pour mieux se sécuriser.
Unité d’habitation
Lors de l’installation d’une unité d’habitation ou village, la qualité défensive était primordiale exceptée dans la plaine, unité d’habitation relativement récente. Comme d’autres de la falaise les villages de Pélou et de Nombori ont été bâtis dans des zones faciles à défendre?
En général, chaque village dogon a une devise. Celle-ci a un rapport direct avec ses fondateurs, son histoire, sa localisation et la cosmogonie dogon. La vie se déroule dans les villages et surtout en communautés, et il est difficile de voir des habitats isolés.
Hormis ceux de la plaine il existe deux types de villages: ceux du plateau édifiés sur des surfaces rocailleuses et ceux édifiés sur des éboulis au pied de la falaise.
Habitat et sa signification
Aviez-vous un panier dogon? Il est carré à la base, tandis que le haut est circulaire. Il sert aussi d’unité de mesure et renversé, il est la représentation du cosmos (soleil rond et cieux carrés).
Les huttes sont à même le roc avec des fondations solides pour ne pas perdre un mètre carré de terre labourable. Les constructions sont assez spectaculaires.
Edifices
Différents types
Les édifices au pays dogon sont de type :
– public (toguna, case des femmes en menstruations),
– communautaire (guinna), ou
– privé (grenier).
Mode de réalisation
Les infrastructures telles que les guinna les toguna, et les cases des femmes en menstruations sont construites avec la participation collective. Chacun participe au chantier selon sa compétence.
Le métier de maçon en tant que profession n’existe pas dans le village. Il est exercé et de manière collégiale pour aider et assister son prochain. Les façades des constructions sont aveugles sur le côté est, de manière à éviter les intempéries.
De nos jours les guinna et les toguna ne se construisent que très rarement, car ayant des liens étroits avec la fondation du village.
Toguna
Le togouna ou toguna, bien public est édifié au moment de la fondation du village ou de la création d’un quartier. Il est après la case des femmes en menstruations, le second édifice bâti du village.
Lieu où se réunit le conseil du village, il occupe toujours une position stratégique. Case ou hangar à palabres exclusivement réservé, c’est sous le toguna, que sont débattus les sujets d’intérêt collectif. Y ont accès uniquement les éléments mâles.
Structure d’un toguna
De manière générale, il est composé:
– d’un toit comportant théoriquement huit épaisseurs de bottes de mil. Il symbolise le nombre de lignée des ancêtres des dogon;
– des poteaux, (en pierre ou en bois), qui supportent le toit.
La case à palabres est orientée dans le sens nord – sud avec un toit très bas (à environ 1,20m du sol). Elle a des formes diverses: carrées, rondes, rectangulaires, losangiques, etc. Les poteaux sont fait de pierres empilées (parfois une seule grosse pierre) de grosses fourches brutes ou sculptées en bois.
L’unique mobilier usité, pour s’asseoir ou s’allonger, consiste en de grosses pierres ou des planches posées à même le sol.
Gin’na ou guinna
Le guinna symbolise le lieu où habite le clan. Occupé par l’aîné en âge des hommes mâles, le guinna est le lieu de regroupement de toute la famille à l’occasion des cérémonies.
Elle est construite à l’origine, lors de l’installation du clan au village.
Lecture d’un guinna
Le guinna offre une façade principale imposante et comporte au moins deux niveaux. Cette façade couvre l’ensemble des niveaux (rez de chaussée & étage) et comporte plusieurs niches réparties en des rangées de huit. Les rangées sont équitablement reparties de part et d’autre de la porte. Les niches représentent les huit ancêtres dogon et leur descendance.
Au dessus ou légèrement inclinée sur la porte principale s’ouvre la petite porte d’un grange ou d’un réduit. Celui-ci sert de grenier ou de maison occasionnelle. Les portes du guinna sont uniques, en bois et rarement sculptées. Elles comportent des serrures en bois et s’ouvrent en général de et vers l’intérieur.
Architecture d’un guinna
Les guinna sont orientés selon les vents et les pluies. Les fenêtres inexistantes sur les façades se trouvent sur le toit, afin qu’on ne jette un mauvais sort sur la famille. Ces ouvertures sont fermées au moyen des canaris à couvercle, ouverts selon qu’il y ait pluie ou non.
L’accès à l’étage ou sur le toit (emplacement des fenêtres) est assuré par une échelle en forme d’Y taillée dans un tronc d’arbre et placée à côté de l’entrée de la porte ou dans l’amère cour.
Case des femmes
Son histoire est intimement liée à la croyance religieuse des dogon. Située à l’orée du village et comme son nom l’indique, la case des femmes est exclusivement réservée aux femmes. Celles-ci y passent les cinq jours de leur règles avant de se purifier pour rejoindre leur parent ou conjoint.
Il ne nous a pas été donné de les visiter ( car je ne suis pas une femme), encore moins de faire des relevés architecturaux aussi bien dans notre étape de Pélou que de Nombori.
Alors, nous ne pourrons vous donner des plans graphiques ou autres. Cependant, de nos observations, leur conception et construction ne diffèrent nullement d’une maison d’habitation normale. Seulement sa place est particulière dans le paysage urbain.
Grenier
Après le guinna, le grenier à mil est l’élément bâti le plus important de la concession dogon. Edifice de type privé son nombre de 2 15, varie selon la taille et la richesse de la famille. Surmonté toujours d’un dôme, sa construction nécessite le travail d’un spécialiste.
Structure d’un grenier
Dans le paysage urbain, les greniers se distinguent par leur toit en paille ou en chaume. Bâtis avec des boudins de terre dont l’épaisseur varie de 5 à 7cm, le grenier est rond ou carré avec 1,20m ou 1,50m de rayon ou de côté pour une hauteur moyenne de 2,20m. Généralement, le fond du grenier est une claie en bois recouvert de banco, que supportent quatre grosses pierres.
Topologie d’un grenier
Le grenier est très souvent à 2 étages.
Suivant les besoins du propriétaire, le plancher est bâti à la hauteur désirée. Les armatures, très caractéristiques à l’extérieur sur les murs, sont en tiges de bois plantés en carré.
Construit de l’intérieur, le maçon sera aidé par un autre de l’extérieur, pour l’édification du dôme. Sur ce dernier repose un toit fait en pailles d’herbe, resserrées au sommet.
Des cadres sont aménagés pour recevoir les ouvertures dont le nombre varie selon le compartimentage et le niveau. Les portes sont fermées au moyen de serrures en bois ou avec de la terre pour en améliorer l’étanchéité.
(à suivre)
N.B: Mes remerciements
Au passage je tiens à remercier MM. Cissé Lassana & Dembélé Mamadi, respectivement chef de la mission culturelle de Bandiagara et Responsable à la direction des sciences humaines, pour leur sollicitude et marque de confiance.
