En septembre 2005, le Sommet des Nations-Unies relatif au suivi de la Déclaration du Millénaire a affirmé la nécessité d’une mondialisation équitable. Pour cela, il a inscrit la promotion de l’emploi productif et du travail décent pour tous parmi les objectifs des politiques nationales et internationales. Il a ainsi souligné le rôle essentiel de l’emploi et de la qualité de l’emploi dans l’action contre la pauvreté et pour le développement.
Avant cette rencontre, le Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement tenu à Ouagadougou en septembre 2004 avait appelé à renforcer la dimension sociale de la mondialisation et à promouvoir un travail décent pour tous comme l’a si bien utilement rappelé Mr. John Kufuor, président du Ghana et président en exercice de l’Union africaine à la dernière Conférence internationale du travail, dont il était l’invité, et qui s’est achevée le 15 juin 2007 à Genève (Suisse).
La promotion du travail décent est au cœur de l’agenda politique de l’Organisation Internationale du Travail (Oit) depuis 2000. A travers son Agenda du Travail Décent, l’OIT propose de «donner à tous les hommes et toutes les femmes de réelles chances d’accès à un travail décent et productif dans des conditions de liberté, d’équité, de sécurité et de dignité humaine ».
Cet agenda du travail décent a été approuvé par les gouvernements et les partenaires sociaux (employeurs et travailleurs) au sein de l’OIT, et il représente un ensemble d’orientations à vocation universelle, et non liées à un modèle de développement particulier.
L’Agenda du travail décent se fonde sur une approche intégrée, qui inclut l’emploi productif et librement choisi, le droit du travail, la protection sociale, le dialogue social, et la prise en compte de la dimension du genre. Il inclut donc les « droits sociaux fondamentaux » qui sont le socle minimal de droits sociaux que la communauté internationale a établi et dont le Mali soutient déjà la mise en œuvre.
Mais il est plus ambitieux : il ne vise pas seulement à garantir un socle minimum de droits, mais à orienter le développement autour de valeurs et de principes d’action et de gouvernance qui associent compétitivité économique et justice sociale.
L’objectif de l’Agenda du travail décent n’est ni plus ni moins que le développement durable traduit en politique nationale, globale, active et cohérente permettant d’intégrer les pauvres dans un processus de croissance et d’épanouissement.
Le développement humain met l’accent sur, entre autres, la création d’emplois décents, c’est à dire des emplois productifs permettant au travailleur d’obtenir un revenu suffisant et allant de paire avec la protection des droits fondamentaux au travail.
Pour l’Organisation internationale du travail, « un travail décent » est un travail répondant aux aspirations des personnes pas seulement en termes de revenu, mais aussi de sécurité pour elles et leur famille, et ce, dans un contexte garantissant leur liberté et leur dignité.
Le concept de travail décent implique également l’égalité homme/femme, sans discrimination aucune.
Ce concept implique, enfin, liberté et respect de la dignité humaine, et donne le droit à une couverture sociale.
En conséquence, le concept de travail décent est en perpétuelle évolution et ne saurait être statique. Sa mesure est plutôt qualitative que quantitative. C’est pour cette raison que l’on parle de déficit de travail décent lorsque toutes les conditions ne sont pas remplies de façon symétrique.
En effet, le Travail décent n’a pas de plafond. C’est un objectif ou un idéal qui doit être considéré dans chaque contexte national en tenant compte des réalités économiques et sociales. A cet égard, il convient de préciser qu’il n’y a pas de modèle unique de travail décent.
Les quatre objectifs stratégiques suivants sont les moyens par lesquels le concept de travail décent peut être opérationnalisé si l’on se réfère à l’Agenda global pour le travail décent de l’Oit :
1. Promouvoir et mettre en œuvre les normes et les principes et droits fondamentaux au travail.
2. Accroître les possibilités pour les femmes et pour les hommes d’obtenir un emploi et un revenu convenables.
3. Accroître l’étendue et l’efficacité de la protection sociale pour tous.
4. Renforcer le tripartisme et le dialogue social.
Ainsi, pour promouvoir le travail décent, il faut certes combattre les déficits les plus criants au regard des droits sociaux fondamentaux, comme le travail des enfants, mais il faut aussi et surtout infléchir les logiques de développement.
Pour faire reculer la pauvreté, il ne suffit pas d’accorder des aides de subsistance, ou d’attendre les résultats de la croissance et de l’installation d’entreprises internationales.
Il faut créer un environnement propice aux investissements nationaux et étrangers créateurs d’emplois locaux ; améliorer la gouvernance, y compris par le dialogue social ; identifier les déficits en matière de travail décent ; établir un cadre légal et réglementaire qui protège les travailleurs et garantit l’égalité entre hommes et femmes ; installer des systèmes viables de protection sociale, d’éducation et de formation tout au long de la vie ; assurer la sécurité juridique pour les entreprises ; réduire la corruption et établir des règles équitables pour la concurrence.
En mettant l’accent sur l’emploi, la qualité de l’emploi et les politiques sociales appropriées, la promotion du travail décent est un facteur de justice et de cohésion sociale mais aussi de performance économique. L’affirmation d’objectifs de nature sociale ne peut en aucun cas être utilisée à des fins protectionnistes. L’objectif est le progrès social et sa juste répartition au bénéfice de tous.
Au Mali, plusieurs cadres existent déjà pour promouvoir l’Agenda du travail décent. Les plus significatifs sont sûrement le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté devenu récemment le Cadre stratégique pour la croissance en vue de la réduction de la pauvreté et le Comité Intersectoriel de suivi et d’évaluation de la mise en Œuvre de la Déclaration des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union africaine sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté.
D’autres institutions non moins importantes existent également, comme le Conseil supérieur du travail et les organes représentatifs du personnel au sein des entreprises.
Kalaban Coura
Tél.912 50 00
Bamako.
26 juin 2007.