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web-6.jpgLe calvaire moral que vivent les «sans mari» est inqualifiable. Les célibataires endurcies sont victimes de toutes sortes de brimades de la part de leurs proches et de la société. Toutes celles qui restent trop longtemps sans mari mérite leur sort parce qu’elles portent la poisse.

MARGINALISÉES

Les femmes non mariées sont marginalisées. Les préjugés qui les accablent sont nombreux. Elles sont accusées très souvent à tort de mœurs légères. Ces femmes sont indexées comme des muso téré djougou. Paradoxalement, il se trouve qu’un grand nombre de femmes célibataires se révèlent exigeantes sur le choix de leur mari. Alors les soupirants éconduits ont beau jeu de faire paraître leurs anciennes copines pour des prétentieuses à la recherche d’une parti riche.

A 35 ans, Oumou Diarra, ménagère, n’est toujours pas mariée. Elle affirme que l’atmosphère de la maison est irrespirable pour elle. Les belles-sœurs qui partagent le même habitat paternel, lui rendent la vie difficile sous le regard indifférent de leurs maris, ses frères. Oumou explique qu’ils ont perdu très tôt leurs parents. C’est elle qui a élevé ses petits frères après la disparition des parents. « Mes frères me doivent tout. » soutient-t-elle, en larmes.

Mais, malheureusement, ils ne sont plus reconnaissants. « Quand un conflit éclate entre mes belles-sœurs et moi, mes frères se rangent toujours du côté de leurs épouses. Je ne jouis d’aucun respect à cause de mon célibat. Mes frères ne me tolèrent plus. Ils me disent d’aller chercher un foyer. Ils veulent vivre en paix avec leurs femmes » déplore-t-elle. La malchanceuse Oumou, ne croit plus aux recettes des marabouts et des féticheurs. Elle a tout essayé en vain. Elle a dépensé toute sa fortune. Maintenant elle s’en remet à Dieu. »J’espère toujours avoir un mari à condition qu’il soit religieux et respectable« , conclut notre interlocutrice.

COMME UNE OPPORTUNISTE

Le cas de Awa Keïta est tout autre. La vie lui a offert tout ce qu’elle veut, sauf un mari. Mère d’un garçon de 22 ans, elle est cadre dans une grande entreprise de la place. Malgré l’opulence dans laquelle elle vie, Awa Keïta n’a qu’un souci : se trouver un mari. Elle nous avoue qu’elle a peut-être eu tort de privilégier sa carrière. « A l’époque, le mariage ne m’intéressait pas. J’ai cru qu’avec la fortune je pouvais tout avoir. Vous voyez combien je me suis trompée ! » confesse t-elle.

Le comble de l’humiliation est qu’à un certain moment, sa mère refusait tous les cadeaux qu’elle lui offrait, sous prétexte qu’Awa « refuse de se marier« . Il a fallu l’intervention du chef du quartier et de l’imam pour convaincre sa mère que la célibataire vit son destin. « Je regrette amèrement de n’avoir pas accordé assez d’importance au mariage quand j’étais plus jeune. Par ma faute, mon fils a grandi sans père, et ma mère que j’aime le plus au monde me voit comme une opportuniste. » soupire la vaillante célibataire.

Le cas de Salimata Traoré est dramatique. Durant ses 45 ans de vie, elle n’a jamais eu de prétendant au mariage. » Personne ne me considère. On m’adresse la parole juste pour se moquer de moi. On me reproche d’être possédée par les esprits maléfiques. » dit notre interlocutrice. Dans sa quête de conjoint, elle aussi a dépensé tout son or et son argent. Sans succès.

Il n’est pas étonnant de voir les « sans mari« se réfugier dans la prière, pour hâter la venue du conjoint providentiel.

Dans le Mali actuel, les fatalistes sont encore légion. Ils estiment que nul ne peut se battre contre le destin. C’est peut-être la volonté d’Allah qui impose à ces dames de vivre seules. « L’homme propose, Dieu décide » dit-on. De ce fait, nul n’a le droit de juger son prochain. Chacun suit le chemin tracé par le Tout Puissant.

Mariam A. TRAORÉ | Essor

27 juillet 2007