Décidément ! La singularité malienne est légendaire. A l’instar des autres pays, nous avons inventé nos moyens de transport pour nos déplacements ( Duruni, Sotrama, Bus, Wotoro..) . Il ne nous restait plus qu’à créer le moyen de transport approprié pour le pain du petit déjeuner.
A génie malien, rien d’impossible ! Nous empruntons aux frères Béninois les » Zimid ja « (moto -taxi) pour la cause, en y ajoutant, s’il vous plaît, les ingrédients maliens. Vous êtes étonnés n’est ce pas ? Je vous dis toujours d’observer ce qui se passe autour de vous.
Notre particularité porte sur le fait qu’au lieu de transporter les passagers, c’est le pain qu’on transporte sur ces « Zimid ja « avec toute une panoplie de marque déposée made in » China Puissance « , et de quelle manière ?
A cet effet, il a été confectionné un véritable cercueil dans lequel se dressent verticalement les pains comme s’il s’agissait pour eux, de scruter le ciel en l’implorant pour ne pas être vendus, histoire de ne pas assouvir la faim matinale de quelqu’un.
Si j’ai tantôt parlé de cercueil, c’est non seulement à cause de la caisse qui lui ressemble mais surtout à cause également du fait qu’on les recouvre de plastique noir comme si l’on avait à faire à un convoi d’un service de pompe funèbre. Alors ! Votre appétit n’est-il pas coupé ? Attendez la suite de mon histoire.
Les » Zimid ja « en question, au-delà de leur aspect lugubre (de couleur noire de surcroît pour la plupart), sont pilotés par des conducteurs qui se prennent pour des pilotes de rallye.
Il ne se passe pas une semaine sans qu’une personne âgée, au sortir de la mosquée après la prière matinale, ne se fasse renversée par un de ces impénitents pilotes. Conséquence : ordonnance en plus du prix du pain qui vous est, aujourd’hui, indispensable au petit » dèje « . Un matin, au volant de ma voiture, j’ai cru voir venir sur moi une fusée Tomahawk.
J’ai failli fermer la portière de la voiture en oubliant ma tête dedans lorsque je m’en suis éjecté. En fait, il s’agissait d’un taxi qui venait de renverser un de ces transporteurs de pain un peu » zombé « .
Toute la cargaison de pain est partie en voltige digne d’une acrobatie aérienne comme le faisait nos pilotes de MIG. Heureusement que les écoliers n’étaient pas encore sur le chemin de l’école sinon le petit » déje « s’avérait garanti » Boussac » pour eux.
Il n’y a pas de sot métier, j’en conviens, même si le mien est : transporteur de pain, mais de grâce, Messieurs les boulangers, en plus de vos efforts d’amélioration de la qualité du pain, lorgnez du côté de celui de son transport sinon nous verrons trois sortes de « déjeuneurs « à Bamako : ceux qui mangent le pain ; ceux qui mangent du pain saignant et ceux qui comme moi boivent la bouillie.
Mamadou Roche KEITA
23 Mars 2010.