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La hantise de la cassure du Parti africain pour la solidarité et la justice a, du moins, permis aux Abeilles d’afficher un semblant de sérénité à la veille de leur congrès ordinaire. L’Adéma –Pasj a traversé plusieurs zones de turbulence et les dernières plaies, selon certains cadres du parti, ne sont pas encore cicatrisées.

De ce fait, l’Adéma, disent-ils, reste encore un grand malade et la préparation du prochain congrès se fait avec la prudence du thérapeute pourtant convaincu qu’il n’arrivera jamais à éliminer les tares récurrentes des Abeilles liées aux problèmes de leadership. Cependant la question qui revient toujours est celle de savoir qui succédera à Dioncounda Traoré ?

En réalité, ce parti politique ne regorge actuellement d’aucune personnalité charismatique susceptible de créer l’unanimité autour de sa personne. Par prudence, les stratégies se sont donc portées sur le combat feutré, souvent par corruption interposée.

En fait, le président de l’Adéma-Pasj, Dioncounda Traoré, ne fait pas figure de personnalité «indéboulonnable» à son poste comme veulent le faire croire ses partisans.

Si les antécédents du parti prouvent que le président de la Ruche bénéficie des atouts nés des conséquences de ses crises successives, il n’en demeure pas moins que dans l’ombre, s’activent Iba N’Diaye, ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle et Tiémoko Sangaré, ministre de l’Agriculture pour prendre les rênes du parti. Aujourd’hui, la singularité du combat de la Ruche est que Dioncounda Traoré a pris la place de celui qu’on appelait «le candidat naturel».

Or, ce qui frappe tous les esprits est qu’il était arrivé à la tête du parti en 2000, à l’issue du congrès extraordinaire des Abeilles, de la manière la plus imprévisible.Il fut le président «par défaut» puisque la Ruche était sortie d’une dure bataille de positionnement entre le camp d’Ibrahim Boubacar Kéita et de Bocari Tréta, «les conservateurs» et des «rénovateurs» dirigés par Soumeylou Boubèye Maïga et Soumaïla Cissé, comprenant entre autres, Ousmane Sy et Me Sy Kadiatou Sow.

Ces personnalités étaient jugées plus charismatiques que Dioncounda Traoré, mais, il a fallu, après cette rude épreuve, trouver un candidat d’apaisement capable de cicatriser les plaies car les Abeilles avaient traversé une période de déchirement grave. C’est donc, contre toute attente que Dioncounda Traoré fut désigné à la tête du parti. A l’époque, il paraissait neutre dans ce combat de chef et l’on ne savait pas de manière précise à quel camp appartenait ce nouveau président du comité exécutif de l’Adéma-Pasj.

Certains voyaient donc en lui l’opportuniste politique parfait qui savait toujours tirer son épingle du jeu dans les périodes sombres pendant lesquels le parti traversait ses habituelles zones de turbulence. Un cadre du parti nous confiait, après les primaires de l’Adéma-Pasj qui avaient désigné Soumaïla Cissé candidat du parti à l’élection présidentielle de 2002 que «chaque fois qu’il s’agissait de se prononcer pour le maintien ou non de la candidature du président de la commission de l’UEMOA, on ne voyait pas Dioncounda au siège du parti. Il restait chez lui à Nara».

C’est quelqu’un qui, sans charisme réel, savait bien nager entre les eaux troubles. Pourtant, aujourd’hui, sa position de président de l’Assemblée nationale lui confère un certain atout en dépit de ses contre performances pour augmenter les indemnités des députés. C’est sous sa présidence qu’une coupe sombre a été faite dans le budget de l’Assemblée nationale. Iba N’Diaye, 2e vice-président des Abeilles, n’est pas mieux loti que Dioncounda Traoré.

A l’issue du congrès extraordinaire des Abeilles, en 2000, il a occupé le poste de 2e vice-président du parti après avoir occupé le poste de secrétaire général. Aujourd’hui, son arrivée au ministère de l’Emploi a fait couler beaucoup d’encre, à la suite de ses relations controversées avec Mme Diabaté Fatoumata Guindo, porte-parole du gouvernement. Son éthique en a subi une dure épreuve et le choix du président de la République, encore une fois, a été mis en doute.

En réalité, Iba N’Diaye a toujours eu de grandes difficultés pour jouer les premiers rôles dans la direction du parti. Des cadres de la Ruche disent ouvertement qu’il n’a pas l’envergure d’un président du comité exécutif et il est notamment soupçonné de battre campagne, dans l’ombre, pour le camp des «amis d’ATT».

La troisième personnalité de l’Adéma-Pasj à se positionner pour la conquête du fauteuil de président du parti est Tiémoko Sangaré que certains militants regardent comme le «revenant», celui qui avait quitté le navire en période de trouble pour aller au Miria et qui revient convoiter les premières places.

Il risque d’ailleurs, nous a-t-on confié, de laisser des plumes dans une bataille qui paraît prématurée pour lui. En fait, ces trois cadres de l’Adéma-Pasj ne présentent pas aux yeux des militants, la carrure du leader vraiment charismatique.

Ils ont l’allure des candidats circonstanciels, à défaut d’un véritable leader de l’Adéma-Pasj. Pourtant on ne saurait taire les remarques du doyen Oumar Samba Diallo, président d’honneur de l’URD qui a longtemps cheminé aux côtés des cadres de l’Adéma-Pasj et qui nous a révélé : «chaque fois que l’Adéma est en période de trouble ou d’absence de véritable leader charismatique, on a fait appel à Dioncounda Traoré, c’est vraiment l’homme des moments d’incertitude».

Pourtant, la Ruche n’est pas en pleine ébullition et si les mêmes causes entraînent les mêmes effets, l’actuel président de l’Adéma-Pasj devrait se méfier de ce contexte politique d’avant congrès qui ne ressemble pas aux autres. C’est dans ces conditions que des cadres du parti, de manière très feutrée, sont en train de placer leurs pions pour gravir les premières marches du comité exécutif.

Cette absence de charisme des candidats de l’Adéma-Pasj prouve, à juste titre, que le parti se trouve à la croisée des chemins et que les militants ont les plus grandes difficultés à trouver leurs repères. L’irruption dans le paysage politique des candidats par défaut peut être le signe révélateur d’un possible changement de dernière minute puisque nul ne peut se prévaloir, de par sa personnalité intrinsèque, d’être le candidat majoritaire des militants du Parti africain pour la solidarité et la justice.


Baba Dembélé

22 Octobre 2008